[ÉDITO] Macron s’accroche à l’Élysée : un référendum pour sortir de l’ornière ?

référendum

Le 1er octobre dernier, à l’issue du discours de politique générale de Michel Barnier, nous écrivions : « Ça va pas être simple… » Effectivement, cela a même été compliqué. Nous prédisions au nouveau Premier ministre « un destin, au pire de syndic de faillite, au mieux d'administrateur apostolique ». Force est de constater que son onction tout ecclésiastique n’a pas fait de miracles. Mais, au fond, pouvait-il en être autrement ? Les choses n’étaient-elles pas écrites d’avance ? L’un des reproches, du reste, que l’on pourrait faire à Michel Barnier, au-delà de son manque supposé d’écoute de ses oppositions, c’est de s’être mis en configuration de « faire des choses » durant son mandat à Matignon, alors que son bail était plus que précaire. Mardi soir, la veille de sa montée à l’échafaud, n’évoquait-il pas, devant Gilles Bouleau et Anne-Sophie Lapix, son programme de réformes pour les six prochains mois ? Comment « réformer » (verbe incantatoire que l’on entend depuis quarante ans) quand on n’a pas de majorité stable à l’Assemblée nationale ? On tortillera comme on veut les choses, il faut se mettre cette loi d’airain dans la tête. Au risque, du reste, de faire, non pas du surplace, mais de reculer. La preuve. Gérer les affaires courantes dans cette pétaudière installée par Emmanuel Macron relève déjà de l'exploit.

La puissance des baïonnettes ?

Rien n’avancera dans le pays tant qu’il n’y aura pas une majorité au palais Bourbon. C’est le minimum requis. Minimum nécessaire mais pas suffisant : la preuve par les gilets jaunes alors que Macron disposait d’une majorité écrasante à l’Assemblée. Alors, toutes les hypothèses sont envisagées par les commentateurs politiques - même l'article 16 ! - pour sortir de cette impasse politique et quasi institutionnelle.

La démission de Macron ? On l’a déjà évoquée ici et . « Je serai Président jusqu’à la dernière seconde », qu’il a dit. Jusqu’à la dernière seconde de quoi ? Et quand bien même il démissionnerait, l’Assemblée nationale ne peut pas être dissoute avant le 7 juillet. Certes, des voix, comme celle de Georges Fenech sur le plateau de CNews, livrent une interprétation souple de la Constitution : face à un nouveau Président qui prendrait un décret de dissolution, le Conseil constitutionnel se déclarerait incompétent, comme ce fut le cas en 1962, lorsque le général de Gaulle convoqua le référendum sur l’élection du président de la République au suffrage universel et direct, sur le fondement de l’article 11 de la Constitution. Une « forfaiture », pour Gaston Monnerville, président du Sénat de l’époque… Une « forfaiture » sur laquelle, pourtant, nos institutions reposent depuis plus de soixante ans ! Mettons que ce nouveau Président prenne ce décret de dissolution. Qui dit que des députés ne se barricaderaient pas dans le « temple de notre démocratie », s’insurgeant contre cette décision immédiatement qualifiée de « forfaiture » ? Ceux du « socle commun » (Macronie, LR), dans l’hypothèse d’une élection de Mélenchon ou de Marine Le Pen. Et, inversement, les députés allant de la Mélenchonie aux LR, si c’était Marine Le Pen qui était élue. Le nouveau chef de l’État enverrait la force publique au palais Bourbon ? Vous voyez la scène, du genre « Allez dire à votre maître [ou votre maîtresse] que nous sommes ici par la volonté du peuple et qu'on ne nous en arrachera que par la puissance des baïonnettes... » Comme en Corée du Sud cette semaine ? De bien belles images pour le monde entier…

Un référendum pour desserrer l'étau institutionnel ?

Mais restons sur l’hypothèse d’un Emmanuel Macron qui s’accroche à l’Élysée comme une moule à son rocher. Il est vrai qu’il ne suffit pas d’avoir fait ajouter la croix de Lorraine dans les armes de la République française pour se transformer en général de Gaulle. La priorité d'Emmanuel Macron, donc, « c’est la stabilité », comme il l'a déclaré durant son voyage en Arabie saoudite, à la veille de la censure. Stabilité ne veut pas dire surplace et, si l’on veut « avancer » - ce qui est la moindre des choses pour un marcheur -, il reste une option qui n’a pas encore été évoquée. Que Macron propose une révision constitutionnelle au peuple français pour desserrer l'étau institutionnel. Un référendum, sur le fondement de l’article 89 de la Constitution, qui permettrait au président de la République de procéder à une nouvelle dissolution, non pas dans l’année qui suit les élections législatives après une dissolution, mais dans les six mois, avec application pour la législature actuelle. Il faudrait, néanmoins, que les deux assemblées votent dans les mêmes termes ce projet de loi constitutionnelle avant qu’il ne soit soumis au peuple. Mais si l’on veut que le pays avance, comme ils disent… En lançant ce processus de révision constitutionnelle dès le début de 2025, Macron montrerait sa réelle intention de faire avancer les choses sans, qui plus est, qu'il ne perde (trop) la face, puisqu'il pourrait rester dans son palais « jusqu’à la dernière seconde ». Faut bien qu'on fasse avec.

On pourrait, alors, imaginer une dissolution et une nouvelle Assemblée avant la fin du printemps. En tout cas, avant l’été. Quand on voit comment ils ont précipité les choses pour modifier la Constitution afin d'y intégrer le droit à l'avortement... ou pour dissoudre et provoquer de nouvelles élections législatives, on se dit qu'un tel calendrier n'est pas complètement farfelu. L'objectif serait d'avoir un Parlement et un gouvernement opérationnels avant l'été et, donc, de gagner un semestre afin d'essayer que les choses reprennent normalement leur cours, notamment les travaux préparatoires pour le budget 2026. Bien sûr, il y a quelques « si ». Notamment, in fine, qu’une vraie majorité sorte des urnes. Et ça, c’est une autre histoire que seuls les Français peuvent écrire…

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

78 commentaires

  1. Les débats décrits ce vendredi par les médias laissent augurer plusieurs jours de disputes puériles, inutiles, improductives en tout cas. La presse étrangère ne manque pas d’en rendre compte et de s’en inquiéter. Les députés ne semblent pas conscients de la gravité de la situation, gravité que Philippe de Villiers a mesurée avec sa justesse habituelle sur CNews (« Face à Philippe de Villiers »). Quels politiques reconnus pour leur sérieux et leur expérience parviendront à mettre fin à ces chicaneries et aux promesses de censure de tout gouvernement non conforme aux choix des élus interrogés par les journalistes ? Il est grand temps que les patriotes s’unissent pour bâtir un projet commun qui permettra de sauver notre économie, de reconstruire ce qui a été détruit, de présenter un budget raisonnable, en un mot de redonner au pays la capacité de survivre . Ne rêvons pas et restons modestes et lucides, mais déterminés.

  2. Forfaiture pour forfaiture, « Emmanuel Macron qui s’accroche à l’Élysée comme une moule à son rocher », préfèrera, sans aucun doute, la promulgation de l’article 16.
    Ah, les pleins pouvoirs, ce sera pour lui la jouissance absolue, la reconnaissance de son génie politique.

  3. Lors des dernières élections 34 % des Français ont exprimés leurs vœux pour le devenir de notre Pays . DONC la messe est dite ,! césar d’opérette.
    Point n’est besoin de comédie théâtrale et clownesque façon éna !

    L’heure est venue ,! où les comptes sont à rendre aux FRANCAIS . ceux de la PATRIE (Amour sacré…. )
    Tu n’est QUE locataire et non Monarque de NOTRE FRANCE.

  4. dans sa parlote d’hier il disait que le front anti-républicain avait voté la censure (NFP + RN) et que ne voit-on ce matin les PS convoqués à l’Elysées eux qui sont dans tous les fronts anti-républicains (celui de juillet 2024) courir à l’appel du monarque, ils courent à la soupe, où pour attraper la queue du Mickey c’est comme on veut.

  5. « son bail était plus que précaire. » D’autant plus qu’il était univoque : faire du macron, et rien d’autre.

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