Covid et obésité : on en parle ?

Obese

On n’est plus obèse, aujourd’hui, mais « en situation d’obésité ». La périphrase est moins lourde à porter que le mot, sans doute. Il ne faut pas stigmatiser, pas ajouter la douleur morale à la douleur physique.

Dans l’air du temps, le surpoids et l’obésité semblent devenus des maladies qui s’attrapent. Pas contagieuses, pourtant, quoique… Cela touche, aujourd’hui, des familles entières.

Il aura ainsi fallu que le gouvernement décide d’ouvrir la vaccination aux personnes « en situation d’obésité » de 18 à 49 ans pour qu’on se décide enfin à énoncer cette vérité que certains, jusqu’ici, susurraient à peine : quand ils ne sont pas très âgés, les morts du Covid-19 sont très majoritairement obèses.

Alors, on l’a entendu et lu ce week-end, entouré de toutes les précautions d’usage pour ne pas froisser ces populations en souffrance : les autorités, dont « la Haute Autorité de santé (HAS) dans son avis du 16 avril 2020, font figurer les personnes en situation d’obésité (dès IMC égal ou supérieur à 30 kg/m2) parmi les populations particulièrement vulnérables à la Covid-19 ». Aborder enfin cette question pour ce qu’elle « est primordiale pour la gestion de l’épidémie », disent tous ces pompeux organismes. Il convient dont d'« alerter sans stigmatiser » et une fiche a été éditée à destination des soignants afin d’« accompagner les professionnels de santé dans leur prise en charge des personnes en situation d’obésité compte tenu de leur fragilité spécifique ».

Il aura donc fallu quinze mois pour « cracher le morceau », si je puis dire, à savoir que la prévalence des personnes obèses dans les services de réanimation est un casse-tête pour les hôpitaux, obligés d’adapter leur matériel.

Des soignants de l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, témoignent ainsi, pour France Info : « On s’est retrouvés avec des patients qu’on ne pouvait pas lever », dit une infirmière. « Même à plusieurs soignants, ça devenait trop dangereux. » Alors, elle s’initie au maniement du nouveau lève-malade qui peut lever jusqu’à 320 kilos. Un outil indispensable pour cette femme « confrontée désormais à des patients qui pèsent jusqu’à 180 kg ». L’hôpital a donc investi 50.000 euros dans ce lève-malade et un « fauteuil bariatrique très large » pour des personnes qui ne peuvent tenir dans un fauteuil normal. « Il s’agit de fauteuil vraiment adapté, en plus il roule. Il permet vraiment d’améliorer la capacité pulmonaire parce que vous allez forcément améliorer vos échanges gazeux en étant assis qu’en étant alité ou assis au lit », dit-elle. D’autant que la situation physique de ces personnes ne permet pas de les retourner sur le ventre comme on le fait pour les autres malades Covid en réanimation.

La vérité de cette pandémie surgit ainsi au fil des commentaires : « Les hôpitaux s’adaptent depuis un an à recevoir des malades obèses, mais il reste encore de nombreux aménagements à réaliser, notamment dans l’imagerie », dit France Info. Il faut créer des tubes d’IRM et des tables de scanners spéciaux car ils ne peuvent, pour l’instant, « avaler » ni supporter des patients de 160 kg.

Et alors ? Et alors rien. On ne dit rien parce qu’il ne faut pas stigmatiser. On ne dit pas que cette pandémie est le résultat de notre mode de vie ; celui de la sédentarité, de la malbouffe, de la pollution, des milliers d’heures passées vautré devant des écrans, des ravages du sucre et des perturbateurs endocriniens.

Va-t-on enfin dire aux gens qu’ils sont responsables de leur santé ? Que la façon dont certains se nourrissent et nourrissent leurs enfants est criminelle ? Bien que les causes médicales ne dépassent pas 1 % des cas, l’obésité infantile touche, aujourd’hui, 42 millions d’enfants dans le monde, avec une prévision à 70 millions en 2025. En France, 17 % des enfants âgés de 6 à 17 ans sont en surpoids, dont 4 % d'obèses, et ce sont les données de 2016 !

Alors, on continue comme ça ?

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Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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