[EXPO] Les mille Venise d’Henri Landier
Avec l’exposition « Retour à Venise », Henri Landier nous invite à le suivre dans les campagnes picturales qu’il y mena à de multiples reprises : en 1986, en 1993 ou, plus récemment, en 2022. En 1986, l'artiste exprimait sa découverte de la ville par de grandes sanguines, des trois-crayons sur papier où il apprivoisait son sujet et s’en rendait assez vite maître.
Quand on y songe, quel écueil, Venise, pour un peintre ! Devant un panorama unique, de multiples vues intéressantes, il est facile d’être médiocre, voire faux ; il est tentant d’être bêtement pittoresque. Pour dire : il se vend dans les merceries du monde entier des canevas de Venise ignobles à souhait. Quant à l’art contemporain qui y est imposé par la Biennale et, à temps complet, par la fondation du Français François Pinault, on se contentera d’en souligner la laideur parasitique dans une ville qui eût pu s’appeler… la Bellissime.
Les rythmes de Venise
Ceux qui ont vu, l’année dernière, l’exposition « Douce France » (qui sera visible cet été à l’Alliance française de New Delhi) le savent : jamais de laideur chez Landier. Sous son œil, la beauté de la ville est d’abord rythmique. Lignes des façades et des fenêtres pour les verticales, ligne des quais pour les horizontales ; et les arches des petits ponts viennent donner de la rondeur au tout. Effet de son cadrage qui, loin de donner la priorité au ciel et à l’eau, « privilégie les façades des palazzi et des maisons, les quais et leur population active, les ponts, le mouvement des bateaux sur de courts canaux », écrit Jean-Pierre Guicciardi (Henri Landier, le peintre voyageur). Parfois ce rythme devient légèrement dansant, comme si les édifices eux-mêmes était animés du roulis d’une gondole.
Séjour après séjour, la technique de Landier se modifie. Il y a de grandes aquarelles aux couleurs légères, d’autres plus chargées, presque gouachées (Pause déjeuner à Venise) ; et des huiles (l’hôtel d’Italie, sur le Lido, devient un palais des mille et une nuits…). Certains points de vue, à quelques années de distance, sont travaillés dans un esprit différent. « Sans doute que le peintre va plus loin que l’apparence toujours changeante que nos sens nous communiquent selon l’humeur du moment, parce que l’artiste révèle la nature profonde et immuable des choses », écrivait Landier depuis Venise dans une lettre en 1993.
Tout est motif
« À Venise, j’aurais aimé peindre des quartiers encore plus pauvres, plus déserts, nous dit Henri Landier, à la veille de l’ouverture de l’exposition. Dès qu’on s’écarte des artères touristiques, on est tranquille pour regarder, travailler et il y a des motifs partout. » Ville inépuisable ! Cela est vrai de Venise comme de Montmartre, ajoute-t-il. « Les touristes sont place du Tertre, mais que de coins tranquilles ! Quand je descends à la galerie, je prends la rue Durantin et je descends la rue des Trois-Frères. Il n’y a personne, et que de choses à peindre ! C’est merveilleux. Partout, pour peu qu’on regarde, il y a de quoi peindre. » À 80 et quelques années, le peintre a toujours l’œil en alerte.
• Jusqu’au 7 juillet 2024. Atelier d'Art Lepic, 1, rue Tourlaque, Paris XVIIIe. Du mardi au dimanche, de 14h à 19h. Entrée libre.
• On peut également voir ses gravures à l’Espace Landier, 20, rue des Trois-Frères, Paris XVIIIe.
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