Barkhane, c’est fini

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« Le président de la République a annoncé ce jour sa décision de retirer la force Barkhane du territoire malien. » Ainsi commence l’ordre du jour du chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard.

Alors que l’annonce d’un départ du Mali se précisait, le Centre d'études stratégiques de l'Afrique* publiait, fin janvier, son rapport 2021 sur la violence terroriste où l’on constatait que, bien que Barkhane fût encore au maximum de son dimensionnement en juin 2021 et que Takuba montait en puissance, les violences islamistes au Sahel connaissaient une augmentation sans précédent de 70 % sur un an. Sans exclure que les rumeurs de retrait bruissant depuis début 2021 aient pu galvaniser des groupes armés de tous poils agissant sous couvert islamiste soucieux d’étendre leurs territoires, ce piètre résultat obtenu malgré l’admirable engagement de nos soldats opérant avec des moyens à la fiabilité incertaine dans un environnement politique fantasque et un contexte général de plus en plus hostile semble légitimer l’actuel désengagement français, soit qu’il l’ait causé, soit qu’il le justifie a posteriori.

Sans jamais cesser de penser aux 58 militaires français tombés dans la zone, force est de constater que le principe même de Barkhane vouait cette opération aux pires difficultés dans la durée. Le conflit sahélo-malien ne saurait en effet se limiter à la neutralisation de groupes armés terroristes (GAT) dont les intérêts très terre à terre tournent souvent soit autour de trafics de biens ou de personnes, soit autour de l’éternelle opposition entre éleveurs nomades et agriculteurs sédentaires, soit autour de problématiques ethniques transfrontalières, que ce soit avec les Touaregs de retour de Libye après la chute de Kadhafi ou avec les Peuls, peuple aux structures sociales complexes de 35 millions d’individus répartis sur 15 pays. Ainsi, quatre profils de recrutement de ces derniers par les GAT se dégagent : « Les Peuls ayant rejoint le MUJAO pour contrer l’hégémonie touarègue ; ceux qui se considèrent comme exploités par les castes supérieures ; les Téréré (voleurs de bétail peuls) motivés par des facteurs économiques ; et enfin [ceux motivés par, NDLR] l’accentuation des tensions intercommunautaires (massacres de Peuls et amalgame entre Peuls et terroristes). »

Un rapport de mai 2018 pour le Centre FrancoPaix de l’Université du Québec** détaillait ces conflits inter-peuls ravageant le delta intérieur du Niger « entre les lignages libres et propriétaires, les lignages libres mais non propriétaires et les communautés d’anciens esclaves ». Il pointait le conflit entre pasteurs des zones rendues de plus en plus arides par la désertification à la recherche de pâturages pour un cheptel en constante augmentation, et une politique gouvernementale d’accroissement des surfaces cultivables irriguées appartenant à des « élites locales peules issues de groupes statutaires dominants » qui contrôlent l’accès au delta et exigent des contreparties financières de plus en plus élevées.

Le légitime besoin de sécurité dans la zone est donc indissociable de la satisfaction préalable des besoins économiques de chacun. Or, l’internationalisation du conflit et l’implication d’éléments russes perturbateurs à dessein la rend très improbable.

Se pose désormais la question de savoir si une stratégie d’endiguement du Mali à partir des États voisins a des chances de succès, sachant qu’ils sont déjà eux-mêmes gangrenés de l’intérieur par ces mêmes problématiques ainsi que par le groupe Wagner.

S’il est permis d’en douter, son succès passerait nécessairement par une refonte en profondeur de notre politique de coopération vers un format beaucoup plus local et beaucoup plus réactif afin de recouvrer le soutien des populations locales. Mais ça, contrairement à la France et à l’Europe qui persistent à multiplier les organismes de financement et la bureaucratie qui va avec, la Chine l’a bien compris.

 

*Officine du Département de la Défense des États-Unis

**Relations de pouvoir locales, logiques de violence et participation politique en milieu peul (Région de Mopti), p 7, un rapport du projet Stabiliser le Mali, mai 2018, par Marie Brossier, Cédric Jourde et Modibo Ghaly Cissé pour le Centre FrancoPaix en résolution des conflits et missions de paix, Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques, Université du Québec à Montréal.

 

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Quand on se souvient que c’est la gauche de Hollande et Macron qui n’avait cessé de critiquer la France Afrique colonialiste de de Gaulle qui a envoyé nos troupes au Mali en 2012 , pour six mois comme disait Hollande, pour aider le gouvernement à lutter contre les djihâdistes, ( c’était le plus beau jour de sa vie comme disait Hollande!) et qu’aujourd’hui, après avoir laissé sur place 56 de nos plus vaillants soldats , c’est le mêle Macron qui sonne la retraite honteuse de nos troupes !!!!

  2. L’Afrique possède toutes les richesses et sur la planète ,le seul continent qui « végète » c’est l’Afrique !! Cela imposerait qu’il faudrait se poser les questions sur les capacités de ces habitants à se diriger !!!

    • Ils savent tendre la main pour quemander « cadeau, cadeau » mais pas pour travailler. L’avenir du mali c’est le bonheur avec les djihadistes.

  3. Le Mali nous fiche dehors à coups de pieds aux fesses et les maliens installés chez nous continuent à profiter des largesses du con-tribuable français. Et Jupiter qui continue de fanfaronner, de jouer au pacificateur du monde pour épater la galerie. Ce type n’a aucune fierté OK, mais il ne devrait pas oublier qu’il fait honte à la France, le pays qu’il est censé défendre ! Saura t’on un jour ce que nous aura coûté ce Mali ? Macron va t’il demander pardon et ouvrir le chéquier des Français ?

  4. Si seulement ils pouvaient appliquer un retrait bilatérale les français revenant pour être utile à d’autres tâches et les maliens pour aider leur pays à se relever grâce à leurs nouveaux alliés (depuis les années 50 l’Afrique est le seul continent de la planète qui n’arrive pas a se développer et à quémander en permanence)

  5. Bamako au Mali, c’est fini, mais les Bamako en France sont nombreux.
    Nous pouvons le constater dés que l’ on met le nez dehors. Ah, vous ne sortez pas, alors
    allumez votre télé Le record pour le foot 8/10 sont de couleur, les 3 autres souvent typés
    Du racisme, non, une constatation
    Et puis, laissez danser les maliens, ils constateront très vite la différence de traitement

  6. Connaissant bien l’Afrique depuis plus de 40 ans (missions chirurgicales) il faut les laisser se débrouiller tout seul, très vite les lois de Darwin régulerons tout ça!

  7. rapatrions nos forces armées et renvoyons au Mali les forces vives (!) dont il a bougrement besoin ! Hollande et Macron criminels devant la Nation !

  8. Macron « a décidé » de se retirer du Mali. Ne serait-il pas plus juste d’écrire que l’armée française a été mise dehors du Mali par la junte au pouvoir. Quelle gifle pour Macron qui n’a décidément aucun respect pour notre armée, pas plus que pour la France d’ailleurs.

  9. Il fallait quitter cette usine à gaz bien avant. Nous étions considérés comme d’horribles colonisateurs ; laissons ces peuples s’arranger et commercer avec leurs nouveaux amis Russes ou Chinois qui les aideront et prendront volontiers bien soin d’eux.

    • En effet seuls les chinois auront le style et la puissance de mettre de l’ordre en Afrique. Ils sauront gérer ce que nous français sommes incapables de faire car nous n’avons qu’un mot à la bouche : charité… ce n’est pas un service à leurs rendre. Que tous les Maliens qui sont sur notre territoire et sont éduqués retournent dans leur pays pour y mettre de l’ordre! sinon d’autres s ‘en occuperont à leur place et d’une autre manière…

  10. La vraie problématique est elle les groupes djiadistes ou les richesses minières de ces contrées ?
    – les djiadistes sont avant tout des trafiquants en tous genres qui s’entretuent pour cela. Comme les « frères musulmans » ils s’occupent de la santé de ces peuples ignorés de leur dirigeants corrompus, bien sûr ils mettent leur nez dans l’éducation
    – les richesses minières, dont l’uranium, sont convoitées par les chinois, certes, mais aussi par les américains et les russes
    Peaux de bananes

  11. Comme le bon psychopathe qu’il est, Macron ne veut pas reconnaître ses erreurs, il porte la responsabilité de la mort de plusieurs dizaines de nos militaires. Honte à lui, il faut le virer le 10 avril pour beaucoup de raisons et surtout l’empêcher d’avoir envie d’envoyer nos soldats faire la guerre ailleurs. Un chef des armées comme il l’a hurlé au général Pierre de Villiers qui n’a pas fait le service militaire.

  12. Il y a longtemps que nous aurions du quitter ce pays .Trop de soldats y ont laissé la vie alors que des maliens en âge de se battre sont venus se planquer chez nous abandonnant enfants , femmes et vieillards , quelle honte .Renvoyer tous ces maliens ,leur place est là bas .Et surtout cessons de financer on ne sait quoi parce que la population ne profite pas de nos aides .

  13. Mais si M Macron c’est un échec ! Notre présence au Mali n’est plus souhaitée nous sommes considérés comme des colons . Nous sommes restés trop longtemps. Avoir mis un coup d’arrêt au terrorisme , OK , mais s’incruster ce n’était pas raisonnable. M.Macron vous avez donc une part de responsabilité dans la mort de nos soldats .
    quant à prendre modèle sur la Chine pour engager un partenariat commercial , alors là Non . La Chine fait un pilage systématique des richesses et peu importe la manière.

    • il faut constater le résultat ailleurs dans le monde, pas de palabre des résultats peu importe les moyens, c’est la démocratie à la chinoise

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