Scandale de l’été : en 2016, Airbnb n’a payé en France que 92.000 euros au titre de l’impôt sur les sociétés, déclenchant une salve de critiques. La réalité est plus nuancée. Certes, ce montant ridicule est la conséquence d’un montage légal, mais moralement discutable : le bénéfice de la filiale française est « pompé » par une entreprise irlandaise, pays où le taux de l’impôt sur les sociétés n’est que 12,5 % au lieu de 30 % chez nous. Cette méthode est commune à tous les « prédateurs » fiscaux : Google, Amazon...

D’abord, ces 92.000 € ne sont perçus que sur la commission de 3 % prélevée par l’entreprise californienne. 97 % du chiffre d’affaires (considérable mais secret) d’Airbnb serait, paraît-il, reversé aux propriétaires. Cette manne est, depuis un an, déclarée systématiquement au fisc et génère des rentrées importantes grâce à l’impôt sur le revenu. En outre, quelques municipalités récupèrent désormais la taxe de séjour (7,6 millions en 2016, dont 5,5 pour la seule ville de Paris, le système n’étant pas encore étendu à toute la France). Airbnb s’acquitte également de la TVA sur la réservation uniquement (donc les 3 % du prix de commission) dont le montant total dépasse (et de loin) les malheureux 92.000 euros.

On reproche à Airbnb une concurrence déloyale envers les hôteliers accablés de charges. En outre, elle « stérilise » des appartements dans des villes touristiques alors qu’il est si difficile de s’y loger. Ces critiques sont en partie fondées. Dans certains quartiers parisiens, louer neuf jours par mois rapporte autant qu’une location à l’année. On fantasme beaucoup sur « d’affreux » multipropriétaires possesseurs de logements proposés sur Airbnb qui feraient ainsi des investissement en or, mais rien ne prouve qu’ils soient nombreux, ni même qu’ils existent. Sur les 60.000 appartements parisiens disponibles sur la plate-forme californienne, 22.000 le seraient à l’année, ce qui représente une goutte d’eau par rapport au problème du logement à Paris.

En outre, le taux de remplissage des hôtels (55 %) reste correct, même si les hôteliers sont en droit d’espérer mieux. L’État a déjà pris des mesures : il a interdit de louer plus de 120 jours par an (ce qui reste considérable !) son logement principal et a obligé Airbnb à déclarer tous les revenus au fisc, ce qui permet de les taxer. On peut limiter encore le nombre de jours autorisés, revoir la fiscalité trop favorable sur les meublés, mais aller plus loin et inventer de nouveaux prélèvements risque de pousser les propriétaires à utiliser des plates-formes plus petites et donc moins contrôlées.

Alors, pour contrer la délocalisation des profits des multinationales, pourquoi ne pas abaisser à 15 % le taux de l’impôt sur les sociétés. Le coût de départ - 19 milliards - serait amorti en partie par l’augmentation des bénéfices déclarés et par une nouvelle taxe basée sur le volume du trafic Internet. Ni Google ni Amazon ni Airbnb ne pourraient échapper à cette dernière, quelles que soient les astuces déployées.

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13 août 2017 à 12:35

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