"Majorité présidentielle", peut-on lire en majuscules sur les tracts que les quelques militants restés fidèles à Manuel Valls peinent à écouler dans la 1e circonscription de l'Essonne, où le député sortant se présente à sa propre succession. Ne vous y trompez pas : il n'a jamais été investi par La République en marche, pas plus qu'il ne l'a été par le Parti socialiste.

C'est une traversée du désert que vit Manuel Valls depuis sa candidature malheureuse à la primaire de la gauche. Son ralliement à Emmanuel Macron, vécu comme une trahison, lui a valu l'inimitié du PS, qui a engagé une procédure d'exclusion à son encontre. Une aubaine pour lui, l'occasion de couper définitivement les ponts avec les socialistes et de rejoindre le nouveau Président, rêvant – selon certains journalistes – d'un poste ministériel ou, a minima, d'une investiture en vue des législatives…

Mais l'accueil escompté ne fut pas au rendez-vous. C'est plutôt froidement qu'En Marche ! a reçu le soutien de l'ancien chef du gouvernement. Pour un Président qui se veut l'incarnation du renouveau, et ne surtout pas apparaître comme le continuateur du quinquennat précédent, on comprend aisément la gêne que constituerait un tel soutien.

Manuel Valls pouvait néanmoins pousser un ouf de soulagement en début de semaine : ni le PS ni La République en marche ne présenteront de candidats contre lui. Un succès vite éclipsé par la tournure burlesque qu'ont prise les choses au cours des derniers jours. Car ils ne seront pas moins de 21 candidats à tenter de ravir son siège de député à l'ancien Premier ministre.

Parmi eux, l'humoriste controversé Dieudonné, qui a annoncé sa candidature samedi. S'il ne cache pas être venu pour en découdre avec Valls, qu'il considère comme "un bourreau" qui se serait acharné contre lui "depuis des années", il adopte la posture d'un candidat sérieux et dit vouloir agir notamment dans le domaine de la justice. Sa proposition phare : installer des caméras dans les tribunaux pour que les citoyens aient accès aux débats.

Son suppléant n'est autre que Nolan Lapie, ce jeune Breton de 18 ans qui avait giflé Manuel Valls en janvier lors d'un déplacement à Lamballe. Dans ces conditions, il est peu probable que ce dernier accepte l'invitation à "débattre face à face" que lui propose, goguenard, Dieudonné.

Autre duo détonnant : le candidat indépendant Jacques Borie (un restaurateur, ancien communiste) et son suppléant, le chanteur Francis Lalanne, qui concentre l'attention des médias et des électeurs. "Je ne suis pas un candidat loufoque", clame le poète qui se définit comme "un activiste citoyen", accusant Manuel Valls d'incarner "l'incompétence, le carriérisme et l'opportunisme".

Abandonné par tous, ridiculisé, obligé de quémander la pitié de sa famille politique, Manuel Valls semble être tombé bien bas. L'ancien Premier ministre risque bel et bien d'être la tête de Turc de ses 21 adversaires prêts à sortir leurs griffes. Mais cette cacophonie peut paradoxalement le servir. Face à une droite affaiblie, un FN microscopique, une pléthore de petits candidats, une gauche divisée et deux adversaires farfelus, il apparaît comme le candidat le plus sérieux et le plus digne de représenter des citoyens. Le ridicule ne tue pas. Rend-il donc plus fort ? Réponse le 11 juin.

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22 mai 2017 à 10:14

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