Les îles de la mer Égée ne veulent pas « accueillir toute la misère du monde » 

migrants Italie

La colère gronde parmi les habitants des trois îles grecques de la mer Égée qui ont entamé, mercredi, une grève de vingt-quatre heures pour protester contre les projets de leur gouvernement prévoyant d’y construire de nouveaux camps pour remplacer les installations actuelles surpeuplées où s’entassent plus de 38.000 migrants dans les camps des îles de Lesbos, Samos, Chios, Leros et Kos, officiellement prévus pour 6.200 personnes. Pour ce faire, le gouvernement grec veut réquisitionner des terres sur ces mêmes îles pour y construire des centres fermés pouvant accueillir jusqu’à 20.000 demandeurs d’asile.

C’est la seconde grève générale en moins d’un mois, avec fermeture des commerces et des services publics. Des milliers de manifestants ont occupé les ports de ces trois îles proches de la Turquie, brandissant de nombreux drapeaux grecs en scandant « Nous voulons récupérer nos îles, nous voulons récupérer nos vies ».

Selon le journal 24heures, de Lausanne, la Grèce est redevenue, l'an dernier, la première porte d'entrée des migrants en Europe : « Plus de 3.000 nouveaux migrants sont entrés en Grèce depuis le début de l'année 2020, dont la moitié par la mer. » Au-delà de l’aspect humanitaire, la plupart des ces réfugiés « politiques » sont motivés, en fait, par des raisons économiques certes compréhensibles, mais la Grèce – comme disait l’autre – ne peut pas « accueillir toute la misère du monde », qui s’additionnerait à l’indigence de ses propres ressortissants. Faut-il rappeler, ici, que près de 40 % des Grecs au chômage n’ont plus aucune couverture sociale et que 60 % des jeunes de moins de 25 ans sont sans emploi ?

La Grèce compte, actuellement, des dizaines de milliers de migrants, principalement des réfugiés syriens, qui s’entassent sur les îles de Lesbos, Chios et Samos, proches de la côte turque, alors qu’un accord (mars 2016) entre l’Union européenne et la Turquie, aujourd’hui dénoncé, stipulait expressément qu’Ankara s’engageait, contre monnaies sonnantes et trébuchantes, à reprendre sur son territoire les migrants atteignant la Grèce. En échange de ces retours, la Turquie de M. Erdoğan a bien touché 6 milliards d’euros d’aide européenne mais, selon les chiffres d’Euractif (juillet 2019), le nombre de réadmissions est resté quasi symbolique. Toujours selon EURACTIF, « durant ces trois dernières années, seulement 1.884 personnes ont été retournées en Turquie dans le cadre de l’accord, dont 357 Syriens, selon des données du ministère de l’Intérieur turc ». On ne prête qu’aux riches, à la Turquie en l’occurrence, alors que la Grèce ne peut compter que sur elle-même pour tenter, tant bien que mal, de maîtriser l’afflux des immigrés que son voisin ottoman lui expédie « généreusement », via la mer Égée.

José Meidinger
José Meidinger
Journaliste - Ancien grand reporter à France 3 Alsace, il passe son temps entre l’Alsace et la Grèce.

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