L'affaire Benalla suscite de nombreuses interrogations : qui a diffusé les images du 1er mai ? Dans quel but ? Comment expliquer l'ascension fulgurante de cet homme ?

Au micro de Boulevard Voltaire, Guillaume Bernard revient sur ce scandale d'État en passe de devenir l'affaire Benalla-Macron, malgré le silence du président de la République.

Je souhaiterais vous poser une question qui n’a pas encore été réellement posée et qui intrigue : qui a voulu la peau d’Alexandre Benalla ?

Vous avez parfaitement raison. On ne le sait pas.
Qui a donné les vidéos à la presse pour qu’elles soient diffusées et que ce qui n’était qu’une affaire interne au ministère de l’Intérieur et au cabinet de l’Élysée devienne une affaire publique ?
Il y a évidemment la question du qui, mais aussi celle du pourquoi. Quel était le but de faire fuiter ces informations ? S’agissait-il exclusivement de stopper la carrière de monsieur Benalla qui devenait apparemment extrêmement puissant auprès du président de la République ? Ou était-ce de toucher le président de la République indirectement à travers ce monsieur ?
On ne le sait pas pour le moment, mais c’est le fond du problème politique.
Dans cette affaire, il y a l’affaire judiciaire, mais aussi la question politique.


La succession de révélations dresse tout de même un état de fait assez inquiétant.
Alexandre Benalla a 26 ans. De chargé de la sécurité d’Emmanuel Macron, il est devenu adjoint au chef de cabinet, lieutenant colonel de gendarmerie et probablement futur sous-préfet, avec un salaire de 10 000 euros par mois.
Comment expliquer que ce profil qui a priori ne correspond pas au pedigree classique de l’entourage habituel des présidents de la République, ait pu grimper aussi haut ?

Je me pose la même question que vous. Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur a répondu ce matin aux questions de la commission d’enquête parlementaire qu’il avait signalé au cabinet de l’Élysée les agissements extrêmement violents de monsieur Benalla lors des manifestations du 1er mai à Paris. Mais ces agissements ne sont qu’une partie de cette affaire. Le fond du problème est qu’il ne s’est apparemment rien passé à l’Élysée après cela.
Et on est légitimement en droit de se poser plusieurs questions. Quelles raisons expliquent une carrière aussi fulgurante ? Pourquoi, jusqu’au mois de juillet lorsque l’affaire sort dans la presse, une quasi totale impunité ? Que représentait-il pour le président de la République ? Quelles étaient ses véritables fonctions ?
Pour l’instant, nous n’avons aucune réponse ni dans l’enquête judiciaire ni dans l’enquête parlementaire qui est plus politique.

Lorsque l’affaire Benalla a commencé, quelques voix ont parlé d’affaire Macron et d’Élysée gate. Au final, il semble que monsieur Macron soit plutôt préservé jusqu’ici. Êtes-vous d’accord avec ce constat ?

C’est ce que l’on pourrait ressentir si on ne lit que vos chers confrères. En revanche, si on regarde un peu les réseaux sociaux, on s’aperçoit que les Français remarquent que cette affaire n’est pas uniquement l’affaire Benalla, mais l’affaire Benalla-Macron.
On peut noter que Gérard Collomb est un prétexte pour porter atteinte à l’exécutif, mais derrière lui, on retrouve, non pas l’ombre du commandeur, mais celle de Jupiter.
Symboliquement et politiquement, je crois qu’Emmanuel Macron ne sortira pas indemne de cette affaire.

Peut-on dire que l’effet coupe du monde est bien terminé ?

C’est une certitude. Le délire hystérique m’avait déjà paru un peu excessif par rapport à un simple événement sportif. Mais de surcroît, l’effet coupe du monde s’était terminé de toute façon le soir même, à cause d’un certain nombre d’agressions, de débordements et de scènes de guérilla urbaine qui s’est répandue un petit peu partout en France.
On avait politiquement essayé de surfer sur le discours officiel de la diversité qui gagne. Rappelons simplement que cette France de la diversité avait perdu avant et pourrait gagner après, ou au contraire de nouveau perdre après. Cet élan a été brisé d’abord par les échauffourées du soir même, et ensuite par cette affaire Benalla.
Il y a symboliquement quelque chose d’extrêmement fort dans cette affaire Benalla. Ce jeune homme a été, semble-t-il, protégé par l’Élysée. On peut donc y voir la rencontre et la protection réciproque des élites mondialisées d’un côté, et de l’immigration concurrente de l’autre. L’une et l’autre étant, semble-t-il, incapables de réguler leurs pulsions. Symboliquement, c’est extrêmement fort. Même si Emmanuel Macron ne sera juridiquement sans doute pas destitué, en revanche, il est bien certain que politiquement son image sera extrêmement écornée.

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23 juillet 2018 à 17:44

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