Lundi matin, l’audition de Gérard Collomb, le Gégé les mains propres ou Gégé les oreilles sales de la République en marche, n’a été, au mieux, qu’un amuse-gueule, ou plutôt un foutage de gueule. Au pire, une farce. Une triste farce. Avec l’audition du préfet de police, l’après-midi, commençaient les choses sérieuses. "Copinages malsains", a lancé Michel Delpuech. Mais nous sommes restés un peu sur notre faim.

Et puis, lundi soir, nous sommes entrés dans le cœur du drame avec l’audition d’Alain Gibelin, directeur de l’ordre public à la préfecture de police de Paris. Des réponses qu’il a faites aux questions posées par Marine Le Pen, tout le monde a compris que Benalla avait participé à des réunions à la préfecture de police de Paris entre le 2 et le 18 mai, alors même qu’il avait été suspendu de ses fonctions, comme l’a affirmé solennellement Bruno Roger-Petit, porte-parole de l’Élysée, vendredi dernier. Gibelin, du reste, ignorait cette sanction, ce qui est fort vraisemblable. Mais mardi matin, l’Élysée dément auprès de France Info que Benalla ait participé à des réunions à la préfecture de police durant sa mise à pied. À ce moment-là, la situation est donc la suivante : logiquement, l’un des deux protagonistes - l'Élysée ou M. Gibelin - ment ou se trompe.

Nouveau coup de théâtre, mardi, en fin de matinée : Alain Gibelin est revenu sur ses propos à travers une lettre adressée à la présidente de la commission, la députée LREM Yaël Braun-Pivet. Il aurait mal compris la question ! Là, on est pris d’un doute : un haut fonctionnaire, policier, contrôleur général de la police nationale, arborant quatre étoiles et les ordres nationaux, bref, pas n’importe quel clampin, aurait mal compris une question relative à un dossier d’une telle gravité ! À se demander si l’on est à l’oral du brevet des collèges ou au petit matin blême d’une fin de garde à vue musclée. Et la députée Yaël Braun-Pivet de déclarer, très sérieusement (j’allais dire benoîtement), devant les caméras, que M. Gibelin était visiblement fatigué, lundi soir, et qu’elle réfléchissait à l’éventualité de convoquer une seconde fois le haut fonctionnaire. Il faut reconnaître que le coup de la fatigue, on ne nous l’avait pas encore fait. Trop de pression, peut-être ? À l'évidence, un certificat du médecin du travail s'impose !

Mardi après-midi, quatrième acte à l’Assemblée : le plat de résistance avec l’audition du préfet Patrick Strzoda, directeur de cabinet du président de la République et chef immédiat de Benalla. Plat de résistance, en effet, car, il faut bien le reconnaître, ce grand serviteur de l'État a bien résisté : le saint des saints est resté inviolé. Le fusible a bien fonctionné. "J’assume ma décision", a-t-il déclaré : une mise à pied de deux semaines, et celle de ne pas saisir l’autorité judiciaire. Une décision qu’il a portée à la connaissance du secrétaire général de l'Élysée qui, lui-même, a rendu compte au Président. On comprend donc qu’Emmanuel Macron s’est satisfait de cette sanction pour un comportement qui, depuis dimanche soir, est pourtant devenu "inacceptable"

Face aux questions embarrassantes des députés, M. Strozda s’est réfugié derrière la séparation des pouvoirs, rappelant que s’il était présent devant la commission, c’était parce que le Président l'avait bien voulu. Souhaitant revenir sur les rumeurs concernant le salaire de Benalla, il a cependant refusé de dire quel était le traitement du chargé de mission. Enfin, à la question centrale de l’ancienne magistrate Laurence Vichnievsky, députée MoDem des Bouches-du-Rhône – Alexandre Benalla avait-il encore sa place dans le cabinet de la présidence de la République après le 1er mai ? -, le directeur de cabinet est resté très évasif.

Les fusibles fonctionnent impec ! Et tout cela sous les caméras et, accessoirement, sous serment…

14728 vues

24 juillet 2018 à 20:06

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.