Cow-boys un jour, cow-boys toujours : les Doobie Brothers remontent à cheval !

Il fait beau. C’est l’été. Oublions donc les tourments du monde, ne serait-ce qu’un moment. Les vacances approchent. Quel meilleur plaisir que d’écouter de la bonne musique en voiture ? Car la musique aide aussi à voyager loin et à peu de frais. Vous êtes sur les routes bretonnes et, pourtant, il suffit du dernier album des Doobie Brothers, Walk This Road, pour se croire en Californie. De cette musique « West Coast », Georges Lang, l’indéboulonnable « Monsieur rock » de RTL, écrivait dans le livret d’un copieux coffret de quatre CD, California, qui lui était tout dédié : « Si vous n’êtes pas au volant, fermez les yeux et rêvez à ces grands espaces, à ces plages de sable fin et ces palmiers, à ces cactus géants, ces Joshua Trees du désert de Mojave. »
Quand l’Amérique était encore fréquentable…
L’âge d’or de la West Coast, ce sont donc les années 70. Soit une époque durant laquelle le « Golden State » est encore à peu près fréquentable. Celle où la gauche n’est pas devenue wokiste mais libertaire et insouciante, avant de se transformer en secte de l’ordre moral. Bref, cette fichue gauche, c’était mieux avant. Dans son essai, Soft rock, Summer Breeze & California Grooves, le très érudit Arnaud Choutet rappelle : « Au début des 70s, suite aux turbulences sociales et politiques de la décennie précédente, le rock se fragmente et resurgit en Californie sous une forme légère, soignée et harmonieuse, enracinée dans la country et le folk. »
C’est l’époque d’America, de James Taylor, des Eagles, de Crosby, Stills, Nash & Young : soit une pop distinguée aux chœurs angéliques et aux mélodies aériennes. Les snobs affirment alors, dédaigneux, qu’il s’agit de « musique facile ». Bande de béotiens qui devraient savoir que plus ça a l’air simple d’extérieur et plus c’est complexe à l’intérieur. D’où des mois passés en studio. Faire et défaire pour finalement recommencer, encore et encore, pour mieux tenter d’atteindre l’excellence. Les Doobies Brothers qui nous occupent aujourd’hui étaient de cette espèce désormais quasiment disparue.
En France, peu de gens connaissaient ces « frères pétard »…
Cette formation, peu connue en France, fut à l’époque une véritable institution américaine. Fondée en 1970, elle persiste à durer, donnant, de temps à autre, des concerts commémoratifs, lorsque les vieux os de Michael McDonald, Patrick Simmons, Tom Johnston et John McFee, ses membres survivants, le leur permettent. Leur plus grand succès, Long Train Runnin’, est l’un des rares à avoir été célébré en nos contrées ; quoique le reste de leur discographie était malgré tout connu ici par quelques amateurs éclairés, pour lesquels le simple énoncé de ces deux mots, « Doobie Brothers », faisait un peu figure de mot de passe entre initiés.
Pour la petite histoire, rappelons qu’en argot californien, « doobie » signifie « joint ». Nous avons donc affaire à de sacrés « frères pétards ». Lesquels ont néanmoins gardé tous leurs esprits, la vente de quarante millions de disques dans le monde n’étant pas exactement le signe de cervelles assoupies. D’ailleurs, et ce, contrairement aux Eagles plus haut cités, au mode de vie orgiaque, avec partouzes de groupies dès le petit déjeuner, les Doobie étaient des gens sans histoire, des Américains tranquilles. Et avec ce dernier album, on sent bien que ça carbure encore, sous les Stetson. En effet, après des années 80, période à laquelle les synthétiseurs devenaient chez eux de plus en plus envahissants – un comble, pour un groupe de country à l’ancienne –, ce Walk The Road renoue divinement avec la tradition. Après tout, les harmonicas, les violons, les cuivres et les bonnes vieilles guitares, acoustiques comme électriques, ce n’est pas fait que pour les chiens et autres coyotes à foie jaune.
D’où ces dix chansons – il faut parfois savoir faire concis –, portées par une indubitable grâce mélodique, des voix chaudes et puissantes et des arrangements à l’ancienne, enfin débarrassés de leurs oripeaux électroniques. Bref, ça fait toujours plaisir de constater que le passé peut encore avoir de l’avenir. Pour s’en convaincre, écoutez la chanson éponyme, interprétée avec l’immense Mavis Staples qui, à 86 ans passés, n’est plus exactement la perdrix de l’année.
En attendant, la joyeuse bande, même si plus tout à fait très jeune, s’apprête à repartir pour une nouvelle tournée mondiale qui devrait passer par l’Europe. Mais malheureusement pas par la France. Les ingrats !

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6 commentaires
Long train running, la chanson emblématique des feux de camp en colo. Scène culte dans « Nos jours heureux » où le timide guillaume prend la guitare sèche et enflamme ses copains ados. Les filles craquent pour lui, le musicos.
De la musique de supermarché…
Ça sent la tunique, le jean sans âge, les clarks ou boots , quand le sexe était sûr et les motos dangereuses; ltout le contraire d’aujourd’hui !
On peut aussi écouter notre immense Bill Deraime! Ceux qui connaissent apprécieront, quelle chance pour les autres de le découvrir !
Help ! Impossible de me rappeler quel produit (une boisson gazeuse non alcoolisée, je crois) s’était vu attribuer « Long Train Running » comme support sonore dans une pub’ magistrale.
Et comme « musique facile », on peut en parler: le thème dans sa VO est interprété par pas moins de trois guitares rythmiques qui, loin de se mélanger les pinceaux, innovent complet dans l’arpège. Technique qui constituera un peu leur marque de fabrique et que l’on retrouve, entre autres, dans le très « donovanien » et envoûtant « Toulouse Street », de l’album éponyme.
A l’instar d’autres formations comme Canned Heat, les Jointés se produisent de temps en temps lors de croisières relax où se mêlent musiciens et fans plutôt fortunés, tandis que la tournée de Blue Oyster Cult croisait par Paris en ce début de mois. Bref, des gars pas foncièrement concernés par la loi sur la fin de vie.
Par contre, la fraîcheur des voix, c’est plus trop ça, les années rabotant les aigus. On imagine mal Sting chantant « Roxane » ou Robert Plant « Whole lotta love » dans la tonalité originale, et la pièce que nous offre notre ami Nicolas n’approche que de loin (si j’ose dire) les explosions vocales de « Listen to the music » ou « Jesus is just allright ». Mais bon, on y retrouve l’esprit blues dont le tout simple et fort peu connu « Chicago » nous avait donné un aperçu.
On ne peut dissocier la musique de son contexte ni de son contenu.
Les festivals estivals ;) regorgent hélas, de ses anciennes (!) gloires, présentées toutes les sauces, bah oui le rock gériatrique paie et rapporte.
Nous n’aurons pas l’indécence d’écrire ici sur les »sosies » , clones et autres pousse-mégots plus vrais que nature, qui reprennent cette sacrée musique.
C’est l’arbre, synthétique ;), qui cache une forêt… désertique.
Hi ha, criaient les cowboys
IA, répond l’écho
De la musique de supermarché…