La richesse des uns ne fait pas le bien commun d’une nation !

Macron

On prête généreusement à Guizot, le ministre conservateur et protestant de Louis-Philippe, la célèbre formule « Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne ». Pour la gauche, cette invitation à s’enrichir était la dernière des bassesses de l’esprit bourgeois, le mot d’ordre égoïste et matérialiste de la classe possédante, peu soucieuse de justice sociale et de redistribution. C’était pourtant l’expression sincère et réaliste d’un homme politique rigoureux et intègre. D’une certaine manière, l’appel à la réussite lancé par Emmanuel Macron aux Français pourrait en faire un de ses héritiers. Toutefois, l’austère Guizot, s’il souhaitait la prospérité du pays plus que sa grandeur, ne privilégiait pas le risque plutôt que l’épargne prudente. L’historien avait peu d’intérêt pour l’argent et n’aimait pas le risque. Il n’avait pas été banquier. Il en va tout autrement pour le locataire actuel de l’Élysée, qui souhaite une France plus réaliste en économie, mais entend réaliser son projet en discriminant les moyens de la réussite, c’est-à-dire, selon lui, de l’enrichissement, et à travers ses choix, en discriminant les Français eux-mêmes. Lorsque ceux-ci prendront conscience de l’iniquité des mesures, et sans doute de la faiblesse des bénéfices pour l’ensemble de la population, l’occasion, rare, de créer un vaste enthousiasme pour le redressement du pays aura été perdue.

Dans le contexte économique mondial et européen très favorable dont bénéficie la France, c’était au gouvernement de prendre des risques, en baissant globalement les prélèvements obligatoires et les dépenses publiques afin de créer un choc dont tous les Français auraient tiré profit. Le seul impôt, mais non le moindre, qu’il fallait augmenter était la TVA qui, compensant une baisse des charges, constitue un avantage compétitif pour notre balance commerciale et, comme on l’a souvent dit, est donc l’équivalent possible d’une dévaluation dans la zone euro. Nombreux sont les pays qui ont utilisé cette arme. Or, la stratégie adoptée repose sur l’addition d’une prudence budgétaire qui confine à l’immobilisme avec un ciblage des contribuables qui prend l’aspect d’une punition pour certains. Si on ajoute à cela quelques manœuvres déloyales, comme le décalage de la baisse des charges par rapport à l’augmentation de la CSG, on peut craindre, ou espérer, que loin de susciter la confiance, cette politique ne soulève la révolte.

L’ensemble de la démarche budgétaire est idéologique, contrairement au discours prétendument libéral. Elle tend à privilégier la consommation et la grande richesse investie dans des valeurs mobilières de profit. Les classes moyennes, les retraités au-delà des seuils (1.289 euros à moins de 65 ans), tous ceux qui en raison des expériences boursières malheureuses de ce début de siècle ont préféré la pierre sont frappés : augmentation de la CSG de 1,7 % dès le 1er janvier 2018, maintien du patrimoine immobilier dans l’assiette de l’ISF alors que les revenus mobiliers sont assujettis à une « flat tax » et les actions soustraites à l’impôt sur la fortune, restriction des dispositifs favorisant l’investissement locatif, baisse des loyers pour compenser celle de l’APL. Dans une vision superficielle, M. Macron veut faire circuler l’argent. Il n’est pas sûr que la relance de la consommation ne le fasse pas sortir de nos frontières en bas. Il est, en revanche, certain que la stigmatisation de la maison par rapport au portefeuille favorisera le 1 % le plus nanti du pays, en haut.

Si l’allègement à 28 % de l’impôt sur les sociétés est une mesure à saluer, bien qu’elle soit insuffisante à l’égard de ce qui se pratique ailleurs, c’est l’essence même du projet défini par M. Macron qui doit susciter la critique. En pensant que le redressement d’un pays ne dépend que du ruissellement de l’argent à partir de ceux qui, selon son mot, ont « réussi », il privilégie par trop sa caste et le mode d’accomplissement qui la caractérise. Cette sélection qui prend souvent chez lui un tour méprisant ne peut éveiller dans le pays la confiance et l’espérance qu’il réclame. Il y a d’autres formes de réussite dans la vie, et toutes peuvent concourir à son bien commun, à commencer par la famille, complètement oubliée.

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Christian Vanneste
Homme politique - Ancien député UMP, Président du Rassemblement pour la France, Président de La Droite Libre

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