Emmanuel Macron aux Bernardins : il veut les catholiques, mais surtout pas leurs convictions
Le discours de M. Macron aux Bernardins contenait un appel aux catholiques à s’engager en politique. Bizarre, pour quelqu’un qui a fait partie d’un gouvernement qui a eu à subir une fronde dont les catholiques formaient les gros bataillons. M. Macron ne voit-il donc pas que les catholiques sont déjà entrés en politique, contre la dénaturation de la famille et l’instrumentalisation de la vie humaine, pour la liberté d’instruction et d’éducation ?
N’aurait-il pas mieux fait d’appeler à « rendre à César ce qui appartient à César » et de renvoyer la religion à la « sphère privée » ?
En fait, l’enjeu est de se concilier les catholiques, tout en neutralisant les convictions et les valeurs qui font leur force. Tout comme, de génération en génération, les meneurs des manifestations étudiantes se transforment en députés et sénateurs.
C’est un piège dans lequel le groupe Sens commun est tombé. Car la capacité de digestion du système est énorme, et il n’existe aucun parti politique dont le programme ne contrevienne pas à la foi. Pour survivre, il n’y a que deux solutions : l’apostasie, à la manière de M. Le Maire, ou le rôle de simple caution, à la manière de Mme Boutin.
Le titre du livre de M. de Villiers, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, met en lumière le fait qu’un homme politique ne peut exprimer ses vraies convictions qu’une fois qu’il n’a plus rien à perdre, autrement dit, une fois qu’il a pris sa retraite. M. de Villiers appelle aujourd’hui à la dissidence, et il a raison. Soljenitsyne, du fond de son exil, a été plus utile à sa patrie que s’il avait prétendu « changer les choses de l’intérieur ».
Ce que M. Macron appelle « entrer en politique », c’est, en fait, en sortir.
Une fois embrigadé dans un parti, il faut donner des gages pour survivre, taire ses convictions pour assurer sa réélection. Ainsi, les exigences de l’Évangile se trouvent ravalées au rang d’intimes convictions qui donnent une touche d’humanité et de respectabilité, peut-être, mais qu’il faut avoir le bon goût – et la prudence – de ne point exprimer, sauf en baissant les yeux.
La politique est, dit-on, l’art du possible et du compromis. Mais les chrétiens doivent savoir dire « non possumus ».
Ils ne peuvent pas adhérer sans réserve à un pouvoir qui, substituant la volonté générale au bien commun, s’arroge le droit de définir le bien et le mal, légifère sur la famille et sur le droit même de vivre ; qui a cessé de « rendre à Dieu ce qui est à Dieu », fût-ce au nom de la démocratie ou d’une majorité. Pour ne pas se renier, ils doivent se détourner de la culture du pouvoir pour entrer dans celle du contre-pouvoir.
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