Le néo-sultan Erdoğan, l’homme qui rêve de rétablir la splendeur de l’Empire ottoman, fait feu de tout bois.

En Syrie, il a misé sur la chute de Bachar el-Assad et n’a pas ménagé son soutien aux pires islamistes : la plupart des volontaires internationaux de Daech ont ainsi transité par la Turquie, qui était le chemin naturel pour le grand djihad. Prétextant un imaginaire danger terroriste kurde, il a ensuite envahi le nord-ouest et une partie du nord de la Syrie.

En Méditerranée orientale, il s’appuie sur l’occupation illégale du nord de Chypre pour prétendre empêcher la Syrie, le Liban, Israël et la partie libre de Chypre d’exploiter un sous-sol fort riche en gaz. Les intimidations de la marine militaire turque contre les compagnies gazières présentes (comme l’Italien ENI) sont fréquentes et plusieurs tentatives de forages illégaux ont été observées.

En Libye, il profite de la guerre civile qui oppose le très islamiste Sarraj au moins islamiste Haftar. Ce dernier, non reconnu par la communauté internationale bien que régulièrement reçu par elle, était en passe de l’emporter. Erdoğan a proposé son aide à Sarraj, qui l’a bien sûr acceptée. De nombreux miliciens islamistes syriens ont été envoyés sur place, encadrés par des officiers turcs. Ankara a reconnu l’envoi de plusieurs centaines de combattants (il y a même eu un vote du Parlement turc l’approuvant), mais ils seraient près de 6.000 selon certains journalistes, comme Georges Malbrunot. L’offensive d’Haftar a, de ce fait, été arrêtée aux portes de Tripoli.

Si l’on ajoute une présence turque active au Kosovo et en Bosnie, c’est finalement tout le territoire de l’ancien Empire ottoman qui est ainsi quadrillé.

Il est frappant de constater que cette activité se fait dans le sillage de toutes les décisions absurdes ou iniques prises ces dernières années par l’Europe et les États-Unis : soutien aux islamistes bosniaques ou kosovars (albanais, en fait) dans les Balkans, reconnaissance de Sarraj comme gouvernement légitime en Libye, passivité complice sur l’occupation de Chypre et, bien sûr, appui des islamistes en Syrie avec une admirable constance.

Face à lui, un seul homme : Poutine. La Russie est intervenue pour sauver la Syrie d’une victoire islamiste et a laissé partir plusieurs centaines de mercenaires en Libye soutenir Haftar. C’est le fameux groupe Wagner, créé par un oligarque russe proche du Kremlin.

Lors des récents combats qui ont embrasé la province d’Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, occupée par la Turquie et des milices islamistes, Erdoğan a envoyé des troupes en masse pour reprendre le terrain perdu. L’armée russe a méthodiquement contré le sultan en lui imposant ensuite un accord humiliant. La réponse des États-Unis a été de proposer à Erdoğan de lui vendre des missiles Patriot

Mécontent de la tournure prise à Idleb, Erdoğan a envoyé quelques milliers de migrants à sa frontière grecque pour apprendre à ses alliés de l’OTAN de ne pas le soutenir assez. Surprise : la Grèce a résisté, rejoignant ainsi la courageuse petite cohorte des pays d’Europe centrale qui ne sont pas d’accord pour devenir, un jour, islamistes.

Ainsi, le monde méditerranéen est maintenant dominé par la Russie et la Turquie : la roue de l’histoire tourne.

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15 mars 2020 à 13:08

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