Le seul livre de Salman Rushdie de ma bibliothèque, c'est son Joseph Anton, une autobiographie, qu'il publia il y a dix ans. Je ne serais peut-être d'ailleurs jamais allé vers cet écrivain sans son destin. Ce livre est son autobiographie. C'est peut-être celui qu'il faut relire en ce moment pour pleurer sur la tragédie de cet homme et la lâcheté de l'Occident. Et sur la suite qui nous guette peut-être.

Car la force de l'écrivain est d'avoir compris qu'il était désormais un acteur malgré lui, un jouet dans la tragédie de nos complaisances avec l'islamisme. Que cette partie de sa vie n'en était malheureusement que le prologue, comme le confirme l'attaque de vendredi. Comme tout grand écrivain, la modestie de son humour (anglais) est partout : la fatwa tombe sur lui le jour de la Saint-Valentin, quand son couple bat de l'aile. Comme tout grand écrivain, il est visionnaire à chaque page.

Le passage de La Tempête de Shakespeare mis en exergue : « Sauf que certains ont donc été sauvés par le destin, pour accomplir un acte dont ce passé est le prologue, et dont la décision est dans vos mains et les miennes. »

Le prologue, avec la fable du « premier merle » : « Son histoire est une sorte de prologue. Quand elle commence, il est le seul concerné, c'est une histoire individuelle, particulière, spécifique. Personne n'est enclin à en tirer la moindre conclusion. Il faudra une douzaine d'années et plus encore pour que l'histoire se mette à emplir la totalité du ciel, comme l'archange Gabriel dressé sur l'Horizon, comme deux avions s'écrasant contre de grandes tours. »

Les premiers mots du livre, sa réponse à une journaliste qui lui demande l'effet que lui fait la nouvelle de la fatwa : « Sa réponse, lâchée sans réfléchir, fut : "Ce n'est pas agréable". Le fond de sa pensée était : Je suis un homme mort. »

Les derniers mots de la quatrième de couverture : « L'histoire de Salman Rushdie n'est que le premier acte d'un drame qui continue de se dérouler chaque jour quelque part dans le monde. »

Le livre est beau par sa chronique de cette vie privée atypique, notamment les relations (au téléphone) avec ses enfants et leurs mères, à qui l'ouvrage est dédié, et les aléas de la protection policière. Il est désarmant par celle des multiples lâchetés de l'Occident face à cette fatwa : cercles littéraires (p. 186 « Le front uni du monde littéraire commença à céder... »), diplomates, gouvernements. La même lâcheté qui transpire des tweets actuels de ceux qui n'ont jamais véritablement œuvré pour que cette fatwa soit abolie. Des tweets qui pourraient figurer dans ce livre.

La leçon émouvante et tragique de Rushdie, c'est le courage, la persévérance, l'ironie devant toute la grandiloquence indignée qui laisse faire. Mais c'est aussi que la littérature, pour belle et indispensable qu'elle soit, ne suffira pas à nous faire sortir du cauchemar islamiste.

On attend impatiemment que le livre soit mis au programme de tous les examens et concours. Évidemment sous le thème de la lutte contre tous les obscurantismes...

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13 août 2022 à 18:30

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13 commentaires

  1. Le terrorisme de l’islam et des musulmans est en embuscade, prêt à bondir à la moindre faiblesse. Rushdie, et son entourage, ont eu un moment de faiblesse. La bête a surgi. Il en est de même pour l’Europe et les européens. L’agression est quotidienne et aucune réaction. Les politiques nous mènent à l’autel du sacrifice.

  2. Un jour ou l’autre l’occident sera contraint de réagir face à ce fondamentalisme criminel qui ne veut que soumettre ou tuer tout ceux qui ne plient pas , sinon nous serons finis ou esclaves

  3. Un grand BRAVO à Monsieur le Professeur pour la suggestion présentée en conclusion de son article.

    La question est de savoir si nous avons, à la direction de l’Education Nationale ou à celle de l’Enseignement Supérieur, des personnalités conscientes de l’interêt d’une diffusion méthodique de l’ouvrage de SALMAN RUSHDIE. ??

    Qui, quand, et comment se charger de faire aboutir une telle initiative ?? SURSUM CORDA !!!!

  4. En Europe on ne sait faire que ça : des marches blanches , pleurnicher , louer les victimes innocentes (Samuel Patti , Salman Rushdie et les centaines d autres)
    On ne veut pas comprendre que l islam nous a déclaré la guerre …et bien mourons en pleurnichant puisque nous ne savons (ou ne voulons) nous defendre (par lacheté ? par stupidite ? les 2 mon général !)

  5. Et ici chez nous en France nous en élevons des millions. drôle de pays qui nourrit et entretient des gens qui veulent notre perte !

    1. Pas seulement la France mais la plupart des pays européistes achetent depuis 50 ans la corde qui va les pendre. Ceux qui resistent (Hongrie) sont des nazis , islamophobes , racistes etc… Il y a quelques decennies on aurait encore pu gagner cette guerre mais de l’avis de beaucoup : aujourd hui quoi que nous fassions nous la perdrons …

  6. Et moi qui croyait que l’Islam si j’en crois nombre de nos politiques et « intellectuels », était une religion de Paix et d’Amour, aurai je été trompé?

    1. Oui, vous avez été trompé, vous avez mal lu certains versets du coran, c’est très explicite, leur volonté de dominer le monde en supprimant toute contestation.

  7. M. Sirgant fait partie des gens qu’il dénonce : en nous parlant d’islamisme et en évoquant « tous les obscurantismes » il tente de relativiser la source du mal qui est bien le coran et donc l’islam.

    1. Lutter contre « tous les obscurantismes » ? Depuis quand voit-on des chrétiens, des bouddhistes ou des athées voler, assassiner, violer, poignarder, égorger au nom de leurs convictions relgieuses ?

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