Trump et Macron devant Notre-Dame : la politique de la main serrée

Emmanuel Macron attendait l’inauguration de Notre-Dame depuis cinq ans. C’était son moment. Il avait tout prévu. Spectacle grandiose, mise en scène au cordeau, les évêques déguisés par Jean-Charles de Castelbajac en page d’accueil Google (ou en joker de Uno) et puis tout un parterre de célébrités du monde entier, politiques et milliardaires. On a notamment vu tout un banc de ministres à moitié ratés, complètement démissionnaires, regarder un impassible Donald Trump avec des yeux de merlan frit. On a vu le premier rang de la cathédrale (Sarkozy, Hollande, Barnier) poser un regard à la fois vide et enamouré sur Elon Musk, traversant la nef de son pas d’homme pressé. L’Amérique a vite repris le pas sur le show à la française : choc des cultures entre les coups d’œil des chaisières, à la dérobée, et l’écrasante présence des maîtres du jour, maîtres du monde – pour combien de temps, encore ?
L’invité d’honneur, pour Macron, ce n’était pas Elon Musk. Trop brillant, trop rapide, trop riche, il aurait probablement pu rappeler aux gens ce que Macron prétendait être en 2017, souvenez-vous : un Mozart de la finance, un surdoué touche-à-tout, un intellectuel au coup d’œil sûr. Macron n’était rien de tout ça. Musk, si. Alors, il a plutôt ressorti le Donald, tout nouvellement élu. C’était l’occasion, pour lui, de se mesurer à nouveau à celui qui fut déjà président pendant les trois premières années de son premier mandat. Trump aime le rapport de force, les négociations à l’américaine, avec intimidations, volte-face, claquements de portes et coups de théâtre. Macron aimerait bien être, lui aussi, un de ces bullies de comédie universitaire américaine qui humilient les intellos, jouent quaterback dans l’équipe de foot et sortent avec la plus belle des pom-pom girls. On se demande quelle gloire il y aurait à être un butor pareil, mais c’est son choix.
Jeux de mains. Jeux de vilains.
Trump humilie Macron en le prenant à son propre piège de manipulateur en improvisant un bras de fer devant les caméras là où Macron jouait son « Touché collé » habituel pic.twitter.com/ufbHDCZDR6
— moonbee (@BMoon_bee) December 8, 2024
À ce sujet — Allocution de Macron : trente mois, trente siècles…
Un demi-siècle de rapports de force
Quoi de mieux, alors, que de jouer face à Trump comme si on était d’égal à égal, avec poignée de main solide, pouce en l’air et tape dans le dos ? Hélas… Sur le parvis de Notre-Dame, sur cet espace blanc, réservé aux accolades, qui ressemblait curieusement à une patinoire, notre Président a essayé de recréer la même fausse cordialité embarrassante, face à Trump, qu’avec ses interlocuteurs habituels. Mais le gros Donald, 78 ans, a un demi-siècle de rapports de force dans sa besace et il ne vient pas de chez Rothschild. Alors, il a saisi le bras de Macron, l’a collé à lui et a secoué sa main, en mode bras de fer, comme à une marionnette. Ici ou là, sur X, certains macronolâtres rappellent que Macron est un pianiste brillant et a beaucoup de force dans les doigts. « D’un coup sec et nerveux, il a cassé le goulot de la bouteille », disait, ridiculement, Mme Granianski (Valérie Lemercier) dans Opération Corned Beef pour montrer à quel point son mari, un bourgeois falot incarné par Christian Clavier, était selon elle capable d’une violence inattendue. On en est à peu près là.
Que veut-elle dire, cette politique de la main serrée, cette scène dans laquelle deux hommes ridicules veulent jouer au plus fort ? Qu’il n’y a jamais de grandes personnes, d’abord. Que Donald Trump ne changera pas et que son assertivité de matamore, dans un monde déboussolé, est en train de faire bouger toutes les planètes. Et que personne, plus personne, ne croit aux câlins ni aux rodomontades d’un Macron désormais complètement démonétisé à la face du monde. À chaque fois qu’on soupire devant le déclin de la France, il est là pour remettre un petit coup de pelle. Et ce, pour encore trente mois.

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47 commentaires
Encore trente mois ? Oh non, pitié !… Sept ans, c’est déjà trop ! Que restera-t-il de la France si Macron reste encore trente mois ? Il a déjà tellement mis à mal tout ce qui faisait la valeur du pays.