Fabien Roussel (PCF) s’empare du thème de la sécurité : finira-t-il par soutenir Marine Le Pen ?

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Le Parti communiste français n'a pas le vent en poupe. Il est loin, le temps où Jacques Duclos recueillait, à l'élection présidentielle, 4,8 millions de voix, soit 21,3 % des suffrages exprimés. Après le score infinitésimal de Marie-George Buffet, en 2007, le PCF avait préféré faire campagne, en 2012 et 2017, aux côtés de Jean-Luc Mélenchon. Cette fois, il court tout seul : s'il ne veut pas être la lanterne rouge, il a besoin, selon la formule de son secrétaire national, « de réponses nouvelles, d'une gauche qui décoiffe ». Il s'empare donc du thème de la sécurité.

Fabien Roussel prend le sujet à bras-le-corps : selon Le Figaro, il aurait déclaré que « la sécurité n’est pas un droit parmi d’autres » mais « un droit fondamental, qui exige des moyens ». On croirait entendre le Rassemblement national et la droite qui, dans ce domaine, lui colle aux basques. Quelques critiques s'expriment en interne : « Ce choix de la sécurité est voué à l’échec », prévient Robert Injey, responsable du parti dans les Alpes-Maritimes qui, avant les régionales, ne tient pas à faire la courte échelle à Thierry Mariani. Mais c'est, naturellement, la gauche de la gauche qui s'offusque le plus.

Fabien Roussel tient bon : « Ma gauche ne sera pas laxiste », assure-t-il. Il veut donner aux forces de l'ordre « plus de moyens », il promet aussi davantage « pour l'éducation des enfants », car il faut « tenir les deux bouts ». Prévention et répression, quel programme original ! Il va jusqu'à souhaiter que l’assassin de « tout détenteur d’une autorité » soit puni d’une peine de « 30 ans de prison ». Ne nous moquons pas trop de cette soudaine inclination : il fait preuve de pragmatisme et cherche, avant tout, à sauver la peau de son parti.

Le PCF, malgré quelques fiefs, n'est plus ce qu'il était. L'effondrement du bloc soviétique, la déstalinisation et, en remontant plus loin, la répression de la révolution hongroise ont fini, non sans mal, par abolir ses certitudes. Sans compter que la majeure partie de l'électorat traditionnel du PC a rejoint le RN. Fabien Roussel joue donc la survie de son parti et sa crédibilité personnelle en mettant l'accent, dans sa campagne, sur le thème de la sécurité. Ce faisant, comme les Républicains, il reconnaît, tout en protestant de sa différence, que le Rassemblement national a eu raison avant lui. Le Parti socialiste, ou ce qu'il en reste, lui emboîtera bientôt le pas.

On assiste donc, dans tous les partis, hormis l'extrême gauche, à une prise de conscience imposée, sans doute, par la répétition des actes de violence, mais surtout par les électeurs qui, quelles que soient leurs préférences politiques, dénoncent très majoritairement le délitement de l'autorité, la progression de l'insécurité et n'hésitent plus à voir un lien entre la délinquance, le terrorisme et une immigration débridée. Une fois n'est pas coutume, ils dictent leur conduite aux appareils de leurs partis.

Certes, Fabien Roussel n'en est pas encore à déclarer, comme Valérie Pécresse, qu'« il faut cesser de nier le lien entre terrorisme et immigration ». Il est même probable, si Thierry Mariani, au premier tour, atteint un score susceptible de lui ouvrir les portes de la région PACA ou si Marine Le Pen se qualifie largement pour la finale, qu'il retrouvera ses réflexes habituels. Quant à la droite, que les Républicains prétendent représenter, son attitude à l'égard du RN pourrait influer sur le résultat des prochaines élections ; mais si, comme le camarade Duclos, elle ne choisit pas entre « bonnet blanc et blanc bonnet » en faisant perdre Marine Le Pen et gagner Macron, elle se perdra elle-même irrémédiablement.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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