Monsieur Castaner, porte-parole du gouvernement Macron et secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement, était lundi l’invité de BFM TV. Interrogé sur le projet de verser des allocations chômage aux démissionnaires – un coût estimé, à la louche, autour de quatorze milliards d’euros la première année, plus trois milliards les suivantes ! –, il a, par sa réponse, déclenché cris d’orfraie et piaillements indignés sur les réseaux sociaux. Et là, une fois de plus, on se dit qu’on vit vraiment au pays des Tartuffe.

Dans les "hypothétiques promesses" de campagne du candidat Macron figurait la possibilité d’offrir, tous les cinq ans, aux salariés démissionnaires, la possibilité de toucher des indemnités de chômage. Une mesure qui compléterait l’existant, à savoir la rupture conventionnelle avec l’employeur.

Lors de son entretien sur TF1, dimanche soir dernier, Emmanuel Macron a affiné sa proposition. Craignant "un effet d’aubaine", le ministre Muriel Pénicaud et, avant elle, les syndicats qui gèrent l’assurance chômage ont dénoncé par avance un coût exorbitant, lequel serait de toute façon insupportable pour l’UNEDIC, qui se traîne déjà une dette cumulée de trente milliards d’euros !

Donc, rétropédalage du Président sur ses projets mirifiques : la possibilité ne serait plus offerte que tous les cinq, six ou sept ans, et sous réserve que le démissionnaire soit "porteur d’un projet". "Celui qui en a assez [de son emploi, NDLR], on ne va pas lui donner l'accès au chômage. Mais celui qui au bout de cinq ans, six ans, sept ans, a un autre projet, qu’on lui donne la possibilité de toucher le chômage pour mener cet autre projet,, a dit Emmanuel Macron.

Belle idée dont on ne voit guère, au passage, la faisabilité, mais idée généreuse néanmoins. C’est donc ce qu’a voulu développer le porte-parole Castaner, expliquant sur BFM TV : "L'universalité de l'allocation chômage, qui doit profiter à celles et ceux qui n'y ont pas droit […], implique aussi des droits et des devoirs." Jusque-là, on ne voit pas qui pourrait être contre. C’est après, que ça se corse, lorsque Castaner précise :

C'est une forme de liberté, mais la liberté, c'est pour aller vers quelque chose ; la liberté, ce n'est pas de bénéficier des allocations chômage pour partir deux ans en vacances.

 

Hououoou, l’affreux ! Houououou, le pas beau ! Comment ose-t-il ?

Sitôt dit, sitôt dénoncé. Par les Insoumis, pour commencer. Raquel Garrido, « l’avocate pauvre » de Mélenchon, et son époux Alexis Corbières devaient être occupés à passer le balai dans leur HLM, alors c’est Sophia Chikirou qui s’y est collée : "RT si toi aussi tu as touché le chômage, galèrer (sic) pdt des mois à envoyer des CV, déprimer… (sic) Soyons fiers de nous. Ce mec est un salaud." Suivie de David Assouline, sénateur PS de Paris : "Là, il dépasse Wauquiez et le cancer de l'assistanat. Quel naufrage !" Puis du député FN Gilbert Collard : "Après les fainéants, les vacanciers !"

C’est de bonne guerre, après tout, me direz-vous, ce n’est que le jeu politique.

Mais un jeu de dupes, une tartufferie de plus. Car c’est vrai, il y a majoritairement des chômeurs qui ne parviennent pas à s’en sortir, parce qu’ils ne sont plus sur les bons rails, pas formés, largués dans des contrées d’où tout emploi a disparu. Mais il y a aussi quantité de gens qui profitent du système. Nous en connaissons tous. Souvent plutôt bien formé, ceux-là, mais cossards. Qui vivent sur le dos de la communauté avec l’alibi, souvent là encore, de lutter contre l’exploitation du grand capital… Des gens qui font plus ou moins le choix de la marginalité et qui calculent au mieux : travaillent juste assez pour récupérer des droits au chômage et retournent se mettre au vert. Des gens qui, lorsqu’ils bossent, vous disent froidement : "Tu te rends compte, cette année, je n’ai même pas pris tous les congés maladie auxquels j’ai droit !»

Alors, qu’est-ce qui choque : la réalité ou les mots pour la dire ?

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 20/10/2017 à 11:58.

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18 octobre 2017 à 20:16

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