Cinéma : Parasite, une Palme d’or méritée !

Cinéma : Parasite, de Bong Joon-ho, Palme d’or de Cannes 2019
Cet article vous avait peut-être échappé. Nous vous proposons de le lire ou de le relire.
Cet article a été publié le 21/06/2019.

À l'occasion de l'été, BV vous propose de redécouvrir les films que nous avions aimés lors de leur sortie au cinéma. Aujourd'hui, Parasite, Palme d'or 2019.

Ki-woo vit dans un quartier insalubre avec sa sœur et ses parents. Tous au chômage, gagne-petit, leur passe-temps favori consiste à pianoter sur leurs smartphones et à profiter du signal Wi-Fi de leurs voisins, quand ils ne sont pas occupés à plier les cartons à pizza des livreurs du coin pour arrondir les fins de mois.

Un jour, pourtant, un ami de Ki-woo le recommande auprès de la riche famille Park afin de donner des cours d’anglais à leur fille. Muni d’un diplôme bidon, le jeune homme est rapidement embauché par la maîtresse de maison, gagne sa confiance et introduit peu à peu chez les Park chaque membre de sa propre famille. D’abord sa sœur Ki-jung, qui devient le professeur de dessin du fils, puis son père, qui est embauché en tant que chauffeur après que Ki-jung a piégé son prédécesseur renvoyé pour une faute qu’il n’a pas commise, et enfin sa mère, qui prend la place de la gouvernante écartée injustement de la même manière…

Une fois n’est pas coutume, la Palme d’or du dernier Festival de Cannes est méritée. Pour cause, la lutte des classes telle que nous la décrit Parasite, du Sud-Coréen Bong Joon-ho, est suffisamment éloignée du schéma occidental pour pouvoir contenter le plus grand nombre de spectateurs français. Ici, point de clivages géographiques à la Christophe Guilluy ni de tension autour de la mondialisation ou de la question migratoire. Avec la virtuosité de mise en scène dont il a toujours fait preuve par le passé, le réalisateur orchestre un huis clos malsain où les rapports de classe transparaissent innocemment, par petites touches, à travers les répliques incisives de cette famille bourgeoise importunée par l’odeur des pauvres (on pense, évidemment, aux « sans-dents » « qui ne sont rien ») aussi bien qu’à travers les actes répréhensibles de la famille de prolos. Ceux-là, nous dit Bong Joon-ho, acculés par un système qui incite à tout instant aux comportements obséquieux et arrivistes, ne sont guère plus moraux que ceux qu’ils envient et jalousent secrètement. C’est, d’ailleurs, entre pauvres que l’essentiel des conflits se jouera dans la seconde partie du film, les tenants du système étant épargnés jusqu’à un certain point par l’agitation sociale dont ils sont responsables. En cela, le récit ne peut déboucher que sur une forme de statu quo et mettre à mal les aspirations du personnage principal, qui rêve d’accéder à la richesse et – pourquoi pas, nous dit-il à la fin – de se payer, un jour, la maison des Park.

Cette mise en relation des riches et des pauvres en huis clos n’est pas sans évoquer Gosford Park, de Robert Altman, ou La Cérémonie, de Claude Chabrol. Plus proche du second que du premier de par son dénouement, Parasite partage cependant l’ironie d’Altman, qu’il tourne carrément au vitriol, et nous offre plus de deux heures jubilatoires savamment rythmées durant lesquelles les personnages rivalisent de bassesse et de mesquinerie sans jamais gaver le spectateur. On sort de la salle avec l’envie de revoir le film pour mieux en analyser toutes les subtilités.

À voir entre amis ou même en famille.

5 étoiles sur 5

https://www.youtube.com/watch?v=-Yo_lxZ6Z0k&t=2s

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 28/08/2023 à 13:52.
Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

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