Jean-Paul Delevoye pressenti pour remplacer Chantal Jouanno… il fallait oser !

Si le gouvernement espérait calmer le mouvement des gilets jaunes avec son "grand débat national", c’est déjà raté. Quand 70 % des Français jugent ce débat inutile, que les maires font part de leur scepticisme, la dernière initiative de la bande de pieds nickelés censée nous gouverner montre avec quelle constance ils jettent de l’huile sur le feu. En effet, pour remplacer Chantal Jouanno décrédibilisée – mais pas démonétisée - par son salaire mirobolant, nos petits marquis parisiens n’ont rien trouvé de mieux que de pressentir Jean-Paul Delevoye pour diriger cette fameuse concertation.

Delevoye, ex-RPR, ex-UMP, désormais LREM, est un apparatchik. À 72 ans, ancien maire de Bapaume, ancien député, ancien sénateur, ancien ministre de la Fonction publique, ancien médiateur de la République (un machin connu exclusivement des étudiants en droit), ancien président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Delevoye est un ancien et un éternel revenant. L’illustration parfaite de l’opportuniste en politique.

Delevoye est aussi celui qui, à la tête du CESE, a jeté à la poubelle une pétition de 700.000 signatures (excusez du peu) à propos de la loi Taubira, pour complaire au pouvoir. Les pétitionnaires n’ont pas oublié. Pour le remercier de sa complaisance, et sans doute aussi de son adhésion au parti présidentiel, le successeur de François Hollande lui a confié le Haut-Commissariat à la réforme des retraites, un poste confortable qui le maintient en prise directe avec le gouvernement.

Autant dire que le candidat pressenti est l’incarnation de tout ce que la colère actuelle dénonce : un homme de pouvoir, aux convictions changeantes, puissant parmi les puissants, adepte d’une démocratie très encadrée – et très indirecte - chargé de prébendes et d’une totale soumission au système politico-financier qui dirige notre vieille nation. L’homme idéal pour étouffer un débat dont personne, à vrai dire, n’attend grand-chose et qui pourrait bien se terminer en eau de boudin.

N’est-ce pas cela, qu’attend le gouvernement ? Ce débat annoncé par Macron le 10 décembre dernier est d’ores et déjà pipé. Certains thèmes en ont été exclus d’office, et seules quatre questions principales y seront abordées. Non seulement la discussion ne pourra pas déborder du cadre prévu, mais encore la synthèse qui en sera faite aura le goût insipide du politiquement correct, assorti de quelques maigres épices pour donner le change. C’est tellement clair qu’il est possible que seuls les soutiens du pouvoir, assortis de quelques idiots utiles recrutés parmi les gilets jaunes tôt ralliés aux séductions fallacieuses des sirènes républicaines, y participeront. Pendant ce temps-là, la contestation s’étendra dans la rue.

L’échec de ce débat est donc programmé. Pire encore,: il est voulu pour donner l’impression de la concertation et diviser le mouvement. Pas sûr que cela fonctionne. Parce que l’heure n’est plus au bla-bla et à la fausse concertation. Le régime a déjà utilisé cette ficelle, en dernier lieu, à propos des lois bioéthiques (qui n’intéressent pas grand monde en dehors d’un petit cercle lucide), et le résultat en est connu d’avance. L’heure est à un changement de paradigme politique, de personnel et surtout de chef. L’interminable agonie du régime, entamée depuis la fin crépusculaire de l’époque Mitterrand, le rend incapable de comprendre ce qui se passe sous ses yeux. L’occupant du trône n’est ni sourd ni aveugle. Il est seulement dépourvu des outils de compréhension et d’analyse de la France profonde.

Delevoye ? Une péripétie. Il sera oublié aussi vite que son débat de marionnettes.

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