Sébastien Pilard : « Éric Zemmour a toute sa place pour participer à la primaire de LR pour avoir un grand débat sur la ligne ! »

Miniature interview vidéo - Sébastien Pilard

Sébastien Pilard, conseiller régional LR qui ne se représente pas cette année, explique ses raisons. Il dénonce la trahison et l'opportunisme des LR s'étant alliés avec LREM, notamment Renaud Muselier, et trace des perspectives pour une droite de conviction, notamment lors des primaires pour la présidentielle de 2022 pour « trancher la ligne » et trouver « la personne pour porter nos valeurs ».

 

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Vous êtes vice-président du conseil régional des Pays de la Loire et vous êtes étiqueté Les Républicains. C’est votre dernière semaine de mandat puisque vous ne vous représentez pas. L’état des lieux des Républicains entre les alliances avec La République en marche et un Rassemblement de plus en plus fort. Reste-t-il un espace politique pour votre parti ?

 

C’est compliqué de répondre à cette question. Évidemment, les régionales sont un peu révélatrices, pour nous. On voit bien les situations diverses dans les différentes régions. Cela a très mal commencé en région PACA avec des alliances avec En Marche ! que nous avons condamnées. Une ambiguïté est en train de se mettre en place avec Les Républicains qui mènent davantage une campagne de centre droit que véritablement de droite. Des alliances potentielles vont émerger soit dès le premier tour soit entre le premier et le deuxième.

C’est la raison pour laquelle je crois que ces alliances et cette ambiguïté sont potentiellement mortifères pour les valeurs de droite. J’appartiens à une droite qui n’est pas Macron-compatible. Par conséquent, je ne peux pas participer à ce jeu qui vise à brouiller les pistes entre la droite et Macron. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de ne pas participer aux prochaines élections régionales.

J’entends très souvent dire que Macron ne peut pas gagner les élections seul et qu’il a une stratégie du coucou en se mettant dans le nid des autres. Malheureusement, nous, aux Républicains, nous le laissons dérouler cette stratégie. Nous avons tout à fait les cartes en main pour l’empêcher de mener cette stratégie. On le laisse faire cette opération parce que nous ne sommes pas sûrs de nous et pas sûrs des valeurs que nous souhaitons porter. Nous souhaitons à tout prix conserver nos mandats, quitte à nous allier avec des personnes avec lesquelles nous ne sommes pas compatibles. En tout cas, personnellement, je ne souhaite pas participer à ce jeu. Les valeurs que je porte en politique sont beaucoup plus importantes que mon mandat.

 

 

Nous sommes à une semaine des régionales et à un an des présidentielles. C’est l’occasion, peut-être, de faire un bilan. Emmanuel Macron est élu avec une immense majorité à l’Assemblée nationale. Théoriquement, Les Républicains auraient dû être la première force d’opposition à Emmanuel Macron en termes d’élus. Néanmoins, on ne les a pas entendus. Nous avons l’impression qu’il n’y avait pas d’opposition de la droite que vous incarnez à l’Assemblée nationale. Finalement, nous avons vu un parti qui a payé de ses ambiguïtés et qui est en train de s’apercevoir que nous ne sortons de l’ambiguïté qu’à son propre détriment.

 

Je pense qu’Emmanuel Macron est évidemment une menace pour la droite française, pour ceux qui se réclament Macron-compatible. Cela peut être aussi une opportunité.

En 2017, j’avais dit qu’il était facile d’être de droite lorsqu’il y avait le FN d’un côté et le PS de l’autre. Finalement, il suffisait de ne pas être FN et ne pas être socialiste pour être de droite. Avec l’avènement d’Emmanuel Macron, c’est beaucoup plus compliqué parce que s’il fallait porter les valeurs de droite notamment sur le souverainisme, sur l’identité, sur l’immigration ou sur le sociétal, il sera très dur de se différencier d’Emmanuel Macron et du macronisme. Finalement, c’est ce qui est en train de se produire.

Les gens ne supportent plus que l’on mette tout et son contraire dans une même liste au prétexte qu’il faut rassembler et gagner des élections. Les gens veulent de la lisibilité et de l’authenticité.

Les gens veulent des personnes engagées en politique pour des valeurs sur un projet et au service des convictions qu’ils souhaitent porter et non pour conserver des mandats ad vitam æternam en faisant des alliances complètement contre nature au détriment des convictions qu’ils souhaitent porter.

 

 

 

 

On va prendre deux listes dans ces élections régionales. Celle en Occitanie, menée par Jean-Paul Garraud, et celle en Provence-Alpes-Côte d’Azur, menée par Thierry Mariani. Ce sont deux anciens de votre famille politique. Ils sont maintenant aux couleurs du Rassemblement national. L’un affronte Renaud Muselier, qui a déjà acté son alliance avec La République en marche. Et l’autre affronte Aurélien Pradié, tête de liste Les Républicains qui, lui, n’a pas l’air d’être dans une logique d’alliance. Toutefois, Aurélien Pradié n’arrive pas non plus à s’imposer et à distancer son adversaire du RN. Quelle que soit la stratégie, nous avons l’impression qu’elle est perdante…

 

Les deux ne sont pas totalement dans le même cas de figure. Aurélien Pradié n’est pas forcément dans une région facile. Nous n’avons pas une grande proximité de ligne sur les valeurs de droite. Quoi que l’on en dise, il conserve un cap et ne souhaite pas s’associer avec qui que ce soit pour émerger et faire le plus grand score possible, quitte à favoriser des accords contre-nature, notamment avec En Marche !, même si En Marche ! a un niveau faible dans cette région.

En revanche, on peut condamner la position de Renaud Muselier qui, finalement, au prétexte de gagner des élections, souhaite conserver son mandat coûte que coûte, quitte à trahir complètement les valeurs de droite. Ces personnes ne voient que leur mandat, leur situation personnelle, et sont prêtes à trahir et à remettre en cause toutes les valeurs de droite au risque de remettre en cause le collectif auquel nous appartenons. C’est inadmissible. Je pense que c’est une faute politique.

Certaines personnes, et notamment Renaud Muselier, sont prêtes à tout pour conserver leur mandat et leurs valeurs qu’elles souhaitent porter. Ces valeurs sont des choses qui passent complètement derrière le devant de la scène. Je pense, en ce sens, qu’il trahit les électeurs de droite, les militants et les sympathisants bien au-delà de sa région. Malheureusement, tous les autres candidats engagés dans les régionales, voire même dans les départementales, sont sincères sur leurs convictions et ne sont pas prêts à faire des alliances et vont pâtir de l’irresponsabilité de Renaud Muselier.

Je veux bien comprendre le côté « Il faut faire un front républicain contre les extrêmes ». Aujourd’hui, les gens ne comprennent plus rien. J’entends que l’on va faire des fronts républicains pour faire barrage au RN ou, dans d’autres régions, on va faire barrage à l’extrême gauche. Quel va être le projet de ces gens dans les mêmes groupes ?

Étant engagé pour des valeurs de droite, j’ai un projet totalement différent des personnes engagées auprès d’Emmanuel Macron. Quelle politique vont-ils mettre en place au département et à la région ?

J’espère que ce ne sont pas les prémices d’une alliance beaucoup plus large sur le plan national, notamment dans le cadre des présidentielles. On entend déjà cette petite musique. Le meilleur choix ne serait-il pas de faire un barrage à Marine Le Pen pour qu’au premier tour, on puisse soutenir Emmanuel Macron ? Je n’irai pas dans cette voie et je pense que c’est totalement irresponsable.

 

 

Quel avenir politique pour vous et vos idées ? Vos espoirs vont-ils vers un Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez, Julien Aubert ? Quel est votre avenir politique ?

 

Mon avenir politique est très secondaire par rapport aux valeurs que l’on souhaite porter pour la France. Je pense que j’appartiens à une génération qui, finalement, est engagée en politique pour des valeurs et des convictions. C’est finalement une source d’optimisme pour nous. La France n’a jamais été autant à droite. On est en train de gagner la bataille intellectuelle. Jamais autant d’intellectuels de droite n’ont autant bien fonctionné dans les librairies ou sur les plateaux télé. Notre nouvelle génération n’est pas prête à faire tous les compromis pour conserver ses mandats. C’est une source d’optimisme pour l’avenir. J’ai une responsabilité, j’ai pris une décision importante de ne pas me représenter au conseil régional. Évidemment, l’objectif va être de retravailler avec tous ces militants, tous ces cadres et tous ces sympathisants qui souhaitent porter des valeurs de droite sans compromission avec Emmanuel Macron pour peser en 2022. La première étape sera les primaires au sein de notre parti politique, Les Républicains. Je pense que la seule manière de faire émerger une candidature sérieuse qui peut créer un engouement autour d’une personne chez Les Républicains est de mettre en place une primaire qui puisse remettre les valeurs et les idées des Républicains au cœur du jeu politique. C’est une opportunité.

Pourquoi aurait-on peur de la voix des militants et des sympathisants ? On se dit qu’un président de la République, c’est la rencontre d’un homme et d’un peuple, mais les sympathisants de droite font partie du peuple. Cette étape pourrait être très intéressante. Elle permettrait de trancher la ligne, la candidature et le choix de la personne qui pourrait porter ces valeurs.

Il n’y a aucune raison que qui que ce soit, aussi légitime soit-il, puisse changer d’un revers de main les statuts et imposer qui que ce soit pour nous représenter en 2022.

Ensuite aura lieu la campagne présidentielle. Des choix pourront potentiellement être faits en fonction de ce qui aura été fait entre maintenant et le mois d’octobre. Je suis au service de mes valeurs, des valeurs de droite et je pense que nous devons tous nous regrouper. Les Républicains sont une famille politique importante de droite et il n’y a aucune raison que ces valeurs ne puissent pas raisonner au sein de cette famille politique et que l’on puisse se fédérer.

 

 

Un nouveau site Internet vient d’émerger : La droite pour la France.

 

Il a été créé par des sympathisants qui refusent l’alliance avec En Marche ! dans le cadre des régionales. Ils souhaitent assumer leurs valeurs de droite avec sincérité. C’est un cri du cœur qui vient de la base. Certains ont montré leur position dans le cadre des instances nationales contre les alliances avec En Marche !, notamment en PACA. Il y avait, évidemment, Bruno Retailleau et Nadine Morano. Force est de constater qu’ils n’ont pas été entendus. Ces militants et ces sympathisants se sont fédérés pour créer un site droitepourlafrance.fr dans lequel il souhaite réunir le maximum de signatures pour dénoncer ces alliances avec En Marche ! que nous pouvons voir se nouer partout sur le territoire. Je pense que l’on peut saluer le courage d’un Laurent Wauquiez, d’un Gilles Platret, qui refusent ces alliances. L’objectif de ces militants est de réunir le maximum de cadres et de sympathisants des Républicains pour dire à Christian Jacob « Nous refusons les alliances avec En Marche ! » La base refuse ces alliances avec En Marche ! quelles que soient les conséquences électorales que cela pourrait produire. Nous sommes déjà 4.000 à avoir signé cette lettre et nous pouvons être encore plus nombreux. J’invite chacun à se connecter sur ce site Internet droitepourlafrance.fr pour montrer qu’il y a tout un peuple de droite qui n’est pas compatible avec la Macronie.

 

 

Julien Aubert a déclaré qu’Éric Zemmour devrait participer aux primaires de la droite. En même temps, Marine Le Pen déclare qu’Éric Zemmour est trop radical. Les LR de Julien Aubert et les LR de la droite conservatrice seraient-ils une famille plus radicale que les idées du Rassemblement national ?

 

Éric Zemmour est une personne intéressante. En 2019, il a été invité au siège des Républicains pour faire une conférence lorsque Laurent Wauquiez était président des Républicains. Il avait d’ailleurs été très bien accueilli. Évidemment, il fait aujourd’hui partie de ces personnalités qui comptent, notamment dans le débat médiatique et intellectuel.

Maintenant, souhaite-t-il aller plus loin ? Je ne sais pas et je n’ai aucune information à ce sujet. Il pourra, évidemment, compter dans le débat de 2022. Va-t-il compter en se présentant lui-même ? Va-t-il compter dans le débat médiatique et intellectuel ?

Julien Aubert a raison lorsqu’il dit qu’Éric Zemmour aurait potentiellement toute sa place pour participer à la primaire des Républicains. Cette primaire serait l’occasion d’un grand débat sur la ligne et sur le choix du candidat pour que ce ne soit pas quelque chose en conclave étriqué avec des personnes qui ont évidemment des responsabilités dans notre parti politique mais n’ont pas forcément la légitimité pour parler au nom de tous les militants. Si Éric Zemmour souhaitait participer à cette primaire, ce serait une très belle opportunité pour notre famille politique.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 17/06/2021 à 21:23.
Sébastien Pilard
Sébastien Pilard
Conseiller régional des Pays de la Loire Secrétaire national LR

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