Lettre voltairienne au président Recep Tayyip Erdoğan : nous arrivons !

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Monsieur le Président,

Croyez bien que c’est avec beaucoup d’attente et de respect que je vous écris cette missive. Car j’avoue avoir une prédilection pour les belles stations balnéaires de votre pays, notamment celles d’Antalya, de Kemer et de Bodrum. C'est pourquoi je pense venir m’installer en Turquie et y passer une retraite heureuse. En effet, pourquoi aller dans des pays catholiques, au Portugal ou en Espagne, quand on peut avoir le soleil et la douce voix du muezzin dans votre pays policé ? D’ailleurs, j’ai réussi à convaincre mon épouse, mes six enfants et mes 24 petits-enfants, mes amis et plusieurs associations de gens du troisième âge de migrer chez vous et ainsi vous donner un aperçu de nos mœurs et nos coutumes. Vous le voyez, vous pouvez vous réjouir, nous serons très nombreux à venir habiter en bordure de la mer Égée.

Seul petit problème, comme nous sommes tous catholiques, il faudrait prévoir la construction de quelques églises supplémentaires. Il faudrait aussi penser (oh, simplement une fois par an) au passage de notre procession pour la Semaine Sainte. Je suis sûr que, pour cette occasion, vous ne verrez pas de problèmes à fermer une ou deux rues pour favoriser le passage du cortège. De la même manière, je suis certain qu’en attendant l’édification de nos chapelles et de leurs cloches sonnant à tout-va lors des offices, vos imams dénicheront une mosquée pour nous accueillir le dimanche. Pour l’emplacement de nos cathédrales, je fais confiance à vos municipalités, qui nous trouveront bien un lieu propice au prix d’une livre turque symbolique. Comme il y aura de nombreux enfants, nous souhaitons également qu’ils entreprennent une scolarité avec crucifix autour du cou et sandwichs jambon-beurre à la cantine des écoles.

Adorant vos plages, nous vous demandons aussi de pouvoir faire du monokini sans être importunés par des personnes en burkini. Pourriez-vous également nous indiquer des lieux naturistes où nous ne choquerons pas les bons musulmans ? Je pense que, sur ces derniers points, nous trouverons un consensus ; sinon, si cela nous était refusé, pourriez-vous nous indiquer l'adresse du CCCT (Conseil Contre la Christianophobie en Turquie) ainsi que des postes de police, afin de déposer plainte pour discrimination ?

Lors des élections françaises de 2022, nous aimerions que vous nous autorisiez à sortir le drapeau tricolore dans les rues et à klaxonner à bord de nos voitures pour manifester dans la joie et la bonne humeur notre satisfaction de voir un candidat « populiste » élu comme Président. Je vous demande aussi de faire attention à ce que vos magazines ne critiquent pas avec véhémence nos gouvernants. Car, dans ce cas, nous serions dans l’obligation d’enlever les affiches vantant ces publications. Ensuite, nous organiserions des meetings pour, en réparation, faire acclamer nos dirigeants avec d’immense drapeaux français, meetings où nous inviterions monsieur Dupont-Aignan et madame Le Pen. Comme vous nous avez ouvert la voie en expliquant que les Français avaient massacré 5 millions de musulmans en Algérie, vous ne verrez pas d’inconvénients à ce que nous mentionnions le génocide arménien et ces 1,2 millions de morts (chiffre, lui, exact), soit les deux tiers de cette population chrétienne de l’époque.

Mais oublions plutôt ces vieilles querelles : je suis persuadé que, dans ces coins d’Anatolie, nos deux communautés sauront apprécier nos différentes coutumes. Vous comprendrez donc mon impatience à venir enrichir votre nation en substituant au fez notre vieux béret basque.

Très cordialement,

J.-P. Fabre Bernadac
J.-P. Fabre Bernadac
Ancien officier de Gendarmerie - Diplômé de criminologie et de criminalistique

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