Dans une interview récente concernant la légalisation du cannabis au Canada, un « addictologue » à la manœuvre depuis plus d’une décennie pour obtenir une telle légalisation en France, William Lowenstein, déclarait, d’une façon stupéfiante (à tous les sens du terme), qu’il faudrait plus d’une dizaine d’années pour apprécier les conséquences de cette légalisation. Il anticipait même que, dans un premier temps, cela accroîtrait le nombre des consommateurs ; pour le reste, il faudrait attendre.

Propos pleins d’impéritie d’un apprenti sorcier, prêt à faire prendre de tels risques à notre nation. La France, outre un manque fréquent d’anticipation (alors que gouverner, c’est prévoir), n’a pas la culture de l’expérimentation. Le char de l’État n’ayant pas de marche arrière, il lui est impossible de revenir sur des dispositions ayant, de longue date, démontré leur nocivité : retraite à 60 ans, travail hebdomadaire limité à 35 heures (que le reste du monde a oublié d’imiter), régimes spéciaux de retraite, méthode globale d’apprentissage de la lecture, assistanat ruineux et démobilisateur...

Notre nation, qui consomme à un niveau record différentes drogues, dont le cannabis (il est en ce domaine champion européen) ainsi que divers psychotropes (anxiolytiques, antidépresseurs, hypnotiques, analgésiques…), doit-elle s’ingénier à aggraver sa situation ?

Une étude récente de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) montre que, contrairement à ce que l’on voulait nous faire accroire, l’appétence cannabique de notre jeunesse ne s’efface pas avec l’entrée dans la vie professionnelle. L’adage « Il faut que jeunesse se passe » est faux, en l’occurrence, car la jeunesse s’efface mais la consommation se poursuit. Cette drogue déborde, désormais, dans le monde professionnel.

Aussitôt, certains rebondissent, arguant que c’est pour apaiser "la souffrance au travail". Avec les 35 heures, les RTT, les cinq semaines de congés payés, des protections syndicales et prud'homales à un niveau jusqu’alors méconnu, il est inopportun d’exhumer Zola (mort en 1902). La "souffrance", en l’occurrence, est plutôt l’insuffisance des performances de celui qui a chaussé les semelles de plomb du cannabis ou la conséquence de son effet désinhibiteur qui le fait s’affranchir des règles, l’exposant à l’exclusion. Le cannabis fait stagner dans les bas échelons de la hiérarchie, il transforme en boulets de l’entreprise ou de l’administration les salariés consommateurs.

Ces incorrigibles cannabinophiles, à l’âge de la majorité électorale, pourront peser en faveur de la légalisation de leur drogue, mais aussi de toutes les drogues. On imagine facilement la suite, en faisant référence à la paralysie manifestée par les pouvoirs publics pour agir contre le tabac (avec ses treize millions de fumeurs) et l’alcool (avec ses quatre à cinq millions d’alcoolodépendants).

Considérons, aussi, les effets épigénétiques du cannabis. Les travaux de Yasmin Hurd (États-Unis) indiquent que les personnes en âge de procréer qui exposent les précurseurs de leurs cellules germinales (spermatozoïdes, ovules) au tétrahydrocannabinol (THC) du cannabis transmettent à leur descendance une vive appétence pour les drogues qui s’exprime dès l’adolescence. Ces parents drogués, victimes eux-mêmes de la nocivité du cannabis, deviendront ainsi parents de drogués. Non contents d’avoir infligé à la société leur médiocrité (voire pire encore), ils lui offriront des descendants plombés dès le départ.

Une nation doit tout faire pour empêcher cela et en aucune façon faciliter, et moins encore autoriser, cette modalité d’annihilation. Le législateur ne peut plus faire semblant d’ignorer ces données, elles s’imposent à ses décisions, elles le responsabilisent pleinement, devant la nation et devant l’Histoire.

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05 décembre 2018 à 16:37

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