[Reportage] Fête de la ruralité à Compiègne : « Si on interdit la chasse à courre, dans cinq ans, la chasse à tir tombe ! »

Chasse_à_courre_Forêt_de_Crécy.

La chasse fait-elle l’unanimité dans le monde rural ? Difficile à dire. En tout cas, une chose est sûre, c’est que les visiteurs étaient au rendez-vous pour cette nouvelle édition de la « Ruralité en fête ». Environ 40.000 personnes sont venues fouler le parc du château de Compiègne pendant le week-end des 3 et 4 septembre. Un magnifique endroit chargé d’Histoire, puisque que ce monument fut palais royal puis impérial sous les règnes de Napoléon Ier et Napoléon III. Quel beau symbole que celui d’organiser un salon de la chasse à Compiègne, berceau historique d’une chasse très ancienne : la vénerie.

Si les chasseurs avaient l’air apaisé en ce dimanche ensoleillé, ils gardent en mémoire l’année qui vient de s’écouler. Polémiques et désinformation du camp anti-chasse ont été monnaie courante. De plus, les chasseurs et leurs soutiens se sentent acculés de tous les côtés. Politiques, médias, associations et opinion publique sont majoritairement hostiles à la chasse. Tous les sondages le prouvent. D’après une étude menée par Ipsos, 51 % des Français sont opposés à la chasse. « Les arguments contre la chasse progressent au sein de la population française. Par ailleurs, les deux tiers des Français s’opposent à l’idée selon laquelle les chasseurs seraient les premiers écologistes de France », indique l’auteur du rapport publié en 2021. Mais alors, comment perpétuer cette pratique multiséculaire qu’est la chasse ? Pour trouver un début de réponse, Boulevard Voltaire est allé rencontrer les acteurs de la biodiversité : gardiens des forêts, chasseurs ou simples amateurs nous ont livré leur témoignage.

Comment faire exister la chasse dans une France opposée à cette pratique ?

Rude question, à laquelle même les chasseurs ont beaucoup de mal à répondre. Selon eux, leur pratique est mal comprise par les Français, qui connaissent la chasse uniquement par le prisme des médias, qui eux-mêmes reprennent le discours des associations anti-chasse. « La presse a soutenu une minorité », confie une femme qui suit la chasse à courre dans la forêt de Compiègne depuis des années. Le maître d’équipage Alain Drach acquiesce et ajoute : « Avant, les réseaux sociaux commentaient ce que racontaient les médias. Aujourd’hui, c’est le contraire. Les médias reprennent ce qu’il y a sur les réseaux, dont les images de AVA [Abolissons la vénerie aujourd’hui]. »

Pour faire changer cette image d’aristocrates cruels, traquant un cerf épuisé sur des dizaines de kilomètres, les veneurs essaient « de faire venir les gens découvrir la chasse à courre, mais ils ne veulent pas », déplore une femme appréciant la vénerie. Lors de cette fête de la ruralité, par exemple, certains équipages de chasse à courre ont libéré des chiens à côté des enfants pour montrer au public que ces animaux sont inoffensifs. Quand on interroge les chasseurs sur l’avenir de la vénerie, ils restent perplexes. « Je ne sais pas », répond une proche d’Alain Drach. Elle ajoute : « Le risque, si on interdit la chasse à courre, dans cinq ans, la chasse à tir tombe ! »

Une vision de l’animal qui a changé chez les chasseurs

Si la chasse à tir est moins sous les projecteurs, ce n’est pas pour autant qu’elle n’est pas en péril. Accoudé sur son pupitre de l’Office national des forêts, Pierre Gégou, responsable du bureau chasse et pêche, confirme qu’il « manque de chasseurs pour protéger la biodiversité de l’Aisne et de l’Oise ». D’après lui, toute la société a été touchée par un changement de rapport à l’animal — ce qui explique que la moitié des Français sont hostiles à la chasse —, y compris les chasseurs. « Dans un groupe de chasseurs, combien sont prêts à achever les souffrances d’un animal blessé à l’arme blanche ? Peut-être une personne, et encore ! », explique Pierre Gégou. Le responsable du bureau chasse et pêche poursuit sa réflexion en précisant que le « changement de mentalité est l’effet d’une population très urbaine qui n’a pas hérité du mode de vie rural, souvent transmis par les grands-parents ».

Ce serait une erreur de penser que la diminution des chasseurs ainsi que le changement de mentalité sont un problème qui ne concerne que les fédérations de chasse. Dans un monde qui se veut de plus en plus écologique, il serait dommage de sacrifier une partie des forêts et de leur biodiversité en laissant une trop grande prolifération de gibier. Mais pour cela, encore faudrait-il le savoir.

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Kevin Tanguy
Journaliste stagiaire à BV, étudiant en journalisme

Vos commentaires

23 commentaires

  1. Comme disait la chanson : »Si vous n’aimez pas çà, n’en dégoutez pas les autres ! ». La chasse et le port du fusil n’étant pas obligatoires à tous, laissons ceux qui aiment les pratiquer. Celà conserve dans la société humaine une part de violence efficace salutaire ( si vis pacem, para bellum !, toujours d’actualité)

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