L’hymne hexagonal est La Marseillaise…

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L’Hexagone : c’est ainsi qu’on commença à appeler la France métropolitaine dans les années 60. C’était l’époque où l’on se débarrassait des colonies, bien sûr. Pas question, alors, de dire que la France se repliait sur son pré carré. Alors, on inventa l’Hexagone. L’Hexagone avait un côté techno, d’autant qu’il en compte six (des côtés) et le carré, comme chacun sait, seulement quatre.

L’Hexagone donnait une ligne moderne à ce cher et vieux pays. La France gaullienne et pompidolienne se débarrassait de ses vieux meubles datant de Louis Philippe pour acheter du Formica™, bien lisse, bien propre. Fini le chantourné, place aux lignes droites. On réaménageait son petit intérieur. On aménageait la France : la fameuse politique d’aménagement du territoire. On construisit aussi tout plein de lignes droites à la périphérie des villes : à la verticale, à l’horizontale. Aujourd’hui, bien souvent, on prend la tangente pour les éviter.

En 1988, pour les trente ans de la Ve République, on mit en circulation une pièce de un franc. À l’avers, le profil du général de Gaulle. Au revers, l’Hexagone dans lequel était gravé « 1 F. ». On commença à parler de la « France hexagonale » pour ne pas dire « France métropolitaine », ce qui est une erreur. En effet, stricto sensu, la France métropolitaine comprend la France continentale et ses îles proches dont, évidemment, la Corse. Les Corses viennent sur le continent, pas en métropole. En revanche, nos compatriotes d’outre-mer se rendent en métropole lorsqu’ils rejoignent la France continentale.

En juillet 2018, des députés de gauche proposèrent que le terme « métropole » soit remplacé par « France hexagonale ». La raison ? L’usage et la généralisation du terme « métropole » contrediraient « les ambitions affichées par l’État en matière d’égalité et en matière de lutte contre les discriminations sur l’ensemble du territoire français ». Voilà autre chose ! Explication : « La définition première de “métropole”, “État considéré par rapport à ses colonies, à ses territoires extérieurs”, renvoie à l’histoire coloniale de la France. En d’autres termes, il n’existe pas de métropole sans colonie. Si la Constitution doit continuer à faire référence à la “métropole”, elle doit en toute logique continuer à parler de “colonies”. Ce terme repose intrinsèquement sur des rapports de domination d’un peuple de colons sur ses colonies et est imprégné d’une connotation hiérarchique. » Il fallait y penser.

La proposition n’avait pas soulevé l’enthousiasme de la commission des lois. Le député MoDem Marc Fesneau avait fait part de son scepticisme : « Le mot “France hexagonale” n'est pas un terme très heureux à mon goût [...] J'entends bien ce que vous dites mais je ne sais pas si on peut trouver mieux. Donc c'est un avis défavorable à ce stade. » Point barre.

Et puis, que découvrons-nous, en dévorant légifrance en guise de lecture estivale, faute d’un dernier Marc Lévy ? Que la loi du 9 juillet dernier portant organisation de la sortie de l’état d’urgence sanitaire prévoit que, dans un article du Code de la santé publique, le mot « hexagonal » remplacera désormais le mot « national ». Un détail, me direz-vous. Pas très heureux, en tout cas, comme terme, comme dirait Marc Fesneau, aujourd'hui ministre de Macron. Un Macron qu'on entend d'ailleurs souvent employer ce mot rescapé de la France pompidolienne.

Pendant qu’on y est, pourquoi ne pas modifier aussi une phrase de l’article 2 de notre Constitution ? Ça donnerait ça : « L’hymne hexagonal est La Marseillaise. »

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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