Mariages forcés au Pakistan : ces viols qui n’intéressent personne 

« Le problème s’aggrave de jour en jour. » Auprès de l’Aide à l’Église en détresse (AED), le père Emmanuel Yousaf, responsable de la Commission catholique Justice et Paix au Pakistan, s’inquiète de l’augmentation dramatique des conversions et mariages forcés de jeunes filles chrétiennes. Une violation du droit international connue de tous mais qui semble n’intéresser personne.

Enlevée, violée et mariée de force

Kinza, Nayab, Anna, Chashman… la liste des adolescentes de confession chrétienne enlevées par des musulmans, converties à l’islam contre leur gré, violentées voire violées et ensuite mariées de force à des hommes souvent bien plus âgés qu’elles ne cesse de s’allonger. Au Pakistan, un récent rapport recense ainsi au moins 78 cas de conversions forcées en 2021. Ces enlèvements et conversions – qui ont augmenté de 80 % - concernent essentiellement les jeunes filles de confession chrétienne et hindoue, deux religions minoritaires. Mais ces chiffres restent bien en deçà de la réalité. Chaque année, on estime plutôt à près de 1.000, si ce n’est 2.000, le nombre d’adolescentes victimes de tels actes. Des experts mandatés par l’ONU expliquent ainsi, dans un document remis en janvier dernier, que loin d’être anecdotiques, les cas de rapts et conversions forcés sont « un phénomène répandu ».

En juillet 2021, Anna, fillette de seulement trois ans, est battue puis violée par le mari de la directrice de l’école coranique dans laquelle elle est scolarisée parce que ses parents, de confession chrétienne, auraient été accusés de blasphème. L’année précédente, une jeune fille de chrétiens pauvres est enlevée devant son école. Sans nouvelle de leur enfant pendant quelques jours, ses parents finissent par recevoir une vidéo leur apprenant que leur fille, âgée de 13 ans, s’est convertie à l’islam et a accepté d’épouser un musulman. Révoltés, les parents décident de porter plainte et de prouver à la Justice la minorité de leur enfant. En vain. Les ravisseurs réussissent à produire de faux documents, certifiant que l’adolescente est âgée de 19 ans, et obligent la jeune fille à témoigner en leur faveur.

Plus récemment, en septembre 2022, Kinza, âgée alors de 14 ans, est enlevée à son domicile par des hommes armés. Violée, la jeune fille se retrouve contrainte d’adhérer à la foi islamique et est ensuite mariée de force à l’un de ses ravisseurs. Après une plainte déposée par ses parents et un procès, la jeune chrétienne est finalement sauvée par un juge clément qui lui permet de retourner auprès des siens. Malheureusement, cette heureuse issue, peu la connaissent. En effet, les chrétiens, tout comme les hindous, citoyens de seconde zone, ont rarement les moyens de porter plainte et d’attaquer en Justice les kidnappeurs de leur fille. D’autre part, dans certains cas, les ravisseurs obtiennent le soutien d’ecclésiastiques, de la police, voire de la Justice, rendant impossible toute remise en cause. Dans d’autres cas, les tribunaux invoquent la charia pour justifier que la victime reste avec son ravisseur.

Où sont les féministes ?

Ces conversions et mariages forcés sont des violations manifestes du droit international. Le Pakistan est lui-même signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant qui protège le droit des enfants d’être élevés par leurs parents jusqu’à leurs 18 ans. Et pourtant, la situation des jeunes filles chrétiennes au Pakistan, si elle évoquée occasionnellement dans la presse, n’intéresse pas grand monde. Les féministes en Occident, et notamment en France, si promptes à s’émouvoir de la moindre galanterie jugée sexiste n’élèvent pas la voix pour demander au Pakistan de légiférer contre ces pratiques dramatiques. Sans doute nos militantes préfèrent-elles se battre pour la reconnaissance des droits des trans ou pour la stérilisation que de défendre ces jeunes chrétiennes. À croire que nos féministes ne servent la femme que lorsqu’elles peuvent l’instrumentaliser politiquement…

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