DVD : La dernière balle à pile ou face, de Piero Pierotti et Tire, Django, tire, de Bruno Corbucci

western

L’un des avantages du western, au-delà des codes visuels du genre – chevaux, chapeaux et flingots –, consiste à permettre à tout un chacun de le décliner à sa guise. Ainsi, qu’est-ce que le Rio Bravo de Howard Hawks, si ce n’est une tragédie antique, avec unité de lieu et de temps ? À l’heure où la majeure partie des fleurons du western européen ont été réédités en DVD, faut-il encore compter sur les artisans de chez Artus films, désormais bien connus de nos lecteurs, pour aller dénicher des pépites jusque-là oubliées.

La dernière balle à pile ou face, de Piero Pierotti, pour commencer, qui, sous des allures de western, n’est jamais rien d’autre qu’un film policier en plein air. Journaliste de profession, Piero Pierotti, dont c’est là l’unique western, était surtout spécialisé dans le péplum et le film de cape et d’épée, d’où le côté bondissant et chorégraphié des traditionnelles bagarres de saloon. Pourtant, malgré des touches d’humour parfois un peu trop appuyées – quoique la critique de ligues de vertu d’alors n’ayant rien à envier en matière d’hypocrisie à leurs actuelles descendantes demeure hautement réjouissante –, le film glisse peu à peu dans un tout autre registre, plus sombre celui-là.

Film policier, tel que plus haut écrit, mais film de machination surtout, femmes vénéneuses et manipulatrices à l’appui, sans oublier un zeste d’érotisme troublant fort bien venu – la poitrine de la sublime Edwige Fenech, ce n’est pas rien… – et il sera, à l’évidence, constaté que le metteur en scène n’a pas fait ici acte de féminisme militant. On ne divulgâchera pas la fin, mais sachez qu’elle couronne de très émouvante façon un film qui tient haut la main toutes ses promesses. On savait travailler, à l’époque.

Tire, Django, tire, de Bruno Corbucci, Ce qui est, d’ailleurs, assez logique : si son frère, l’immense Sergio Corbucci, est à mettre, en termes d’art westernien, sur le même piédestal que les deux autres Sergio, Sollima et Leone, Bruno, scénariste de talent, est surtout passé derrière la caméra pour tourner ces gaudrioles dont les Italiens étaient si friands, au siècle dernier. En effet, il n’est pas donné à tout le monde de filmer et, surtout, d’aller voir des films tels que Deux Trouillards pistonnés et Quand les femmes font ding dong.

À l’instar de Piero Pierotti, il s’agit là de l’unique western de sa filmographie. Même si maniant un certain humour, voire un humour certain, l’ensemble demeure de haute tenue et n’a rien à voir avec les pitreries flatulentes de la série des Trinita qui achèveront de tuer le genre. Là, un pistolero doit ramener de force chez ses parents un gamin en train de verser dans la délinquance. D’où une longue chevauchée durant laquelle le voyou démontre qu’il ne manque pas de ressources ni son garde-chiourme de naïveté. Cette alliance des contraires, ce couple infernal : c’est simple, ça aurait pu être un film de Francis Veber, La Chèvre, par exemple. Un film sans prétentions, mais qui n’est pas sans charme ; surtout celui de la sublime Erika Blanc qui, en quelques courtes scènes, parvient à illuminer l’écran.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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