La Face cachée du multiculturalisme de Jérôme Blanchet-Gravel, Éditions du Cerf

Jérôme Blanchet-Gravel est un jeune essayiste québécois de 28 ans. En dehors de ce livre, il a déjà écrit trois ouvrages, dont deux sur le multiculturalisme. Ses prises de position lui ont valu une mésaventure désagréable : il a été exclu, en mai 2018, par le vigile d’un bar de Montréal car ses opinions n’étaient pas acceptables. Seuls, paraît-il, les progressistes avaient le droit de prendre un verre dans cet établissement : une censure qu’on croyait réservée à d’autres temps ! Il a, bien évidemment, porté plainte.

Dans La Face cachée du multiculturalisme, après une préface intéressante de Michel Maffesoli, l’auteur s’interroge sur cette idéologie qui a tendance à devenir dominante en Occident et qui semble, pour beaucoup, un progrès. Il lui trouve de nombreuses origines, en fait peu différentes : l’orientalisme du XIXe siècle qui était en vogue dans les milieux romantiques de l’époque, la fascination pour l’islam perçu comme une religion subversive et opposée au capitalisme, l’attrait pour les sociétés indigènes et, enfin, l’attirance romantique pour une écologie en partie fantasmée. Selon l’auteur, le multiculturalisme est, en fait, le résultat du déclin du libéralisme, du refus de la société de consommation et du réveil concomitant du religieux.

Mais Jérôme Blanchet-Gravel met en garde : le multiculturalisme a débouché sur le refus de l’appropriation culturelle. Au nom de ce principe étrange, on a interdit à des handicapés de pratiquer le yoga censé être réservé aux Orientaux, on empêche les Canadiens d’arborer des coiffures en plumes qui seraient l’apanage des Amérindiens et on a obligé Chanel à diffuser un communiqué pour s’excuser d’avoir mis en vente un boomerang qui appartient à la seule culture des Aborigènes australiens ! Le ridicule n’est jamais loin.

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Jérôme Blanchet-Gravel fait un panorama complet des multiples penseurs qui se sont exprimés à ce sujet. Même quand il ne partage pas leurs thèses, il en rend compte avec objectivité. Son propos est de haute tenue, mais toujours accessible. Il décrit une situation propre à la société québécoise, où les dérives sont bien plus graves que chez nous, mais nous risquons bientôt, en France, de rencontrer ce type de problème, même s’il n’est pas pour l’instant aussi aigu.

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Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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