La première série belge produite par Netflix : une apnée communautaire

Into the night

Into the Night est la première série belge diffusée par Netflix. La plate-forme américaine tente de diversifier l'horizon de ses productions afin de promouvoir l'ensemble des cultures audiovisuelles mondiales. Le plat pays demeurait encore vierge de cette expérimentation, le résultat est catastrophique.

Il ne s'agit évidemment pas d'une critique cinématographique - je n'ai pas cette compétence ni la prétention de la détenir -, bien que le jeu des acteurs soit loin de satisfaire le public, si l'on en croit les commentaires sur les réseaux sociaux.

Il est plutôt intéressant de se pencher sur les personnages incarnés dans cette mini-série post-apocalyptique de six épisodes.

L'histoire tourne autour de la fin du monde causée par des rayons du soleil mortels. Les humains ne peuvent survivre que la nuit - into the night -, on suit donc les passagers d'un vol en direction de Moscou. Départ de Bruxelles sur les coups de minuit. Cette série s'inspire de The Old Axolotl, roman numérique de l'auteur polonais Jacek Dukaj. L'interprétation libre des deux réalisateurs Inti Calfat et Dirk Verheye laissera perplexes les fans du livre.

On découvre ici une histoire haletante mais surtout un portrait fantasmé de la Belgique moderne.

Les dialogues, tout d'abord : pas moins de huit langues sont employées durant la première saison. Français et flamand, mais aussi anglais, italien, turc, polonais, russe, et arabe. Cette tour de Babel audiovisuelle n'apporte aucun élément intéressant à la compréhension de l'intrigue, ce tourbillon procure un sentiment unique de mondialisation express où chacun demeure ancré dans sa communauté.

Les personnages, ensuite, sont des stéréotypes progressistes. Personne n'est désigné comme appartenant à la nation belge, chacun est renvoyé à l'identité qu'il revendique. Il y a le pieux Marocain bagagiste qui récite des sourates avant le décollage, l'aide-soignante d'origine africaine ouverte et généreuse (zoom sur l'immense croix qu'elle arbore autour de son cou), le Turc proxénète au grand cœur qui disjoncte lorsqu'on le traite d'« Arabe », le Flamand raciste, l'Italien autoritaire et grande gueule, le Polonais mécano... Il ne manquait plus que la Wallonne pilote d'hélicoptère torturée et suicidaire après le récent décès de son mari (originaire d’Afrique subsaharienne). Toutes les parties de la nation belge semblent être réunies pour festoyer à plus de 30.000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Évidemment, c'est sans compter sur les machiavéliques forces armées anglo-saxonnes, auteurs de crimes de guerre, qui essayeront de prendre possession de l’aéronef.

Je ne vais pas plus loin dans l'intrigue pour ne pas gâcher le plaisir des futurs téléspectateurs.

Les scénaristes et producteurs donnent l'impression de vouloir cocher toutes les cases de la diversité au détriment de la qualité des dialogues, de la prise de vue ou de l'action. L'objectif est d'obtenir le blanc-seing de Netflix et surtout ses financements pour une diffusion mondiale.

Néanmoins, on peut noter que cette fable et les personnages qui la composent correspondent à l'évolution de la société outre-Quiévrain. Bruxelles - siège des institutions européennes et de l'OTAN - est la capitale d'un État dont le sentiment national est inexistant. Pays neuf, fondé par les puissances européennes au milieu du XIXe siècle, la population est écartelée entre Wallons (francophones) et Flamands (néerlandophones) qui se vouent une haine réciproque. Dans ce cadre, les populations immigrées arrivées fraîchement sur le territoire ne peuvent pas intégrer un projet commun. La conséquence, c'est un communautarisme exacerbé qui mine encore plus la cohésion nationale.

Cette série accumule les clins d’œil aux communautarismes qui hantent l'unité nationale belge. Le public, roi de l'Audimat™, pourra se faire une idée de la société prônée par les progressistes mondialisés. Espérons qu'une seconde saison ne soit pas à l'ordre du jour.

Nicolas Brabis
Nicolas Brabis
Professeur d'histoire

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