Livre : Les objets, les êtres ou les mots s’affrontent aussi, certains sont de droite d’autres de gauche

ROND DE SERVIETTE SÈZE

À quelques heures de l’élection présidentielle, certaines introspections sont nécessaires, elles peuvent changer la destinée d’un pays. C'est la vocation du livre de Richard de Sèze, Le Rond de serviette est-il de droite ? Et autres considérations essentielles, qui vient de paraître à La Nouvelle Librairie. Ainsi, la manière dont vous utilisez certains objets est susceptible, le jour du vote – à l’instar des battements d’ailes discrets du papillon dont les effets démultiplicateurs sont incommensurables –, de peser, jusqu’à un point insoupçonné mais pouvant s’avérer décisif, sur le résultat d’une élection dont l’épistocratie médiatique assurait, de longue date, qu’elle était pliée d’avance.

Que, ce dimanche, avant la promenade électorale, familiale et digestive, sous le toit de votre chère belle-mère, attablé devant le traditionnel poulet-haricots verts (relevés d’une pointe d’ail du jardin), en train de jouer mollement avec votre rond de serviette pour masquer un ennui ferme ou, la veille, chez votre vieille tante, devant un feu de cheminée, tirant de généreuses bouffardes de cette bonne pipe de bruyère léguée par un aïeul oublié ou, l’avant-veille, surprenant votre ado précoce en train de se mirer lascivement le nombril sous un outrageux « crop-top », voire au début de cette fatidique semaine, fulminant le temps obstinément pluvieux, rageant de ne pouvoir arracher ces mauvaises herbes montant à l’assaut de vos bordures, bref, que vous vous trouviez pris dans les rets de l’une de ces prosaïques situations où le domestique le plus superficiel côtoie allégrement le quotidien le plus routinier, et vous voilà, ce fameux dimanche d’élection, à glisser dans l’urne le bulletin d’un candidat de droite – lors même que vous eussiez toujours voté à gauche.

Allez savoir pourquoi vous n’êtes, finalement, que le jouet de votre environnement, agi davantage qu’agissant, la feuille portée par le vent, que le vent lui-même. Sans doute trouverez-vous un balbutiement de réponse philosophique à la lecture de ce bréviaire de l’essentiel auquel le truculent et non moins subtil Richard de Sèze a consacré ses soirées – pétersbourgeoises, of course – et son intelligence aiguisée – laquelle, comme il se doit, ne manque pas d’avenir.

Rédacteur en chef de la revue Politique Magazine, chroniqueur à Valeurs actuelles et à L’Incorrect, ce descendant d’une des plus illustres familles de France s’est fait historien curieux et observateur avisé des mœurs de nos contemporains. Tout est parti de ce constat que tout ce qui, hier, se trouvait à/de droite a basculé dans le camp opposé et inversement. Notre essayiste, amateur éclairé de bandes dessinées, ignore moins que quiconque qu’une ligne claire, par son trait limpide, en dit bien plus long et sans artifice qu’un phylactère abusivement encombré et ennuyeux.

C’est donc en phénoménologue – en quêteur d’essences, si l’on veut – qu’il s’est livré à l’examen des « choses en soi » : « Se poser sérieusement la question de ce qui est vraiment, essentiellement et non pas circonstanciellement, de droite. Autrement dit, ce qui est vrai et bon. Ce qui nous ancre dans l’espace et dans le temps, ce qui nous fait vivre, demeurer, persévérer et croître. »

C’est donc sur un ton léger – mais pénétrant – et fort de plusieurs années d’examen minutieux du réel que l’auteur vient apporter une réponse ludique et pédagogique au mystère qui entoure la nature politique des bagatelles peuplant notre univers environnant. Grâce à cet ouvrage, vous ne pourrez plus vous tromper et saurez, dorénavant, que le gilet jaune est de droite mais le rond-point à gauche, le plat du jour à la dextre quand le mug des open space se jette résolument par la senestre. Vous ne commettrez plus l’impair de ne pas savoir que l’athazagoraphobie – soit « la peur d’être oublié de ses proches, de ses amis, de ses pairs » – est une trouille urbaine et de gauche, mais que la poussière comme les souris sont indécrottablement de droite, que le féminicide est mesquinement de gauche alors que les troupeaux de chèvres sauvages sont hardiment de droite…

Droite ? Gauche ? Selon l’auteur, les objets en disent long sur nous. À propos : la carte d’électeur est-elle de droite ou de gauche ?

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Aristide Leucate
Docteur en droit, journaliste et essayiste

Vos commentaires

2 commentaires

  1. J’observe que depuis que le peuple vote le pays s’enfonce dans un démocratude qui efface tout son prestigieux passé et nuit encore à son éventuel avenir.

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