[Entretien] Jérôme Rivière sur les midterms : « Chez les républicains, de nouvelles figures vont émerger »

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Député européen élu sous l'étiquette RN, désormais non inscrit après avoir rejoint Reconquête durant la campagne présidentielle, Jérôme Rivière, qui a épousé une Américaine, entretient depuis des années des liens étroits avec les différents courants de la droite américaine. Il effectue des séjours fréquents aux États-Unis d'où il assiste au résultat de ces midterms en acteur éclairé. Nous l'avons contacté, ce 9 novembre après-midi à 15 heures, heure française, alors que les résultats définitifs n'étaient pas encore connus.

Marc Baudriller. À l'heure où nous publions, les résultats ne sont pas connus mais les républicains devraient avoir la majorité à la Chambre des représentants tandis que le Sénat est en ballottage très serré. Peut-on évoquer une contre-performance des républicains et de Donald Trump lors de ces midterms américains ?

Jérôme Rivière. Il y a des difficultés dans les dépouillement des différentes élections. Près de quatorze heures après la fermeture des bureaux de vote, des incertitudes planent sur l’élection de gouverneurs, mais aussi sur des postes de députés, de sénateurs. Cette incertitude engendre des questions de la part des électeurs, qu’elles soient malveillantes ou simplement mécaniques. En France, à 20 heures, nous connaissons le nom du président de la république et, à 21 heures, nous connaissons le nom des députés alors que nous sommes 67 millions d’habitants. Aux États-Unis, les élections sont organisées État par État et il n’y a pas d'État de 67 millions d’habitants !

M. B. Y a-t-il un vainqueur clair à l'issue de ce scrutin ?

J. R. Le mouvement est favorable aux républicains. Si Biden n’a plus de majorité à la Chambre des représentants, son mandat est terminé. Il n’est pas en très grande forme physique et ne représente pas un avenir certain pour incarner autre chose... D’autres résultats sont une mauvaise surprise pour les républicains. En Pennsylvanie, un candidat emblématique, le docteur Mehmet Cengiz Öz, est battu face à un mauvais candidat démocrate. Ça n’augure pas de bonnes choses en Pennsylvanie côté républicains pour la présidentielle de 2024. En revanche, en Ohio, un proche de Trump a été élu alors que les démocrates espéraient gagner cet État. Pour l’instant, au Sénat, nous sommes incapables de savoir qui a la majorité. En revanche, je pense que la Chambre des représentants va basculer du côté des républicains. De nouvelles figures vont émerger.

M. B. On a vu la large victoire de Ron DeSantis…

J. R. Oui, il a 20 points d’écart avec son adversaire. Lors du précédent scrutin, il avait gagné avec seulement 10.000 voix de plus... Ce succès est dû à sa personne mais également à la politique qu’il a menée au moment du Covid. Il a résisté à toutes les injonctions de fermer les entreprises. Les habitants de Floride lui en savent gré. Dans l’ensemble, les gouverneurs sont plutôt réélus. Nous attendons de voir l’Arizona où l’enjeu est important. La candidate Kari Lake, ancienne présentatrice de télévision, a reçu le soutien de Trump et espère gagner cet État. Pour beaucoup de républicains, elle incarnerait un bon ticket avec Trump, car il faut à Trump une femme ou une personne issue des minorités [en numéro deux, NDLR]. Elle est potentiellement sur une trajectoire importante dans la perspective de la présidentielle [dans deux ans, NDLR].

M. B. Quelles sont les bonnes surprises chez les républicains ?

J. R. En France, ces figures émergeantes ne sont pas très connues. Il y a, par exemple, l’élection de la candidate Greene qui avait défendu la vente libre des armes à feu en 2020. Elle a été largement réélue, malgré les attaques des démocrates. Il faudra également regarder Jim Banks, réélu sans difficulté, qui devrait devenir le patron du groupe républicain à la Chambre des représentants. C’est un personnage très conservateur, mais sans radicalité.

M. B. Donald Trump sort-il conforté pour sa probable course pour la présidentielle ?

J. R. Un gros tiers des électeurs républicains sont d’abord trumpistes. Les républicains sont obligés de faire avec Trump. Si ce dernier est candidat, il est peu probable qu’il ne remporte pas la primaire. Si un autre candidat remportait la primaire, Trump jouerait-il le jeu ? On peut se poser la question.

M. B. Qu’en est-il de l’avenir de Biden et de la guerre en Ukraine ?

J. R. Beaucoup d’élus républicains ne veulent plus dépenser d’argent pour le conflit en Ukraine. Un congrès acquis aux républicains restreindrait très fortement les dépenses de soutien à cette guerre. Et les élus les plus trumpistes à l’intérieur du groupe des républicains se sont engagés à dépenser zéro dollar pour l’Ukraine. La donne serait alors modifiée et Biden serait dans l’incapacité d’imposer [la même politique, NDLR], puisque c’est la Chambre des représentants qui contrôle les cordons de la bourse.

M. B. Vis-à-vis de l’Europe et de la France, la position des États-Unis pourrait-elle changer si le Congrès devenait républicain ?

J. R. Il faudra être attentif sur le budget de la Défense des États-Unis. Certains candidats républicains s’interrogent sur l’opportunité d’une légère décrue du budget de la Défense, en se désengageant de plusieurs investissement en Europe. Trump l’avait déjà dit. Les choses peuvent changer et il peut y avoir une pression croissante des États-Unis demandant une prise en charge sonnante et trébuchante de la part des nations européennes dans le domaine de la Défense. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour la France, car les nations européennes n’achètent pas français mais américain. Ce n’est pas un bon signe pour l’industrie de Défense française et européenne. Pour les parlementaires américains, la relation avec l’Europe est assez lointaine. Ils sont davantage préoccupés par la Chine.

M. B. Justement, quelle est la position des républicains vis-à-vis de la Chine ? Comment se distinguent-ils des démocrates ?

J. R. Certaines subtilités existent, mais il n’y a pas de grandes différences avec la politique de Biden, très offensive avec la Chine. C’est un adversaire économique et financier car la dette américaine est immense et les Américains ont besoin que le dollar reste la monnaie de référence. C’est aussi une menace géopolitique, avec la crainte d’une opération chinoise sur Taïwan qui aurait des conséquences importantes. Les ÉEtats-Unis ne pourraient pas ne pas intervenir.

M. B. Une majorité républicaine à la Chambre des représentants pourrait-elle enrayer l’épidémie de wokisme que l’on constate, en particulier dans les universités ?

J. R. Oui, c’est l’un des grands sujets des républicains. Ils refusent de voir sans réaction des minorités imposer systématiquement leurs oukazes aux majorités. Les républicains ont été entendus, notamment sur ces sujets, car les électeurs en ont assez.

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

10 commentaires

  1. Venant des USA il ne peut y avoir de situation favorable à l’armement français . Les Européens récents et l’Allemagne l’ont bien compris et préfèrent s’abriter sous le parapluie américain quel qu’en soit le prix qu’acheter en Europe car la pression règlementaire et tarifaire est énorme . Ils le paieront fort car le prix d’achat n’est pas le prix de revient et, à l’usage,les frais d’entretien des matériels US s’est toujours montré très supérieur à celui des produits locaux . Les élections ne sauraient modifier la donne.

  2. Voila un Homme de Droite qui ferait un bon Ministre de Zemmour Président.
    Français et marié à une Américaine, il ne peut que rapprocher les 2 Pays, comme au temps de J F Kennedy marié à une française…Et afin que l’Etat France puisse conserver quelques Indépendances sur ce qui concerne le Régalien…
    Aux U.S.A. les Etats avec leur Gouverneur ont conservés quelques Pouvoirs au delà du Congrès

  3. Ce que les « mauvais français » doivent bien comprendre c’est que quoiqu’il arrive les USA n’agissent que dans leur intérêt et jamais dans les intérêts de ceux qui croient qu’ils vont être protégés par les dits USA. Ce fut le cas en 14-18, en 39-45, au Vietnam, la guerre pour le canal de Suez, la guerre Iran/Irak, l’Afghanistan.
    Un président américain est un Yankee. Alors croire que l’un est meilleur que l’autre pour nous Français ou Européen ne sert à rien, c’est de la naïveté pure
    Zelensky croit qu’il sera sauvé par les USA. Que nenni ! S’il le faut, il dégagera. Le seul objectif des USA c’est de se rendre maîtres des richesses agricoles de l’Ukraine qui possède les terres les plus riches d’Europe (tchernozium). Mettre la main sur le blé, le maïs, le tournesol ukrainiens vous rend maître du monde tellement de gens en sont dépendants. Désolé d’être rabat-joie. Seule la Russie peut les freiner car elle aussi a un intérêt vital séculaire à défendre : son accès à la Méditerranée. Cela va durer un mois, un an, 10 ans, 50 ans …. ou un siècle

  4. Biden est un vieux qui ferait mieux de terminer sa vie en jouant au golf!
    Plutôt que mettre la planète à feu et à sang .

  5. Aux états unis d’Amérique les responsables sont nommés par le peuple qui met en place un chef d’état c’est dire que çà se passe en petit commité. Le peuple peux élire un sénateur qui votera pour qui lui bon lui semble (c’est un vote). En France c’est le peuple qui élis le chef d’état, c’est pas beaucoup mieux mais au moins nous avons personne en particulier à qui nous en prendre sauf à LFI.

    • ha oui cette extreme gauche qui vote pour le candidat du capital !il n’y a qu’en france que l’on voit ce genre de mascarade !mdr !

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