Le conflit ukrainien sonnera-t-il le glas de l’écologie politique ?

Si la guerre est d’abord porteuse de brutalité, d’oppression et de désolation et n’apporte généralement à terme que le chaos au vaincu comme au vainqueur, elle est aussi très souvent révélatrice de situations latentes occultées en temps de paix. Révélatrice d’un caractère agressif refoulé pour les uns, elle peut aussi être associée à des actes de profonde humanité, comme l’a démontré la journaliste Véronique de Viguerie lors de ses innombrables reportages.

Si le conflit russo-ukrainien nous a confirmé certaines évidences comme le fait que Poutine était bel et bien un tyran adémocrate ou que l’Europe de la Défense était d’une faiblesse affligeante, il a aussi mis en lumière certaines situations moins manifestes pour l’opinion publique, notamment la forte dépendance gazière de l’Europe vis-à-vis de la Russie. Une dépendance gazière qui s’est accentuée au cours des dernières années par suite de la baisse structurelle de la production de la mer du Nord et des Pays-Bas, mais aussi et surtout à cause de choix énergétiques absurdes et purement idéologiques. Cette dépendance gazière nous interdit, dans les faits, de priver la Russie du principal financement de sa machine de guerre. Si, pour la France, l’Espagne ou le Royaume-Uni la dépendance est modérée, pour l’Allemagne et la plupart des pays de l’Est européen (Hongrie, Slovaquie, République tchèque et pays baltes), elle ne permettra pas, sauf à imposer des restrictions inacceptables pour les populations, d’imposer un embargo sur le gaz russe.

La dépendance croissante de l’Europe vis-à-vis du gaz russe se lit en filigrane de l’accroissement de la demande électrique. Elle intervient en principal pilier de la transition énergétique qui repose sur le « grand remplacement » des équipement thermiques par des équipement électriques.

Bien que représentant un poids politique négligeable, l’écologie politique impacte, depuis plus de vingt ans, de façon déterminante les choix énergétiques européens. Reposant sur une utopique croissance verte faite de 100 % de renouvelable, sa stratégie malsaine a conduit l’Europe à investir plus de 1.000 milliards d’euros dans l’éolien et le solaire tout en imposant une idéologie antinucléaire issue des mouvements pacifistes des années 1960. S’il n’y a jamais eu, en France, une réelle volonté de sortir du nucléaire, comme tel fut le cas outre-Rhin après Fukushima, la filière souffre beaucoup d’attaques incessantes portées par les Verts depuis la fin du siècle dernier. Principaux responsables des arrêts de Superphénix et d’Astrid, de la fermeture de Fessenheim mais aussi de la perte de savoir-faire liée à vingt ans d’inactivité opérationnelle (le dernier réacteur mis en service est Civaux-2, en avril 2002), les Verts rêvent toujours d’un mix 100 % renouvelable et s’avèrent incapables de faire la différence entre nucléaire militaire et nucléaire civil.

Dans son discours fondateur de Lyon du 29 janvier 2021, Yannick Jadot confirmait que « l’opposition au nucléaire est politique en plus d’être morale ». Il y a deux jours, l’écolo belge Georges Gilkinet persistait en signant, dans le journal La Meuse, un article intitulé « Le nucléaire peut être utilisé comme une arme, pas le vent et le soleil. » Un discours fréquemment relayé par des collectifs influents comme Sortir du nucléaire, expliquant que « le nucléaire civil favorise directement ou indirectement la prolifération et l’usage de l’arme nucléaire » ou encore que « le lobby nucléaire représente un danger pour la démocratie ».

Si ces 1.000 milliards d'euros stupidement investis dans le vent et le soleil l’avait été de façon concertée dans le nucléaire, l’Europe serait délivrée du gaz sibérien et pourrait imposer à la Russie « l’embargo de sa mort économique ». Hélas, cette situation rêvée aujourd’hui sera malheureusement pour… après-demain.

Puisse le conflit ukrainien au moins révéler à l’Europe sa fragilité énergétique et contribuer à redéfinir une indispensable stratégie commune. Puisse le conflit ukrainien sonner le glas de la mortifère écologie politique.

Philippe Charlez
Philippe Charlez
Chroniqueur à BV, ingénieur des Mines de l'École polytechnique de Mons (Belgique), docteur en physique de l'Institut de physique du globe de Paris, enseignant, expert énergies à l’institut Sapiens

Vos commentaires

52 commentaires

  1. Les milliards utilisés dans les moulins à vent et les cocotes minute auraient été plus utiles dans la géothermie ; la biomasse et les algues
    D ailleurs les constructeurs allemand étudient en ce moment sur les algues vertes
    Aux USA une société privé vient de mettre au point un forage laser profond qui permettra d utiliser les centrales charbon et gaz vers le géothermie ,source inépuisable
    Mais un écolo tout le monde le sais c est ver dehors ,rouge dedans

  2. Puisse votre analyse cher Monsieur dessiller les yeux des milliers de citoyens ‘bénis oui oui’ de la sinistre doxa écologique répandue en France …

  3. S’il existe des historiens encore soucieux d’un minimum d’objectivité factuelle à la fin du siècle, ils condamneront avec véhémence les écologistes et leurs complices politiques, responsables d’une crise énergétique dont nous ne sommes qu’au début. Cette crise sera à terme un facteur de régression de tout un monde, le nôtre.

  4. Les médias UE se gargarisent d’une attaque d’une centrale nucléaire par les Russes… Il y a fort à parier qu’il s’agit plutôt d’une prise en main afin d’en garantir la sécurité, comme ils ont fait au Kazakhstan. Quand toute la pègre a été armée par le gouvernement Ukrainien, tout est à craindre. N’oublions pas trop vite que la dernière grande catastrophe apportée aux Européens a été l’explosion de la centrale de Tchernobyl.. premiers grands mensonges écolos..

  5. Je me suis faite embobiner dans les années 1970 contre l’énergie nucléaire, mais il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, les centrales nucléaires sont bien plus productives et moins polluantes que les énergies dites renouvelables. Le nucléaire à fission sera plus tard remplacé par la fusion, c’est parfaitement naturel, c’est ainsi que fonctionne le soleil. L’indépendance énergétique est une condition de survie.

  6. Le soleil ne peut pas être une arme? Si ma mémoire est bonne, les Grecs ou les Phéniciens, je ne sais plus trop, s en sont déjà servis comme arme pour mettre le feu aux bateaux adverses… En plus d être bêtes, ils sont incultes .. et ça voudrait nous gouverner…

  7. Il est utile de savoir que l’ éolien s’ achète + cher le kw que le kw nucléaire, i l est perdu à 99% mais payé 100% + les taxes par l’ abonné EDF.
    Une éolienne doit être démonté normalement après 20 ans de service,son rendement diminue mais l’ éolien offshore s’ use beaucoup + vite par le sel marin
    Le bouleversement climatique est inéluctable et cyclique nous ne pouvons rien y faire sauf travailler pour s’ en protéger au maximum

  8. Whaouh, les Allemands vont pouvoir lancer à fonds leurs centrales au lignite, puantes et polluantes ! Non seulement à l’Est dans les Lusaces de la rgrettée RDA, mais aussi à l,Ouest, en rasant la forêt de Hambach, agée de 12000 ans, près d’Aix-la-Chapelle, ou Charlemagne aimait chasser. 5 villages, avec église et cimetiérs ont été rasés. Trios tronçons d’autoroute enlevés pour ouvrir les mines a ciel ouvert. Et la gigantesque centrale de Datteln tournera jusqu’en ,,, 2060 !

    • Super écolos ces allemands !!!
      Le pire c’est que les « écolos » sont au gouvernement… quel modèle pour jadot !

  9. N’en déplaise (Le bombardement d’aujourd’hui le confirme, hélas!) nos centrales sont autant de cibles…Djihadiste ou Poutine,qui peut se permettre de laisser (par force) un territoire grand comme  » 2 départements français » en jachère comme à Tchernobyl? Certainement pas la France ! Alors, réduire la consommation ( publicité lumineuse, hall de banque ou galerie, surchauffés) arrêt de la voiture électrique et construction de barrage ( utile pour irrigation et production EDF) usine marée motrice ?

    • « qui peut se permettre de laisser (par force) un territoire grand comme » 2 départements français » en jachère comme à Tchernobyl? »
      Mauvaise pioche. Tchernobyl n’est pas une catastrophe nucléaire, mais un « incident » communiste : Centrale mal conçue, mal construite, mal vérifiée, pilotée par un personnel incompétent dont la qualité principale était l’obéissance à ses chefs. Accident nié (c’est en Suède qu’a été donnée l’alerte) puis non géré, laissant irradiées les thyroïdes des enfants.

    • Ce gaspillage d’énergie devrait être hors la loi.
      Mais il nest rien par rapport à las vegas et autres inepsies mondiales…

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