« 20 % des Français ne mangent pas à leur faim » : risque de famine ou overdose de malbouffe ?

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Les Français sont devenus pauvres et ne mangent pas à leur faim. Voilà l’information qu’on nous balance à l’heure du café, histoire de nous faire régurgiter de honte notre petit déjeuner. Parce que nous, au moins, on a les moyens d’en avaler un !

Nouvelle du jour, donc, selon les résultats du douzième baromètre Ipsos-Secours populaire publié ce mardi : « 20 % des Français ne mangent pas à leur faim », clament les médias en chœur. Un petit coup d’œil aux résultats montre que la chose est à nuancer : c’est, en fait, « un sondé sur cinq [qui] admet avoir du mal à se procurer une alimentation saine lui permettant de faire trois repas par jour ». On verra plus loin que l’adjectif "saine" a, ici, une grande importance…

Le Figaro.fr interroge Richard Beninger, secrétaire national du Secours populaire. À peine alarmistes, les questions : « La précarité alimentaire est un problème assez méconnu en France. Sans parler de famine (sic), on peut se retrouver dans cette situation sans trop s'en rendre compte... » Il est vrai, comme le dit M. Beninger, que « dans les grandes villes notamment, les dépenses sont très contraintes. Il y a la question du logement, du transport, de l'énergie. » Aussi, dit-il, « chez les familles les plus modestes, on s'aperçoit que la question de l'alimentaire devient une variable d'ajustement ».

On est, en revanche, surpris quand ce monsieur explique, d’une part, qu'« un Français sur cinq avoue avoir des difficultés pour payer la cantine scolaire » et que, à en croire les bénévoles ou les personnels de l'Éducation nationale, « le repas du midi à la cantine est bien souvent le principal repas de la journée chez les enfants issus de familles en situation de pauvreté ».

Je dis surpris car soit les enfants mangent à la cantine, soit ils n’y mangent pas. Et s’ils sont vraiment en "situation de pauvreté", selon la formule désormais consacrée, eh bien, soit ils ne paient pas la cantine, soit on leur demande une somme extrêmement modique.

Il serait, ensuite, bien intéressant de savoir de qui l’on parle, de quoi, et dans quelle mesure. M. Beninger dit que les classes moyennes sont également impactées, de même que les étudiants. Est-ce nouveau ?

Pas pour ces derniers. Dans mon lointain passé d’étudiante boursière, on ne roulait pas sur l’or. On allait au restaurant universitaire, on en rapportait du pain pour boucher les creux à l’estomac. Arrivée à Paris, je faisais quelques heures de baby-sitting au Pont-Neuf, ce qui me payait un café et un cornet de frites à midi… Après, on enchaînait aussi les petits boulots. Avec fierté, c’est peut-être ce qui fait la différence…

À une nourriture insuffisante, dit M. Beninger, s’ajoute le fait qu'« on ne se nourrit pas correctement, avec des aliments peu chers ». « Les familles rencontrent des difficultés à se procurer des produits pourtant essentiels comme les fruits et légumes, la viande ou le poisson », dit-il, et « font aussi de mauvais choix ». Et de mauvais choix qui ne sont pas les moins chers ! En effet, il n’y a qu’à regarder les chariots de supermarché pour voir ce qu’on y entasse en priorité : glaces, chips, sodas hyper sucrés, nuggets de poulet frelaté, plats tout préparés, etc. C’est la raison de l’obésité galopante chez tous ces pauvres gosses dont on nous dit qu’ils flirtent avec la famine. Certes, la famine donne un gros ventre, mais c’est tout ce qu’il y a de gros chez les enfants du Sahel !

N’osant pas dire que la malbouffe tue ces gamins plus sûrement que la faim, Le Figaro demande : « Comment les incitez-vous [les familles] à manger mieux, sans exploser leur budget souvent restreint ? » Réponse pudique du monsieur : « Nous veillons, avec les producteurs ou les grandes surfaces, à proposer des produits variés. Néanmoins, nous sommes souvent confrontés à des situations difficiles, avec des personnes dont les habitudes alimentaires sont difficiles à changer. »

Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites…

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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