Dimanche dernier, les habitants du Kosovo ont élu leurs représentants parlementaires dans la province sécessionniste serbe. Pour la première fois, les Albanais ont placé en tête un pur parti d’opposition, Vetëvendosje! (Autodétermination). C’était à prévoir dans une région où, depuis les bombardements de l’OTAN en 1999, les politiques albanais ont mis la zone en coupe réglée et ont plus brillé par leurs exploits criminels que par leur capacité à faire régner l’ordre et la prospérité. Pour le sociologue albanais Belgzim Kamberi, le Kosovo est « un pays à la dérive contrôlé par des élites prédatrices ».

Le chef de Vetëvendosje!, Albin Kurti, s’est fait élire sur un programme populiste assumé où il promet de lutter contre la corruption, réduire la pauvreté et construire la grande Albanie. La classe politique albanaise est en émoi mais pas autant que Washington qui n’est pas particulièrement bien vu par Vetëvendosje!

Voyant que l’exaspération monte au Kosovo, Washington avait employé les gros moyens pour s’assurer de garder les clefs du pouvoir. Trump a ainsi nommé un envoyé spécial dans les Balkans, Richard Grenell, militant LGBT et actuel ambassadeur américain en Allemagne, pour accélérer les négociations entre Serbes et Albanais. Matthew Whitaker, ex-procureur général des États-Unis, s’est, lui, précipité sur place pour soutenir le Parti démocratique du Kosovo (PDK). Le patron du PDK, Kadri Veseli, a même diffusé des photos de Whitaker et de lui-même dans un Burger King pour montrer que son américanisme est sincère et chevillé au corps. Selon l'Albanian Daily News, son parti est allé jusqu'à payer 110.000 dollars les services de Sam Nunberg, ex-conseiller politique de… Donald Trump. Le département d’État américain, quant à lui, a nommé un nouvel envoyé spécial sur place, Matthew Palmer, dont le but est « d’accélérer l’intégration des Balkans dans les institutions atlantistes ». Le message est clair.

L’historien albanais Olsi Jazexhi affirme que le Kosovo est un « protectorat américain » et on ne peut pas vraiment lui donner tort. Comme en Ukraine, le peuple élit des têtes nouvelles mais la politique reste la mêm, puisque c’est Washington, en réalité, et non le peuple, qui tire les ficelles.

Trump joue grossièrement son va-tout. Il veut conclure un accord rapide entre Serbes et Albanais afin que la communauté internationale reconnaisse enfin l’indépendance du Kosovo, créature américaine. Les Serbes doivent faire preuve de patience et de détermination car Trump est précisément un impatient. Pour le défenseur de America First, rien ne garantit que ce jeu ne l’amuse réellement. Après vingt ans d’échecs, et à défaut d’un accord rapide, il pourrait faire un jour comme en Syrie et quitter brutalement le Kosovo. Les cartes seraient soudainement complètement rebattues. Les Albanais craignent terriblement ce scénario. Les Serbes, eux, en rêvent.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 19:45.

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19 octobre 2019 à 20:23

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