« Ma pensée est que si, petit à petit, doucement, les musulmans de notre empire colonial du nord de l'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement nationaliste analogue à celui de la Turquie : si nous n'avons pas su faire des Français de ces peuples, ils nous chasseront. Le seul moyen qu'ils deviennent Français est qu'ils deviennent chrétiens. » Prononcés il y a plus d’un siècle, ces mots du père de Foucauld résonnent encore étrangement avec notre actualité. Charles avait côtoyé au désert et pendant des années les populations musulmanes d’Afrique du Nord et il en retirait un constat visionnaire : si la France n’apportait pas la civilisation chrétienne à ces peuples, ceux-ci se soulèveraient contre elle.

Dans une France qui a renié ses racines chrétiennes, dans certaines banlieues où les forces de l’ordre ne peuvent plus pénétrer, ces mots prennent tout leur sens. L’ermite du désert avait tout compris.

Rien ne prédestinait pourtant Charles de Foucauld à porter la France et ce qu’elle a de plus précieux selon lui, sa civilisation chrétienne, aux musulmans d’Afrique. De sa jeunesse fastueuse à son ermitage de Tamanrasset, il y a un long chemin de renoncement, de grandes expéditions en Afrique et surtout une fascination immense pour le désert.

Élevé par un grand-père trop indulgent pour cet orphelin éprouvé dès son premier âge, Charles est d’abord un enfant et un adolescent comme les autres : peu porté à l’effort et au travail, il leur préfère les amusements d’une vie de bohème. C’est pourtant un élève doué, qui passe son bac à quinze ans et intègre Saint-Cyr en 1876 (promotion de Plewna). Les murs de l’École spéciale militaire, tout comme les uniformes dans lesquels il ne rentre plus, sont trop petits et trop austères pour lui : il donne de grandes fêtes pour tromper son ennui. À l’École de cavalerie de Saumur, on le voit se promener au bras de femmes légères. Il est bientôt renvoyé de l’armée et écume les plaisirs de la vie.

À vingt-trois ans, il est donc de ceux qui ont tout vu, tout essayé. À l’instar de notre jeunesse contemporaine, il a vécu sans foi ni loi et n’en garde qu’une amertume profonde qui lui ronge l’âme : « Un vide douloureux, une tristesse que je n’avais jamais éprouvée alors, me revenait chaque soir lorsque je me retrouvais seul », écrira-t-il.

Il aurait pu en rester là, mais c’était sans compter la fougue et la passion qui l’animaient depuis toujours : en ouvrant un journal, il apprend que son régiment est engagé dans des combats en Algérie. Épuisé par une vie inactive, il ne résiste pas à l’appel de l’aventure et demande sa réintégration dans l’armée. En Algérie, le fêtard se révèle un soldat et un chef. Séduit par le désert, il choisit d’y rester. Il quitte à nouveau l’armée, mais cette fois pour la rudesse du Sahara.

Il s’était adonné jusqu’au bout à sa vie de plaisir ; cette fois, il se plonge en Dieu et se fait moine. C’est ainsi qu’on le voit vivre dans le désert parmi les musulmans. Loin de cacher sa foi, il décide de prêcher par l’exemple. Il parvient même à susciter l’admiration de certains.

Canonisé ce dimanche 15 mai à Rome, il nous est désormais donné en exemple : l’exemple pour nos jeunes d’une vie arrachée à la médiocrité, l’exemple pour nos compatriotes d’un enfant de France qui mesure la richesse de son héritage et brûle de le transmettre. Que la France se réjouisse donc en ce jour, c’est un peu elle qui est mise à l’honneur à travers le père de Foucauld !

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14 mai 2022 à 17:45

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21 commentaires

  1. La promotion de St Cyr existe déjà! Il s’agit de celle de 1941/1942 quand St Cyr était à Aix en Provence.

  2. suite « ils peuvent se battre avec un grand courage pour la France, par sentiment d’honneur, caractère guerrier, esprit de corps, fidélité à la parole […] mais d’une façon générale, sauf exception, tant qu’ils seront musulmans, ils ne seront pas français, ils attendront plus ou moins patiemment le jour du mehdi, en lequel ils soumettront la France. » Charles de Foucauld extrait d’une lettre écrite quatre mois avant sa mort.

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