Dans le monde de la comptabilité et de l’audit, il est un principe qui impose la prééminence de la réalité sur l’apparence. Les Anglo-Saxons l’énoncent ainsi : "Substance over form." Avoir l’air de ne sera jamais aussi bien qu’être. Ce principe de bon sens n’a pas réussi à s’imposer partout, témoin nos dernières élections présidentielles où se sont affrontées des baudruches gonflées d’ego hypertrophiés, mais dépourvues des qualités nécessaires pour ce type de poste : culture, écoute, capacité d’anticipation, sens de la décision, éthique de la responsabilité et altruisme. Être élu est devenu un job d’histrion, et tant pis pour les carences d’exécution qui se constatent après le vote. Les médias s’imaginent des faiseurs de roi, et ils le sont sans doute, pour le mauvais et l’encore pire.

Aux États-Unis d’Amérique, Mark Zuckerberg, patron fondateur de Facebook (le plus grand des réseaux sociaux), a recruté pour sa fondation une pointure : Joel Benenson, ancien conseiller à la Maison-Blanche et stratège de l’équipe de campagne de Hillary Clinton. S’ensuivent les bruissements du Net et de la presse, qui y voient ou veulent y voir l’annonce d’une candidature à la prochaine élection présidentielle pour s’opposer à l’actuel président Donald Trump. Autre fait troublant : une nouvelle fonction est en test sur Facebook aux USA, qui affiche sur l’écran des informations publiées par des élus locaux ou nationaux de l’électeur.

Interrogation liminaire : pourquoi avoir choisi celui qui a perdu alors que tout le monde annonçait la victoire de sa candidate, chouchoutée par les lobbys et les médias ?

La démocratie a été terriblement malmenée outre-Atlantique comme ailleurs. Pour dépenser des budgets colossaux, des levées de fonds gigantesques sont organisées ; d’ici à conclure que les plus gros contributeurs s’attendent à retour sur investissement, il n’y a qu’un pas. Le matraquage médiatique ne ressemble en rien à un argumentaire, tout juste une succession de slogans publicitaires : belle façon de faire en sorte qu’un choix citoyen soit éclairé. Le débat démocratique suppose le respect de l’autre et de sa parole, et les coups bas les plus ignominieux pleuvent et se succèdent. Et que dire de la personnalité et du cursus des candidats !

C’est un fait : Donald Trump a réussi à gagner contre les médias traditionnels et l’establishment. L’entrée en lice des réseaux sociaux, des médias qui pourraient être aussi partiaux que les plus traditionnels, doit être analysée comme l’une des façons de biaiser encore plus l’équité et de s’affranchir de la loyauté d’un scrutin. Les parts de marché hégémoniques de Facebook et, dans une moindre mesure, des Twitter, LinkedIn et autres qui me sont inconnus conduisent à la seule conclusion possible : l’univocité des médias de toute nature au service de la bien-pensance risque d’éparpiller, façon puzzle, le peu de démocratie qui reste à nos scrutins. Des marionnettes dont le seul talent est de communiquer brigueront des mandats qu’elles n’ont pas la densité nécessaire pour assumer. L’apparence qui prévaut sur la réalité, en somme. Notre monde est bien malade de cette hyper-communication qui subvertit tous les pouvoirs.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:37.

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08 août 2017 à 10:54

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