Douce France : la chapelle Saint-Hilaire au cœur du Comtat Venaissin
Tout concourt à faire revivre la passion des Français pour leur patrimoine en ce bel été : articles, visites, restaurations, festivals, émissions de télévision. Alors, profitant de cet engouement sous le soleil, je voudrais vous parler d’un coin de Provence cher à mon cœur : la chapelle Saint-Hilaire.
Entre Orange et Carpentras, à Beaumes-de-Venise, là où la terre, le soleil et l'homme se sont alliés pour offrir un vin de muscat sans pareil, sur le plateau des Courens, la chapelle Saint-Hilaire dresse sa fière silhouette face au temps. Depuis 1.500 ans, elle a vu le Comtat Venaissin changer ; elle a connu des dizaines d’invasions, des guerres et des exodes. Elle a vu passer "triomphe après défaite", comme l’écrit Kipling. Elle a connu la crise de la papauté, l’annexion par les révolutionnaires, et aujourd’hui l’invasion silencieuse de la Provence par des gens qui sont nos hôtes à notre corps défendant, et qui pourtant semblent nous détester.
La chapelle Saint-Hilaire est une splendeur de pierre, dont l’architecture simple et droite, sur une hauteur, incite l’âme au dépouillement et au recueillement. Elle s’élève parmi les oliviers et les vignes, et domine sans prétendre évidemment supplanter les Dentelles de Montmirail, toutes proches, ciselées comme un camail dans un ciel qu'on croirait venu tout droit d'Italie avec les papes et leur cortège de cardinaux, et encore moins avec le voisin du dessus, le mont Ventoux, ce seigneur sans partage qui fait pleurer le vent et sur le sommet duquel les cigales n'osent s'aventurer.
Je l’ai trouvée presque en ruine. Malgré l’accord de Mgr Cattenoz, archevêque d'Avignon, qui est aussi, selon la tradition, évêque d'Apt, Cavaillon, Carpentras, Orange et Vaison - car nous sommes ici en terre chrétienne depuis toujours, dirais-je -, pour lui rendre, patiemment, sa splendeur, j’ai dû faire face à la lourdeur administrative de l’État, au refus des Bâtiments de France et, il faut bien le dire, à la contrainte de devoir porter à deux, avec mon épouse, un projet que les moines du VIe siècle conduisirent en communauté.
Jusqu’à maintenant, rien de tout cela n’a suffi à nous décourager, et la Providence nous a souvent adressé de discrets clins d’œil pour nous montrer que nous étions sur la bonne voie. Ainsi, nous avons été aidés par plusieurs bénévoles, dont une troupe de scouts dont je n’avais jamais entendu parler et qui est venue spontanément nous offrir ses services !
Aujourd’hui, la chapelle est plus belle, j’allais dire : que jamais. Certainement pas, mais en tout cas plus belle que depuis longtemps. Elle attend des visiteurs, mais aussi des bienfaiteurs. Si vous passez par la Provence, nous serons heureux de vous montrer ce que nous faisons. Et si vous n’y passez pas, du moins pas cet été, peut-être vous souviendrez-vous que notre patrimoine n’est rien sans notre détermination à le maintenir vivant. Ce qui sépare, plus que jamais, les hommes debout des hommes rampants, c’est le fil continu de la transmission.
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