Centrafrique : bientôt une base russe… sur le même sol que les Américains ?

bangui

Tandis que la récente élection du président sénégalais risque, une nouvelle fois, de voir les troupes françaises forcées de quitter un nouveau pays d’Afrique, la première base russe pourrait surgir sur le continent africain. C’est en République centrafricaine (RCA) que cet événement d’un genre nouveau pourrait avoir lieu, ainsi que l’indique l’ambassadeur russe à Bangui, Aleksandr Bikantov, dans une interview, accordée à l’agence russe Tass et datée du 26 mars : « Les ministères de la Défense des deux pays poursuivent les négociations [et] des efforts sont en cours pour choisir un emplacement pour la base », a-t-il annoncé.

Le pouvoir centraficain enthousiaste

Si l’emplacement et les modalités précises de l’implantation de cette emprise sont encore à définir, le monde politique centrafricain se montre enthousiaste. Le 16 janvier, le conseiller de la présidence Fidel Ngouandkika déclarait déjà, comme le rapporte Le Figaro : « Nous sommes engagés à 1.000 % envers la Russie et nous pensons que la Russie doit rester avec nous. » Il indiquait également que les anciennes infrastructures de Berengo, datant du régime de Bokassa, seraient idéales pour accueillir un tel projet et qu’elles seraient en mesure d’héberger jusqu’à 10.000 militaires russes.

Russes et Américains implantés dans le même pays

Depuis la fin de l’opération française Sangaris en 2016, la RCA aux abois, en proie à une violente guerre civile que la présence française n’avait que provisoirement apaisée, s’était tournée vers les Russes, et plus particulièrement vers la milice Wagner. Depuis 2018, Wagner avait étendu son emprise sur le pays. Malgré de cruelles exactions, que certains groupes armés centrafricains essaient de combattre, Wagner, au nom de la Russie, a acquis une importance considérable en RCA. En parallèle, la mort du leader historique de cette milice, Evgueni Prigojine, a incité les Centrafricains à passer un accord de coopération avec les États-Unis, le 24 décembre dernier. Les troupes russes et américaines vont ainsi, pour la première fois, opérer sur le même sol. « Du jamais-vu depuis la guerre froide », commente Thierry Vircoulon, chercheur à l’IFRI, dans une interview accordée au Figaro. Il ajoute, avec un tragique pragmatisme, que les Français ne sont « plus que spectateurs ».

Et la France ?

Au fond, vu du côté français - qui doit, n’en déplaise aux pro-Russes fanatiques comme aux pro-UE aveugles, demeurer le nôtre -, c’est bien de cette perte d’influence qu’il s’agit, et de ses implications concrètes sur notre déclassement. La gestion des relations franco-africaines par la France, faite au petit bonheur par des « petits mecs », comme le dit l'africaniste Bernard Lugan, a sonné le glas de cinq décennies de politique paternaliste à la Jacques Foccart. Est-ce à dire que c’était mieux avant ? Peut-être pas. Est-ce pour autant mieux maintenant ? Il est certain que non. Il n’y a qu’à regarder…

La France essaie, comme elle le peut, de colmater les mensonges de la Russie, de les « débunker », comme on dit de nos jours. Autant vider la mer avec une fourchette. Dans l’épaisse forêt des discours contradictoires, c’est le compétiteur le plus agressif qui gagne. La Russie l’a bien compris, puisqu’elle se prépare à installer une base militaire dans un pays au sein duquel la France, jadis, installa un empereur fantoche dont elle finança le couronnement. Il est peut-être temps d’oublier notre vieux complexe colonial et de nous demander, en toute franchise, ce que nous avons raté et dans quelle mesure nous avons fabriqué, avec notre décadence, notre propre déchéance.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

35 commentaires

  1. Je ne comprends pas la dernière phrase. Florac écrit : »…et de nous demander, en toute franchise, ce que nous avons raté ». Celà fait plus de 10 fois que j’explique (quand je ne suis pas censuré !) que les africains admirent les CHEFS énergiques et virils (tels Poutine, Xi ou Erdogan) et détestent les homosexuels (tels Macron et Séjourné). Il n’y a donc pas à « se demander » ! Les réponses sont évidentes à 100%.

  2. Quant on parle de la Russie à certains africains chez eux on ne peut éviter des regards s’illuminer pourtant dans certains pays ou la France était très présente, voir même dans un pays qu’il fut un temps voulait ne pas nous quitter voir même accroitre notre présence nous les avons littéralement lâchés alors amusant de voir toutes nos menaces contre la Russie Poutine doit avoir très peur de nous, mais en privé sans doute.

  3. Le déclin évident de la France tant de l’intérieur bien remarqué par l’importance de certaines cultures étrangères qui prennent la place de l’ancienne Française qui permettait le rayonnement à l’internationale, à présent inutile de nous parler des fake-news Russes. Dans mainte pays d’Afrique les Russes prennent des contrats intéressant voir même en lieux et places des Français qui se font éliminer sans merci. Merci encore Monsieur Macron c’est pas avec de beaux discours particulièrement creux que la situation catastrophique s’inversera.

  4. Il faut savoir que les élites centrafricaines pillent les ressources du pays, y compris celles de la mission de l’ONU, pour les investir en France. Car elles ont bien souvent le double nationalité. Il faudrait commencer par bloquer les transferts de fond. Puis arrêter les aides. Y compris celles passant par la MINUSCA et l’union Européenne. Et enfin arrêter de donner des passeports français à ces gens qui nous méprisent. Et n’aiment plus la France.

  5. …abaissent la France pour la ramener au rang d’une simple région européenne. L’un n’est qu’un pauvre petit mec arrogant, dédaigneux et impoli qui n’est chef d’Etat que de nom, les autres ne sont que des ignorants mal éduqués ne connaissant de l’Afrique que des images d’Épinal mal rafraichies et qui malheureusement ont rang d’apprentis ministres des AE.

  6. Qu’on arrête de critiquer la Russie à tout bout de champ ! Après tout, elle ne fait que reprendre l’espace libre laissé par la France qui a été incapable de mener une politique sérieuse en Afrique ! Et les US ne sont pas des anges ! Si la Russie est intervenue en Ukraine pour des raisons qui peuvent se justifier, partout où les Américains passent, c’est la déstabilisation ! Ces « grandes oreilles » sont plus dangereuses que celles de la Russie !

  7. Notre soit-disant « complexe colonial » n’a rien à voir dans cette defrancisation de l’Afrique. Les seuls et uniques responsables sont ceux qui volontairement et opiniatrement depuis 7 ans abaisser la France

  8. Nous avons raté à peu près tout, en Afrique comme chez nous « en même temps ». Hélas!

  9. Malgré d’indéniables qualités journalistiques, la russophobie de Monsieur Florac m’interroge. Les messages des américains, des anglais des chinois et malheureusement des français en Afrique sont encore plus énormes.

  10. Disons que depuis pas mal de temps, la France est représentée par des techno qui ne connaissent rien à l’Afrique et aux africains, alors logiquement peu à peu on dégage, remplacés par les Russes , facile pour eux qui « parlent couremment l’Africain ».

  11. Nous ne voulions plus de Françafrique, nous avons des principes, pas de pots de vin, nous repartons avec nos principes contents sans doute qu’il n’y ait plus de Françafrique, il faut savoir ce que nous voulons. Les français c’est l’état de droit et les principes après les résultats c’est accessoire

  12. La France accueille les migrants africains , la France a donné des milliards à ce pays et la France se fait gentiment virer de ce pays au profit de la Russie , si ça ce n’est pas une belle claque pour Macron alors je n’y comprends plus rien .

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