Au pays du Soleil levant, un autre modèle de société, preuve que l’alternative est possible
Parler de l’Hexagone quand on évoque la France relève d’une géométrie cartésienne. Les métaphores asiatiques sont bien plus poétiques : l’empire du Milieu, le pays du Matin calme ou celui du Soleil levant… promesses de découvertes. Rendons-nous chez ce dernier, le Japon. Pour nous, Européens, le plus exotique des pays civilisés ou le plus civilisé des pays exotiques.
Passons rapidement sur ce cliché qu’est l’improbable - et pourtant bien réelle - alliance entre tradition et modernité ; c’est ce que l’on peut lire dans tous les guides de voyages. En revanche, ce qui n’est pas explicité dans Le Guide du routard, dont les lecteurs sont les anciens babas cool devenus bourgeois-bohème, est pourtant ce qui frappe l’esprit d’un voyageur osant regarder au-delà de ses œillères qu’on lui a collées dans la cervelle comme un garde-fou pour ses pensées potentiellement déviantes.
Quand, subjugués, on déambule sur les avenues immenses des non moins immenses mégapoles japonaises, on ne peut qu’être ébranlés par des sentiments difficilement identifiables au premier abord. Outre l’évidente civilité, il y règne une impression de sérénité ainsi que d’absolue sécurité. Peu de coups de klaxon, pas de crissements de pneu, pas d’invectives ou de regards noirs en menaces de coups de katanas… Étonnés, on peut voir des enfants, seuls ou en cohortes, trottiner en uniformes pour se rendre à l’école et traverser sans aucune appréhension des passages piétons d’une longueur stupéfiante. Qui oserait, dans nos villes ensauvagées de rodéos, confier sa progéniture au bon vouloir du respect des lois par certains de nos « cons-citoyens » ?
Ce grand peuple issu d’une grande civilisation a, en tant que pilier porteur, le sens de l’intérêt collectif dans la recherche permanente de la perfection dans l’harmonie. Leur sens de la discipline en découle. À ce titre et pour y maintenir l’équilibre, la moindre transgression sera châtiée avec la plus grande intransigeance .:
Mais autre chose nous interpelle, difficile à cerner pour nos esprits formatés… et soudain, cela nous saute aux yeux pour peu que l’on veuille voir : leur remarquable homogénéité ethnique. Moins de deux millions d’immigrés, provenant pour l’essentiel du continent asiatique, pour 127 millions de Japonais de souche ! Les seuls voiles que l’on peut remarquer sont ceux des rares touristes indonésiennes ou malaisiennes. Que celui qui désire devenir Japonais renonce à tout espoir. Bon an mal an, une dizaine de naturalisations ! Un pays autant refermé sur lui-même et faisant aussi peu d’enfants doit être voué à très court terme à un déclassement certain. Seule l’immigration massive pourra le sauver ; pourraient nous chanter les démographes idéologues à l’instar d’Hervé le Bras.
Pourtant, quel est le classement du Japon ? Troisième économie mondiale, un chômage minuscule, un très haut niveau d’éducation, une délinquance pratiquement inexistante… Une dette abyssale mais détenue par eux-mêmes. C’est le choix collectif de cette nation souveraine : rester ce qu’elle est en préservant à tout prix sa culture et son identité et, pour cela, ne jamais déléguer à des peuples étrangers le soin de faire leurs enfants pour abonder leurs caisses de retraite et travailler en usine. Pour pallier cette carence, ils font tout simplement… des robots !
Il est vrai que vivre sur un archipel entre mer de Chine et océan Pacifique facilite l’inviolabilité des frontières. Et quand des envahisseurs osaient menacer leurs horizons sacrés, le kamikaze (étymologiquement « vent divin shintoïste ») s’est toujours chargé d’anéantir les invasions mongoles par l’apparition magique de typhons salvateurs. Le crépuscule des dieux n’est pas près de s’abattre sur le pays du Soleil levant.
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