[Tribune] Le Conseil national de la refondation voulu par Macron ? Bye-bye, la démocratie !

bayrou

Le président de la République devrait mettre en place, le 8 septembre prochain, le « Conseil national de la refondation », nouvelle instance née de son imagination. Beaucoup se sont indignés du fait que les initiales de ce forum, CNR, renvoyaient au « Conseil national de la résistance » fondé par le général de Gaulle et dont l’organisation fut confiée à Jean Moulin. Il faut surtout y voir le signe de l’incroyable outrecuidance d’Emmanuel Macron qui, sans cesse, le pousse à l’erreur, voire au ridicule. Mais ce Conseil est surtout le signe du dysfonctionnement de notre démocratie.

Cette assemblée dévolue à François Bayrou devrait être composée de représentants des forces politiques, économiques, sociales, des associations d’élus des territoires et de citoyens tirés au sort. Les premières réactions augurent mal de l’avenir du Conseil en question. Dans une lettre du 26 août dernier adressée au président de la République, le président du Sénat indiquait qu’il y voyait « une forme de contournement du Parlement ». Apparemment, il n’est pas le seul, puisque tous les partis d’opposition refusent d’y participer, que beaucoup d’organisations tels le MEDEF, la CPME, la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC, le CESE et même Horizons y participeront, mais semblent plus que dubitatifs, et que seuls Renaissance et le MoDem soutiennent pleinement l’initiative.

Le Président avait déjà sorti de son chapeau la « Convention citoyenne pour le climat » composée de 150 personnes tirées au sort. Cette volonté d’évitement des processus habituels de décision démocratique se retrouve sur le plan européen. Ainsi a été clôturée, le 9 mai dernier, la « Conférence pour l’avenir de l’Europe ». Présentée comme « un exercice démocratique paneuropéen », il s’agissait là encore d’un vaste forum comportant des panels de citoyens tirés au sort et d’une plate-forme numérique sur laquelle chacun pouvait s’exprimer sous le contrôle de modérateurs et dans le respect des « valeurs européennes » toujours évoquées mais jamais définies. De mauvais esprits virent dans cette initiative un moyen d’éviter de consulter les peuples de façon réellement démocratique à propos de l’avenir de l’Europe. Tant il est vrai que, depuis le rejet de la Constitution européenne, l’Eurocrature vit dans la hantise des consultations populaires.

Ces trois exemples manifestent une méfiance du système à l’égard des mécanismes de la démocratie représentative ou de la démocratie référendaire pour revenir aux balbutiements de la démocratie athénienne et au tirage au sort. Comme s’il convenait de se méfier du peuple facilement circonvenu par les « populistes » ! Quitte à passer outre sa volonté clairement exprimée, comme le fit Sarkozy, avec la complicité du Parlement, pour ce qui concerne le traité de Lisbonne. Ou à contester la légitimité des choix démocratiques faits par les peuples, à l’image de l’Union européenne qui harcèle les gouvernements polonais ou hongrois, comme si la légitimité du pouvoir ne résidait pas dans le choix du peuple mais dans l’adhésion à un corpus idéologique progressiste.

De plus, les citoyens perçoivent bien l’espèce d’impuissance dans laquelle s’est enfermée la nomenklatura politique, prisonnière d’une part de « l’État profond », et d’autre part des abandons de souveraineté auxquels elle a consenti au profit de l’Union européenne.

L’influence démesurée qu’exercent certaines minorités sur le monde politique et médiatique vide le principe majoritaire inhérent à la démocratie de toute signification. Le déferlement du « wokisme » sur l’Europe ne peut qu’exacerber chez le peuple un sentiment de dépossession de son propre destin. Il se sent ainsi trahi, méprisé, compté pour rien. Ce qui peut le mener à se détourner des urnes dans une espèce de résignation désespérée. Mais celle-ci peut être le prélude à des coups de colère d’autant plus redoutables que, depuis des années, les « progressistes » n’ont cessé de déstructurer la société.

Alain Juppé, lors de la crise des gilets jaunes, avait amèrement remarqué que les peuples ont besoin d’élites. Certes, mais une élite, avant d’être celle du savoir, de l’avoir ou du pouvoir, est d’abord celle du devoir. Sinon, elle n’est qu’une oligarchie et toutes les oligarchies finissent par périr. Le plus tôt est le mieux.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 06/09/2022 à 11:10.
Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

55 commentaires

  1. Ces structures sont fondamentalement anti démocratique. On ajoute des couches de consultations en choisissant qui on consulte et on met le peuple devant un fait accompli. C’est le temps de la résistance active de tous pour paralyser ce système qui trahit nos valeurs fondamentales.

  2. Bayrou, l’homme à tout faire de Macron, n’a-t-il pas pour mission de travailler à la réindustrialisation de la France ? Est-ce qu’il « roupille » dans cette fonction ? Il n’en rend aucun compte. Nos médias, eux aussi ne sont pas très curieux. C’est pourtant essentiel pour le redressement de la France et sa souveraineté. Etrange ! Soumissions, soumissions ….

  3. La macronie et la démocratie ? LOL!
    Nous sommes arrivés à l’explosion de la stratégie validée par Sarkozy de détruire la volonté du peuple.
    Mais Macron est pressé par les USA et l’UE interposée car la Chine est devenue trop puissante.
    Et Biden le sénile qui a commencé le bras de fer avec eux à besoin de l’UE pour faire illusion. Donc de Macron, mais sans l’accord du peuple de France.
    Le toutou de Biden.
    Les tirages au sort de l’ex commission écolo… Cohn Ben Dit avait été tiré au sort!
    Fantastique, non?!

  4. Jupiter, et ses pairs, outrecuidant ? Une évidence, par nature et par littérature … Ce qui m’inquiète vraiment, en revanche, c’est l’obstination de cet homme trop pressé qui bâcle ses quinquennats, indélicat et indifférent, en brisant les cadenas, forçant les coffres ou hachant les portes closes sous des prétextes qu’il invente en regardant d’un œil son miroir et de l’autre le dernier sondage de sa popularité. Plongé dans le bain des flatteries de son entourage, il tente désespérément de se faire aimer des français autant qu’il s’aime ; et son échec le fait enrager …

  5. Quelle marionnette ce Bayrou, toujours là au bon endroit. Quelle rémunération pour ce « truc » ? Il suffit de ces conseils nationaux, de ces instituts de tous bords, de ces chargés de missions détachés qui s’autorisent à penser. Ces postes dorés servent le pouvoir en place et rien ne changera….

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois