Commission parlementaire TikTok : enquête vitale ou cirque républicain ?

Les quatre influenceurs se sont succédé, dans une ambiance de cours de récréation, si ce n’est de culture du vide.
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Le 13 mars dernier, l’Assemblée nationale a approuvé la création d’une commission d’enquête visant à étudier l’impact psychologique du réseau social TikTok sur les mineurs et, par conséquent, à trouver des solutions pour protéger les enfants des effets néfastes du numérique. Pour mener cette enquête, la commission a convoqué de nombreux créateurs de contenu afin de les questionner sur leur activité. Ce mardi 10 juin étaient auditionnés des influenceurs très suivis sur le réseau social chinois et qualifiés de « problématiques ». Passaient « à la barre » le créateur de contenu pour adulte et très décomplexé acteur porno AD Laurent ainsi que Julien et Manon Tanti, candidats emblématiques de télé-réalité, pointés du doigt pour avoir mis en scène leurs très jeunes enfants sur les réseaux sociaux, notamment pour des placements de produits, l’influenceur Nasdas, tristement connu pour ses contenus chocs contenant, entre autres, des remarques sexistes, de la nudité ou encore de la violence verbale, et, enfin, Alex Hitchens, un influenceur masculiniste. Ces profils n’ont pas été sélectionnés au hasard : ce sont les noms qui sont le plus ressortis lors de la consultation citoyenne à ce sujet, lancée par l’Assemblée.

Nul ne semble prendre la mesure de l'importance de la question soulevée

Selon le site officiel de l’Assemblée nationale, cette commission s'est fixé pour objectif d’étudier les dispositifs de « captation de l’attention » utilisés par TikTok et leurs effets psychologiques, notamment sur les pensées suicidaires, le comportement des utilisateurs et les relations sociales, en particulier chez les mineurs. Il vise aussi à analyser les risques liés à « l’addiction numérique » et à l’exposition des jeunes à des contenus dangereux sur la plate-forme. La commission prévoit également de proposer des mesures concrètes pour protéger les mineurs, notamment en matière de régulation des contenus, de « sécurité numérique » et de modération des pratiques. Enfin, elle souhaite comparer entre TikTok et sa version chinoise Douyin sur les algorithmes, les systèmes de « vérification de l’âge », les contrôles de temps d’usage, la nature des contenus et l’impact sur le bien-être des jeunes.

Les quatre influenceurs se sont donc succédé, il faut bien le dire, dans une ambiance de cours de récréation, si ce n’est de culture du vide, ne mesurant visiblement pas l'importance du sujet évoqué. Le premier entendu justifie son contenu hypersexualisé au nom de la « liberté sexuelle ». Répondant à une question sérieuse et grave, il affirme que si sa fille désirait proposer du contenu sur les plates-formes Mym et OnlyFan (des plates-formes en ligne qui permettent aux créateurs de contenu de publier des photos, vidéos ou messages accessibles uniquement par abonnement payant ; les contenus sont, pour la plupart des contenus à caractère sexuel voire pornographique), il ne l’en empêcherait pas. On l'a ensuite entendu raconter une blague à caractère sexuel, faisant rire un député installé en face de lui.

Ensuite, Manon et Julien Tanti expliquent, quant à eux, que leur présence sur les réseaux n’est « que du kiff » et tombent des nues lorsque le président de la commission leur reproche d’utiliser leurs enfants à des fins commerciales, en l’occurrence pour des placements de produits, sans avoir mis en place de contrat de mannequinat.

L’influenceur Nasdas, de son côté, répond aux élus de la République avec un ton des plus désinvoltes, voire injurieux : « Ça vous fait sourire, monsieur le député ? » Et pour finir, Alex Hitchens, après avoir prêté serment de la main gauche, quitte son audition au bout de quinze minutes (contre les quarante-cinq prévues) sans prévenir, car exaspéré des questions qui lui étaient adressées. Et au milieu de cette mascarade, les députés, fiers de leur commission, se prêtent au jeu, avec de grands airs sérieux. Sur les YouTube et X, les internautes ne cessent de relever le caractère grotesque de cette séquence médiatique, la qualifiant de « divertissement de l’année » ou déclarant avoir passé « trois heures à mourir de rire ».

Rappelons tout de même qu'une personne convoquée par une commission d'enquête de l'Assemblée nationale ou du Sénat est tenue d'y répondre et qu'elle jure de dire la vérité, sous peine de poursuites pénales. Mais en voyant ce cirque qui contribue à désacraliser cette institution républicaine qu’est une commission d’enquête, comment, désormais, reprocher à un homme d’affaires de grande ampleur, tel que Pierre-Édouard Stérin, d’avoir refusé, en invoquant des questions de sécurité, d'être auditionné « en présentiel » par une commission d'enquête de l'Assemblée nationale ?

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Raphaelle Claisse
Journaliste stagiaire à BV. Etudiante école de journalisme.

Vos commentaires

15 commentaires

  1. Pour mr sterin pas de commission parlementaire en vidéo pour les influenceurs aucun problème. Cela ne voud choque pas?. Et cet influenceur qui quitte en pleine vidéo conférence la commission..que dit LFI..bizarre on en parle pas dans les médias.

  2. L’assemblée nationale et le sénat peuvent faire des milliers d’enquêtes puis ensuite des milliers de loi, mais faut il encore qu’elles soient appliquées et surtout les lois concernant les viols, les vols, les agressions et les meurtres! Bref ils veulent légiférer ensuite mais leurs copains les juges ne font rien appliqués sauf bien sûr le minimum. Moi je dis à travail minimum salaire minimum pour les juges!

  3. Je me méfie de tik tok, je n’ai qu’insta comme RS, quand je vois certaines vidéos sur tik tok je me pose vraiment des questions !

  4. Les commissions d’enquêtes de l’Assemblée remplacent avantageusement « au théâtre ce soir »… ou « la piste aux Etoiles », les députés dans le role du clow blanc et les « auditionnés » dans celui de l’Auguste. Et chacun sert la soupe à l’autre… Il manque jute les bruitages de rires comme dans les émissions américaines.

  5. Et l’influenceur Boyard qui traine en permanence dans les lycées et universités auprès parfois de mineurs, il passe quand dans cette commission ?

  6. Quelle est l’utilité d’une telle commission ,les contenus de ces sites parlent d’eux-mêmes .

  7. Une autre expression anglophone « brain rot » traduit parfaitement l’exposition prolongée à ces réseaux, à savoir, le pourrissement du cerveau.

  8. Intéressant mais cette commission d’enquête a omis d’interroger un Tik tokeur réputé à la santé mentale de plus en plus suspectée de déficience.. initiales E.M

    • Cette commission serait « intéressante » ? ! …
      Que qui se moque t-on ? … La FRANCE est en feu et à sang mais eux font des « commissions parlementaires » ! ? …

      Ils nous coûtent un pognon de dingue et ils rigolent entre eux ! … ELLE est pas belle la VIE ! ? …

    • « Santé mentale déficiente », dites-vous ?
      Je vois que je fais des émules avec mon « empêchement » !

  9. Rappelons tout de même qu’une personne convoquée par une commission d’enquête de l’Assemblée nationale ou du Sénat est tenue d’y répondre , sauf quand on s’appelle Alexis Kohler … République bananière !

    • Ecrit comme « ça », ça fait peur une « commission d’enquête » ! …
      Entre « ça » et les « conseils de défense » de macron, dormez tranquille, la 7ème Compagnie est en action ! …

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