La vie politique française, parfois tourmentée, surtout en les temps qui nous occupent, offre parfois de délicieux moments de grâce. D’où la sortie, ce vendredi matin, de Marie-France Garaud dans Le Figaro, et non point de Marie-France Garo dans Le Figaraud, qui appelle à voter pour… Marine Le Pen.

À quatre-vingt printemps largement sonnés, le loup-garaud a donc les crocs toujours bien aiguisés, et pas seulement les nuits de pleine lune. Il y a quelques années, dans l’émission "Ce soir (ou jamais !)", jadis animée par Frédéric Taddeï, elle n’hésitait pas à rappeler que Jean Monnet, père de l’Europe, n’était autre "qu’un agent américain payé par la CIA". Grand moment de fraîcheur cathodique et de jouissance télévisuelle…

Gaulliste revendiquée et figure historique du souverainisme, elle ne se contente plus aujourd’hui de renverser la table, mais de dynamiter le salon tout entier : "J’ai le sentiment que monsieur Emmanuel Macron n’a ni amour propre, ni lucidité. Il étale ses faiblesses avec un extraordinaire masochisme. Il a un petit côté chien battu. Il ne respecte pas la France et il est même en train de détruire le support de son existence politique." Première salve d’avertissement…

Car ce n’est qu’un début, le meilleur étant à venir : "Macron n’a pas de programme économique. Il ne peut pas en avoir parce que nous ne sommes plus qu’un territoire de l’intérieur de l’Union européenne. Il faut sortir de là le plus rapidement possible, quel qu’en soit le coût, car mieux vaut la liberté que l’esclavage." Là, on passe du tir de mortier à celui de barrage, juste histoire de préparer la bataille à suivre…

Réduction ad hitlerum prise à l’envers oblige, voilà maintenant que cette indécrottable chipie retourne à son profit les heures les plus pénibles de notre histoire, telle une chaussette ou une bande molletière, assurant, à propos de la sortie de l’Union européenne : "Il suffit de décider ce que nous voulons. À la fin de la guerre, deux hommes avaient compris cela, de Gaulle et Churchill, qui n’a jamais aliéné les pouvoirs de son pays. Nous assistons à une tentative de domestication des pays européens, nous sommes placés devant l’éventualité d’un IVe Reich." Bombardements massifs avant offensive terrestre…

À propos de l’Allemagne, donc : "La France n’a rien à lui dire. Elle doit sortir de l’Union européenne et ensuite, elle pourra échanger d’égal à égal. […] Nous n’avons plus d’État. Le quinquennat qui s’achève aura été inexistant et je note une carence historique extraordinaire chez nos dirigeants. Aujourd’hui, l’économie et la finance veulent remplacer la souveraineté." Manu, si tu nous entends, sous ce tapis de bombes à phosphore et à fragmentation…

D’ailleurs, ce pauvre Petit Chose, qu’en pense-t-elle ? La réponse coule de source : "Mais qui est Emmanuel Macron ?" Apocalypse Now et douce odeur de ce napalm largué au petit matin, ratiboisant tout sur son passage, hormis les quelques chrysanthèmes destinés à fleurir la tombe du sex-toy à la mère Trogneux…

Marie-France Garaud, jadis vigie pompidolienne et pygmalion de Chirac, parle peu, mais toujours d’or. Il y a, chez cette vieille dame indigne, un je-ne-sais-quoi de réjouissant, quelque part entre la Ma Dalton de Morris et Goscinny et la Bette Davis du All About Eve de Joseph Mankiewicz. Mauvaise comme la gale et teigneuse comme pas deux. À chaque instant prête à sortir la pétoire de son sac Lancel et à tirer dans le tas tout en visant juste. Ainsi, à propos de Marine Le Pen : "Aujourd’hui, elle est la seule candidate qui n’est pas pieds et poings liés devant les Allemands. Manifestement, elle est la seule à avoir le tempérament pour rétablir la souveraineté de la France."

D’autres questions ? Non. Évitons, d’ailleurs. Des fois qu’une balle perdue…

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29 avril 2017 à 0:16

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