Soazig de La Moissonnière est la photographe officielle d'Emmanuel Macron. On ne peut pas lui nier un véritable talent pour la mise en scène, le choix des cadrages et de la couleur (ou du noir et blanc). Elle connaît son métier. Sa fiche Wikipédia signale qu'elle a suivi le cours Florent pour devenir metteur en scène. On n'en est guère surpris lorsqu'on voit les poses du Président, désormais candidat, saisi « sur le vif » dans son bureau. Gros plans qui expriment une tension maîtrisée, grain légèrement épaissi pour retranscrire la fatigue de l'instant, nature morte donnant à voir une tasse à café vide près d'un téléphone destiné aux visioconférences (Chardin à l'heure de la fibre) : ne boudons pas notre plaisir, c'est du beau travail.

Tout au plus pourra-t-on légèrement ironiser sur les postures présidentielles : ce visage toujours en contemplation de lui-même, ces mains figées dans des attitudes marmoréennes qu'on ne retrouve pas vraiment dans la vie de tous les jours. En 2019, Alex Vizorek, humoriste de France Inter (si tant est que cette expression ait un sens), avait comparé Soazig de La Moissonnière à Leni Riefenstahl. Pour ceux qui ne se souviendraient pas des heures les plus sombres de notre Histoire, Leni Riefenstahl est la réalisatrice du Triomphe de la volonté (1934) et des Dieux du stade (1936), deux films qui couvrent respectivement le congrès du parti nazi à Nuremberg et les Jeux olympiques de Berlin. C'était évidemment stupide et Vizorek, coupable de « godwinisme » comme souvent la gauche, s'en est excusé. Toutefois, si Macron n'est évidemment pas Hitler, Soazig de La Moissonnière a un point commun avec Leni Riefenstahl : celui de mettre un grand talent expressionniste au service d'un projet politique d'une envergure discutable. La politique est la gestion de l'instant, l'art est sa capture. L'art est long, la vie est brève, et toutes ces sortes de choses.

La dernière série de photos de Macron a, une fois de plus, fait jaser, notamment sur les réseaux sociaux. C'était évidemment le but, j'imagine. On y voit le chef des armées, visiblement fatigué, en jean et pas rasé, dans un bureau élyséen. Il porte un sweat à capuche du commando parachutiste de l'Air n° 10 (CPA 10) offert, nous dit la presse, par les commandos eux-mêmes, lors d'une visite présidentielle sur leur base de Bricy. Le coup de com' est, encore une fois, gros comme une maison : le sweat à capuche, ça fait jeune, comme le jean ; et le logo du CPA 10, ça fait chef de guerre, comme Zelensky. Un Zelensky français... mais qui n'aurait jamais tenu une arme... ni fait son service... ni résisté à une invasion... ni armé sa population... Bref, pas tout à fait un Zelensky quand même.

Le CPA 10, avec les commandos marine et le commandement des Forces spéciales terre, est l'une des composantes du commandement des opérations spéciales (COS). Composé d'à peine 4.000 opérateurs performants et atypiques, le COS est présent sur tous les théâtres les plus dangereux du globe. Un recrutement impitoyable et une coûteuse formation lui permettent de disposer d'une force de frappe toujours en alerte. Certes, Emmanuel Macron, en tant que chef, les commande. Certes, il est toujours plus chic d'avoir un sweat du CPA 10 qu'un porte-clés avec un jeton de Caddie™ du énième régiment de lance-beignets. Pour autant, cette appropriation de goodies, sous l'œil des caméras, donne une drôle d'impression.

Tous ceux qui ont fait leur service militaire ou qui servent encore dans les forces armées ont croisé, un jour ou l'autre, un jeune soldat comme Macron. Vous savez, ceux qui affectent un regard d'aigle et surjouent ce qu'ils croient être un comportement martial. Ils portent, sur leur sac à dos de permissionnaires, une quantité impressionnante de patchs, tous plus terrifiants les uns que les autres : « Le diable rit avec nous », « Task Force Bidule », « Marche ou crève »... La plupart du temps, on finit par s'apercevoir que ces soldats qui en font des tonnes sont tout, sauf des commandos de la mort. Ce n'est pas surprenant. Thucydide avait déjà vu, dans la guerre du Péloponnèse, que « de toutes les manifestations de la force, la plus impressionnante est la réserve ». Qui veut impressionner est trop impressionnable. Déguisé aujourd'hui en commando, hier en Président, avant-hier en pilote, autrefois en banquier, le Président semble, une fois de plus, confondre l'épate avec le fond. Il n'est pas surprenant que l'œil professionnel de la metteur en scène ait capté cet histrionisme.

 

 

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 16/03/2022 à 20:55.

16221 vues

15 mars 2022 à 20:50

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.

152 commentaires

  1. Petit tuyau pour ceux qui ne connaissent pas cette appli de sondage ( buz et Présidentielle) : QOTMII
    J’en déduis que 80% au départ ( 1er tour) ne veulent pas de Macron après avoir vu ce petit énarque pendant 5ans. Ensuite ils voteront non pas pour lui mais contre l’autre comme en 2017 !!

  2. Je n’en veux pas spécialement à Macron, toute son incompétence son ego et ses folies se résume en un mot: c’est un énarque!! Aussi crasse que Hollande et les autres. Et secundo c’est à tous les crétins qui votent pour ce mignon et qui n’ont pas le niveau d’analyse des lecteurs de Bd Voltaire!! Il faut avoir un QI de moule pour être aveuglé par ce gamin aussi idiot que Hollande ou feu Giscard. Les énarques sont LE problème de la France!

  3. Je ne sais pas si ses postures et ses airs sont martials, vous vous en gaussez mais, malheureusement, ça marche sur le “bon“ peuple bourgeois, bobo et woke. Pour l’instant, ces votants ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et lorsque nous serons colonisés, ils fileront doux comme en 1940.

  4. Il continue ses cours de théâtre et en même temps il joue dangereusement avec la Corse pour assurer sa réélection et snobe ses opposants en leur refusant un débat. Il continue à surjouer dans une pièce où nous ne sommes que des figurants muselés et consentants.. jusqu’à quand ?

  5. Une bande d’incapable à redresser un pays, lui rendre son honneur d’antan, assurer la sécurité de son peuple, avoir une armée digne et forte. Nos dirigeants sont forts en promesses non-tenues, en palabre. Comment un président et son ministre des armées peuvent t’ils commander efficacement sans avoir passé ne serait-ce qu’un jour dans les forces armées, ni avoir aucune connaissance dans ce domaine.

  6. Nos -vrais- présidents décédés doivent se retourner dans leur tombe en assistant à la déchéance de leur fonction! Un pitre à l’Elysée transformé occasionnellement en lupanar…

  7. La France et les Français ne font pas partis d’un jeu de guerre vidéo que l’on allume et que
    l’on éteint et on recommence. Mais dans la réalité si on se plante ça explose.
    Nous avons un Macron président fantoche comme Zelensky en Ukraine.
    Des comédiens malfaisants, deux ados mal dégrossis. Il est beau le nouveau monde.
    Ce n’est pas la France que je veux pour mes petits enfants.

  8. De mon temps, au Service, on affichait « la Quille » chiffrée, sur nos uniformes en sortie….
    Au lieu de CPA 10, il pourrait afficher « 40 jours »…
    Si le Peuple le Veut !

  9. Macron chef de guerre, c’est pitoyable, lui qui, comme seul fait d’arme, n’a fait que culbuter sa maitresse d’école.

  10. Commando parachutiste ? Trop dans les jupes de « maman » ! C’est sur le terrain et dans la souffrance qu’on gagne le droit de porter ces insignes !

  11. en gros nous avons un clown comme président ! ou une sorte de Joker ennemi de Batman, mais nous n’avons pas de président . Brasser de l’air, il sait ! agiter des ailes comme un coquelet devant un ours, il sait ! Emmerder les français il sait ! Gouverner il ne sait pas ! et Vous voulez qu’on en reprenne pour 5 ans ? Non Merci très peu pour moi ! Pour commencer cessez de publier des sondages bidons qui le place en tête . c’est impossible. Messieurs les médias cessez de servir la soupe ! Merci

Les commentaires sont fermés.