En mangeant la galette…

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On a tous en mémoire cette image des collines étoilées quand un ange rayonnant apparaît aux bergers et leur annonce « une grande joie pour eux et tout le peuple » : la naissance du Sauveur. Dieu n’a pas trouvé d’autre moyen pour s’approcher de nous que de se faire enfant ! Un chœur de voix célestes chante alors sa « gloire ». Et les bergers de se mettre en route vers Bethléem. Heureux les cœurs purs !

Pendant ce temps, parce qu’ils ont vu se lever une étoile inconnue dans le ciel, arrivent de l’Orient, de Madiane et d’Épha, de Saba, montés sur des chameaux, un autre groupe d’hommes : les mages, chargés de trésors. Eux, ce sont des hommes de science, des savants. Et ce sont des païens. On les connaît bien, Gaspard, Melchior et Balthazar ! Ils ont donc suivi l’étoile qui s’arrête juste au-dessus de l’enfant. « Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie, sa mère et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent. » Divine simplicité ! Les mages sont riches de savoir et de biens, mais ils partagent avec les bergers la pureté du cœur qui leur fait reconnaître immédiatement un roi dans l’enfant. « Avertis en songe », en effet, c’est-à-dire divinement, ne regagneront-ils pas leur pays par un autre chemin ? Ainsi se manifeste la présence de Dieu parmi les hommes, dans un temps et un lieu précis : à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode.

Le mystère de Noël pouvait encore faire peur. Comment avoir peur de Dieu, désormais, avec ces mages chamarrés ? Avec les bergers et les Mages, la crèche s’ouvre au monde entier. Un frisson de lumière, de joie, d’adoration parcourt les textes saints. Le mystère de Noël trouve, en cette fête de l’Épiphanie, son dévoilement — tel est le sens du mot d’origine grecque. Le dessein de Dieu, c’est l’universalité du salut offert à tous les hommes de bonne volonté, aux croyants d’Israël comme aux païens. Prodigieux mystère, comme le dit Paul, lui, le Juif, héritier de droit de la promesse ! L’Épiphanie, ou la « gloire » de Dieu manifestée à tous les hommes (tel est le sens du mot d’origine grecque).

Le récit des mages dit tout de notre condition humaine immergée dans l’Histoire. Le roi Hérode, c’est le potentat cruel, fourbe et menteur. Notre foi, très incarnée, se manifeste à travers des objets et des signes. Ces mages donnent à l’enfant ce qu’il y a de plus riche, comme à un roi : l’or, la myrrhe et l’encens que nous retrouverons dans la vie de Jésus. L’or, c’est la royauté. La myrrhe, c’est l’huile sur la tête de Jésus, avant sa Passion. L’encens, c’est la sainteté que l’encensoir nous rappelle aux messes solennelles.

Et la galette, direz-vous ? On dit que la galette appartenait à une fête romaine païenne. Sans aucun doute ! Mais quand nous mangeons la galette, avec, parfois, le plus petit de nous, sous la table, qui désignera l’heureux détenteur de la fève, pensons toujours aux rois mages de la crèche ! À Paris, la galette est à la frangipane. En Provence, elle est à la fleur d’oranger.

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Marie-Hélène Verdier
Agrégée de Lettres Classiques

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