Guadeloupe : Macron ou le cynisme en marche
À quoi joue Emmanuel Macron avec la Guadeloupe ? Avec le feu, écrivait Nicolas Gauthier, dans ces colonnes, le 29 novembre. Notre ami évoquait même « un certain cynisme élyséen », s’appuyant sur les confidences d’un conseiller ministériel révélées par France Info.
Cynisme ? Visiblement, c’est le mot. Un mot, d’ailleurs, repris par le président de la République, qui ne manque jamais d’air, ce mercredi, jour du Conseil des ministres. Ainsi, Le Figaro nous apprend que le chef de l’État « valide le débat sur l’autonomie de la Guadeloupe ». « C’est une stratégie politique qui a dérouté celles et ceux qui avaient un agenda plus cynique », se serait même félicité le Président. Il y aurait donc une stratégie. Une stratégie pour quoi faire ? Pour essayer d'apaiser la crise ou pour dérouter les celles et ceux ? Quelle stratégie ? Celle du pourrissement de la situation qui a si bien réussi depuis quatre ans, la crise des gilets jaunes ayant été un modèle du genre ? Celle de l'évitement ? De la stratégie ? On appellera cela plutôt de la tactique à la petite semaine. Cela permet de faire du cabotage, d’écueil en écueil, mais certainement pas d’aborder la haute mer.
Au passage, on notera cette formidable capacité à attribuer à ses adversaires les turpitudes dont on est soi-même frappé. Et on lira avec intérêt le communiqué du député de La France insoumise de La Réunion Jean-Hugues Ratenon. « Macron excelle dans l’art de la manipulation et de la diversion », affirme-t-il. On n’avait pas remarqué. Diversion, notamment lorsque la députée Insoumise Mathilde Panot interroge le gouvernement sur la question essentielle de l’eau. Une question qui resterait sans réponse, selon Ratenon, avec, en prime, le « mépris ».
C’est, d’ailleurs, Christine Kelly qui résume sans doute le mieux la situation, à travers sa tribune vidéo publiée sur le site du Figaro. « La question, aujourd’hui, du Guadeloupéen, c’est de se dire que, lorsqu’on a un taux de chômage aussi élevé, lorsqu’on a une crise sociale aussi forte, on ne comprend pas comment on peut parler d’autonomie. Ils ont envie d’être un département à part entière, pas un département entièrement à part. » Christine Kelly parle de crise sociale, économique, sanitaire, politique, identitaire. Pas institutionnelle ! Une situation qu’Odile de Mellon avait, du reste, très bien exposée dans sa tribune publiée sur Boulevard Voltaire, la semaine dernière.
« Si les Corses veulent leur indépendance, qu’ils la prennent », déclara, en 1996, Raymond Barre. Une phrase provocatrice qui avait fait couler beaucoup d’encre, à l’époque. Mais Raymond Barre n’était plus aux affaires de l’État. Emmanuel Macron, lui, aujourd’hui, y est. Alors, on peut se demander si, à quelques mois de l’élection présidentielle, il est bien sérieux, de la part du garant de nos institutions et de l’unité de la République, de jeter sur la table cette idée d’autonomie. Si l'on devait répondre, par des concessions d'autonomie, à la crise sociale, économique, sanitaire, politique, identitaire de notre pays, la France, et pas seulement celle d'outre-mer, n'existerait plus. On devrait y réfléchir sérieusement avant de confier la maison, pour cinq ans de plus, à un spécialiste des cessions-acquisitions. En tout cas, nos outre-mer méritent beaucoup mieux.
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