Pourquoi un si grand silence autour du meurtre du médecin-chef Alban Gervaise ?

Casquette chef de médecin militaire

Le grand silence autour du décès, le 27 mai dernier, d'Alban Gervaise surprend, voire indigne, sur les réseaux sociaux. « Pourquoi Macron rend-il hommage à un journaliste tué sur une zone de guerre et pas à un militaire tué devant l’école de ses enfants, dans son propre pays ? » s’interroge un twittos anonyme. Toujours sur Twitter, quelques jours auparavant, Éric Ciotti avait évoqué une mort dans « le silence médiatique » . Pour l’essayiste Maxime Tandonnet, dans Le Figaro du 1er juin, « la faible médiatisation de ce drame renforce le sentiment d’angoisse et de révolte qui émane dans le pays ».

De fait, on cherche les mentions dans les médias. Un message attristé du maire de Marseille sur Twitter, un communiqué de condoléances succinct du nouveau ministre des Armées qui parle du « médecin-chef Alban Gervaise » - sans faire mention de son titre de professeur agrégé, sa trop courte mais brillante carrière de radiologue, sa médaille d’honneur du Service de santé des armées, sa récente décoration de chevalier de l'ordre national du Mérite (décret du 22 avril, quelques jours avant son agression). Elliptique, le communiqué dit de lui qu’il a été « mortellement blessé ». Si ne suivait pas la mention « une information judiciaire est en cours : elle permettra de faire toute la lumière sur ce drame », on pourrait le croire disparu dans un accident de voiture.

La page Facebook de l’hôpital d’instruction des armées Laveran où était affecté le défunt médecin, bien que régulièrement mise à jour, ne fait aucune mention d’Alban Gervaise. Contacté par Boulevard Voltaire, l’hôpital déclare laconiquement « ne pas répondre aux journalistes ». Le cabinet du chef d’état-major des armées répond, quant à lui, qu’« à la demande de la famille », il « ne communique pas sur ce sujet ». Même son de cloche du côté du service communication du gouverneur de Marseille : « La famille ne souhaite pas communiquer. » L’officier communication rajoute que, pour elle, le nécessaire a été fait, « comme à chaque fois qu’un militaire décède », même si elle convient que les circonstances du décès ne sont pas tout à fait ordinaires. Elle reconnaît que le sujet est « polémique » mais rajoute que « l’institution n’ a rien à cacher ».

Satisfaire à la demande de la famille est louable, mais en plus d’être un fils, un époux et un père, Alban Gervaise était aussi un médecin militaire qui a servi la France durant 22 ans et qui n’aurait pas été au mauvais endroit au mauvais moment s’il n’avait pas été affecté à l’hôpital marseillais de Laveran. Joints par téléphone, certains médecins militaires expriment leur étonnement de n’avoir reçu aucune communication officielle à son sujet. Ils sont plusieurs, pourtant, à vouloir rendre hommage à celui qu’ils décrivent comme un homme simple, gentil, que l’on pouvait réveiller à toute heure de la nuit pour un conseil urgent, un radiologue chevronné et un scientifique pointu, passionné par son métier, pédagogue aussi, qui avait le souci de la formation : il y a quelques années, nombre de jeunes stagiaires au Val-de-Grâce ont été notamment formés par lui à la « fast écho », une technique d’imagerie précieuse pour évaluer un blessé de guerre ou un traumatisé grave. Une double et belle vocation au service de la France, celle d’officier et de médecin, qui mérite d’être saluée. Les médecins militaires français, comme les autres soldats, paient parfois de leur vie leur engagement. Ainsi Marc Laycuras, tué au Mali le 2 avril 2019, dans une opération contre des groupes terroristes. Alban Gervaise n’imaginait sans doute pas que ce serait en France, devant ses enfants, qu’il serait tué.

Il n’était pas en uniforme au moment des faits, ni dans l’exercice de ses fonctions. Sans doute Mohammed L., son meurtrier, ignorait-il qu’il était militaire : reste que c’est un officier supérieur de l’armée française qui a été poignardé à la sortie d’une école catholique, pour un motif d’ordre religieux - si l’on en croit les propos tenus. Un motif que de nombreuses voix - notamment celle d'Éric Ciotti - voudraient voir qualifier par la Justice de terroriste.

Une de ses jeunes collègues émet une hypothèse : peut-être ce drame ne fait-il pas les gros titres tout simplement parce qu’à Marseille, les coups de couteau sont légion ? Une explication également avancée par une mère de famille de la cité phocéenne participant, depuis ce tragique 27 mai, à une chaîne de prières - Alban Gervaise était catholique pratiquant - pour lui. Deux réflexions qui viennent, en somme, donner raison à la thèse centrale de Maxime Tandonnet dans Le Figaro : « L’affaire Alban Gervaise révèle la banalisation de la barbarie quotidienne. »

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 04/06/2022 à 7:22.
Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

76 commentaires

  1. Pourquoi un si grand silence madame Cluzel ?
    Il est tout simplement français, blanc, catholique et de surcroit militaire.
    Pour les médias et les politiques ces raisons énumérées sont suffisantes pour se taire et enterrer profondément cette affaire.

  2. Je regardais ce matin l’emission de Bercoff avec comme invité un des responsables de la FNAIM. Les deux villes prises comme exemple de baisses du marché immobilier dans un contexte plutot florissant pour le reste de la France, c’est précisément Marseille et Lille. Pas besoin de vous faire un dessin. Ces deux villes sont devenues invivables et tous les blancs s’en vont. Impossible de faire vivre une famille avec des enfants dans ces coupe-gorges.

  3. La non information médiatique du meurtre d’Alban Gervaise révèle une fois de plus la lâcheté de l’ensemble de la classe politique Française et des médias chiens de garde du gouvernement.

  4. Il vaudrait mieux que nos élites prennent conscience que la colère commence à monter et qu’à force de prendre le peuple pour de simples cons citoyens en niant les réalités, ça va péter. Tous ces meurtres ou viols perpétrés soi disant par des malades mentaux souvent clandestins sur notre sol, le chaos du stade de France causés par les supporters anglais etc… Bref les mensonges d’État s’accumulent et ce n’est plus supportable. Alors chères élites ça suffit.

  5. Tous les lecteurs de BV ont bien sûr répondu correctement à votre question bleue, chère Gabrielle : la victime appartenait au camp du Mal (mâle blanc, militaire, catholique) et l’agresseur à celui du Bien (musulman, issu d’une minorité victime du racisme systémique).
    On ne pouvait décemment pas faire de gros titres de cette affaire et faire ainsi le jeu de l’extrême droite !

  6. Pas de bruit car le problème est grave.
    Nos politiques sont des faux-cul.
    Sans camera ou sans buffet , ils ne sont grand chose.
    Vous rendez vous compte de la violence de ce silence ?
    Après, ces pauvres personnages viennent pleurer, toujours devant les caméras , quand un électeur qu’ils ont trahi leur ont dit leur droit.
    Après avoir tué la vocation des soignants, ce sera celle des militaires.

  7. Le silence institutionnel, aussi bien de l’armée que du pouvoir, et le silence de l’archevêque de Marseille sont des silences COMPLICES d’un assassinat commis par un dégénéré contre un père de famille français, catholique, et brillant médecin militaire ! Cette lâcheté est ignoble et ne laisse aucune illusion sur les années que nous allons vivre avec ce deuxième quinquennat de Macron !

    • Vous avez entièrement raison. Un militaire ,même si il était en habits civils , tué par ce que nos médias , appellent pudiquement un déséquilibré, ça n’intéresse personne. Un voyou , multirécidiviste, qui est abattu par un policier qui ne fait que se défendre et c’est un tollé médiatique !

  8. Ce silence médiatique démontre une fois de plus la collusion entre ce gouvernement de pleutres, de lâches et les médias paillassons de macron. Cet attentat d’une « chance pour la France » contre un officier de l’armée est immonde et devrait faire les gros titres d’une presse responsable mais le montant des subventions accordées à ces médias leur ôte toute impartialité et toute dignité.
    Sincères condoléances à cette famille détruite à vie.

    • Les gouvernants et les médias ne sont ni pleutres ni lâches, ils sont des traîtres et rien que des traîtres, pas autre chose. Cordialement.

  9. Silence radio sur la mort du journaliste français en ukraine curieusement le jour de la visite de la ministre macronienne des affaires étrangères. On ne connait toujours pas la nationalité des tireurs ! Que font nos services de renseignements ? Que certains auraient voulus occasionner un clash entre Paris et Moscou qu’on pouvait pas mieux s’y prendre

    • Quelle opportunité à la veille de nouvelles sanctions contre la Russie (et surtout les européens)…
      En effet le pseudo « bombardement russe » a disparu des textes…
      Quelle tristesse pour ce journaliste et ses proches.

      • D’autant que la responsabilité de Poutine est loin d’être évidente avec ce silence surprenant de macron, du gouvernement et des médias main-stream ! Qui tire les ficelles derrière ce crime ? Macron est-il encore « maître du jeu » s’il l’a été un jour ?

    • La nationalité des tueurs est évidente… Il s’agissait de faire accuser Poutine, de « crime de guerre », une fois de plus.
      Les vrais criminels sont soutenus par Biden et l’Otan, l’ensemble des dirigeants occidentaux, et ceci contre 70% des membres de l’ONU.
      Ça en dit long sur l’évolution de notre civilisation qui ment, tue et viole des femmes et des enfants, et ceci sans contrôle depuis les bombardements de Serbie…

  10. Si le tueur ne savait pas que ce père était militaire,il n’ignorait pas que cette école était catho.Et comme les médias de la bien-pensance déclaraient qu’il l’a tué au nom de « Dieu » (en omettant qu’ils traduisaient ses propos),celà confortait le silence de notre cher président …car les élections législatives approchant ,il lui fallait rester le président de tous les français en ne prenant pas parti.Ben Voyons!
    Sincères condoléances à la famille.

  11. Mes sincères condoléances à son épouse, ses enfants, à sa famille. Cet assassinat me bouleverse. C’est terrible de trouver ainsi la mort, surtout lorsque l’on va tranquillement chercher ses enfants à l’école. Je suis bénévole dans une école catholique maternelle et primaire, donc cet assassinat me bouleverse encore plus, d’autant plus que cela s’est produit devant ses enfants. C’est terrible, inadmissible, intolérable !

  12. Merci, Mme Cluzel et M. Ciotti pour vos interventions ! Cette victime était catholique ET militaire, une mauvaise victime : deux raisons suffisantes pour qu’on passe sous silence sa mort sous le couteau d’un musulman. Je suis indignée par le silence qui a suivi sa mort. Pas un mot du président ni de l’archevêque de Marseille, qui vient d’être créé cardinal !

    • Tout simplement parce que c était un bon français, qu aucun autre français ne viendra le soutenir ni manifester , rien ne brûlera il n y aura pas d émeutes donc ils s en foutent

    • Quand toute la pyramide pratique l’omerta , il n’y a plus rien à attendre de ce pays , on peut bien s’agiter dans tous les sens , certains veulent encore y croire c’est peine perdue , il est trop tard …

  13.  » l’institution n’a rien à cacher » ! : m’enfin, ça se saurait , si elle faisait des cachotteries , n’est ce pas ??? Honte , honte !
    Et si ses collègues , militaires comme médecins , étaient ENFIN en train de sortir de leur léthargie taquya et se préparer à la réalité , concevoir des stratégies ? C’est ce que de tout coeur j’espère….

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