[Une prof en France] L’école, sauveur de la République ?

jules ferry

Tout le monde s'accorde à constater la faillite de l'école. Et dans le même temps, tout le monde semble lui demander toujours plus et placer en elle de grandes espérances. Sur tous les plateaux de télévision et derrière tous les micros de radio défilent des hommes politiques et des commentateurs qui nous disent que l'école sera la solution pour endiguer « l'ensauvagement » des jeunes. Cette contradiction laisse pantois. Dissonance cognitive ? Problème de mémoire à court terme ou de corrélation ?

Et si l'école n'était pas la solution aux problèmes sociétaux mais une de leurs causes ? Si tu sais que ton médecin est un charlatan dangereux, vas-tu lui adresser tous les malades que tu rencontres ? Ce serait absurde. Alors, pourquoi fait-on la même chose avec l'école ?

On sait que depuis plus de 60 ans, l'école dysfonctionne et que sa faillite s'accélère, par un effet d'inertie naturel qui augmente la vitesse d'un corps au fur et à mesure de sa chute sur une pente continue. Alors, pourquoi continuer à s'illusionner et à faire semblant de croire que l'école pourrait résoudre quelque problème que ce soit alors qu'elle-même est l'un des problèmes majeurs de notre société ? Laxisme, baisse des exigences, contradictions permanentes, mixité délétère, rackett, violence, harcèlement, indiscipline, gaspillage, méthodes inefficaces voire contre-productives, mensonges permanents, travestissement de la vérité historique et scientifique, idéologie gauchisto-mondialisto-woke… elle cumule tant de tares qu'on se demande par quel miracle elle pourrait distiller l'amour de l'ordre, du vrai et de la patrie aux jeunes qui lui sont confiés. Attendre de l'école qu'elle fasse aimer la France aux centaines de milliers de « Kevin et Matteo » qui peuplent ses cours, c'est comme attendre d'un taliban qu'il vous serve un mojito en dansant sur du Angèle remixé par Bob Sinclar : ce n'est pas exactement son projet, et c'est d'un optimisme déconcertant…

Quand la structure d'une maison est pourrie et la charpente vermoulue, rien ne sert de rafistoler l'ensemble, il faut raser et reconstruire. C'était, en partie, l'objet de ma dernière chronique, qui n'était pas un éloge du pédagogisme ni une défense de l'élève roi mais un appel à une prise de conscience radicale. On ne peut pas « revenir » à l'école de la IIIe République, surtout pas dans sa version fantasmatique idéalisée qui nourrit l'imaginaire de nombreux Français. Les changements sociétaux indéniables, et pour certains irréversibles, qu'a subis la France appellent à une refonte totale du modèle, du système dans son ensemble, car il a atteint ses limites. C'était le sens de la référence à Ivan Illich. Notre institution scolaire est une création récente, contextualisée, qui était adaptée à un certain modèle de société. Elle n'est pas l'horizon indépassable de l'instruction, qui existait avant elle, et perdurera après son effondrement, quand on aura cessé de placer des rustines et des cautères sur cette jambe de bois. Le dynamisme et les réussites incontestables de nombreuses écoles hors contrat le prouvent.

Les modèles adoptés y sont divers, variés, parfois inconciliables tant ils sont différents dans leurs options pédagogiques et leurs prérequis philosophiques, mais ils fonctionnent parce que les adultes y jouissent d'une liberté qui redonne du sens à la transmission et y rend les enfants sensibles. Malheureusement, les temps ne semblent pas encore venus d'une levée de la mainmise de l'État sur l'école. Et comme l'État n'est pas vertueux, les structures sur lesquelles s'impose sa domination absolue ne peuvent pas être vertueuses.

Virginie Fontcalel
Virginie Fontcalel
Professeur de Lettres

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Que penser des écoles hors contrat basées sur le système SUDBURY. Pas de classes, pas de programmes, pas de professeurs. Les enfants font ce qu’ils veulent de leurs journées. S’is ont envie de faire de la balançoire, qu’à cela ne tienne. ces petits chérubins qui y sont accuellis ont entre 3 et 18 ans. Vive les sous hommes de demain. on assiste à la dégrigolade de la scolarité, en admettant que l’on puisse parler de scolarité telle que prévue par la loi de la République Française. Affligean!
    Victorine31

  2. Victor Hugo : ouvrir une école, c’est fermer une prison.
    On a ouvert plein d’écoles, mais il manque cruellement de prisons!

    • Ce n’est pas une vraie citation de Victor Hugo mais un résumé de sa pensée. Pensée progressiste à laquelle le XXe siècle n’a pas donné raison.

  3. L’école instaurée par les radicaux bourgeois de la III° république n’a été créée que pour déchristianiser la France ,et créer de bons petits républicains militarisés qui servirent de chair à canon dès l’âge adulte .
    Rien n’a changé, les petits français apprennent dès l’école à se soumettre à l’islamisme !

  4. L’école dysfonctionne depuis que le redoublement a été proscrit et que les cancres passent automatiquement dans la classe normale classique supérieure pour cause d’égalitarisme et de « pas de vagues.; et depuis que l’Etat s’est obligé à faire la nounou jusqu’aux 18 ans d’un « jeune » qui n’a aucune idée de ce que travailler veut dire.

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