Après-confinement : l’asile de fous pour les Français ?

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Là, comme ça, du fond de ma thébaïde, je le sens plutôt mal, le jour d’après. Faut dire que c’est un peu de ma faute. Je ne regarderais pas la télévision, sauf pour voir pour la énième fois un bon vieux de Funès, je verrais sans doute différemment les choses. Mais il faut bien du carburant pour alimenter la chronique. Je le sens mal, donc, car je vois bien que ça part dans tous les sens et j’avoue être d’accord avec Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, qui demandait, dimanche, sur BFM TV, si on ne voulait pas « rendre fous les Français ». Après le confinement, l'asile d'aliénés ?

En effet, nous ne sommes peut-être pas à la moitié du tunnel que, déjà, on promet, non pas des lendemains qui chantent, mais du sang et des larmes. Les Français ne sont pas stupides, ils savent bien qu’il faudra retrousser les manches en espérant que ceux qui ont vu leur activité fermée administrativement ne baissent pas définitivement les bras. Par exemple, les nuitées et les repas perdus ne se rattraperont pas. Mais faut-il manquer de psychologie, j’allais dire d’intelligence de situation, pour ne pas dire d'intelligence tout court, pour tenir des propos comme l’a fait Geoffroy Roux de Bézieux, président du MEDEF, sur la nécessité pour les Français de travailler plus, lorsque le pays redémarrera ? Il aurait accompagné cette annonce, dans un esprit du « en même temps » de bon aloi, d’un appel aux grands groupes afin qu’ils renoncent à verser des dividendes cette année, sans doute ses propos auraient été perçus différemment.

C'est comme la sous-ministre Agnès Pannier-Runacher, celle-là même qui estimait, il y a à peine un mois, qu’avec la crise boursière liée à la crise sanitaire, c’était le moment de faire de bonnes affaires. Ne vient-elle pas de déclarer à franceinfo que « l’enjeu est de reprendre le travail plein pot » ? Oui, bien sûr, mais pas un mot, même si c’est symbolique - et les symboles, ça compte, en temps de guerre ! -, par exemple, sur la modération salariale chez les grands patrons, sur l’abstinence, ou tout du moins la retenue, en matière de dividendes.

À moins – qui sait ? – que ces valets de comédie ne soient en mission commandée dans le rôle du méchant afin de mettre en valeur le gentil « père de la nation ». Qui vous savez...

Ça part dans tous les sens, disais-je. Toujours la sortie du tunnel, mais au plan sanitaire. Ainsi, Christophe Barbier, le spécialiste en tout et en rien, suggère que ceux qui accepteraient le « tracking » (le suivi par téléphone portable avec application ad hoc) soient prioritaires le jour où seront disponibles les tests de sérologie permettant de déconfiner les heureux immunisés. « Il faut une carotte », n’hésite-t-il pas à dire, très décomplexé. L’a sans doute compris, Christophe Barbier, que le bâton ne suffit pas pour ces ânes de Français. Que la technique du « tracking » soit une solution pratique pour déconfiner, dans la mesure où les libertés fondamentales sont garanties, pourquoi pas. Mais envisager que l’on puisse assimiler une offre de santé – car il s’agit bien de cela, au fond - à un certain chantage ne confine-t-il pas, si l’on peut dire, à la perversion du pacte social ? Mais là aussi – qui sait ? -, le chroniqueur agit-il comme une sorte de testeur des défenses immunitaires du corps social déjà bien malade ? Pas besoin, du reste, qu’on le lui commande - je dis cela pour ceux qui voient des complots partout ! -, il semble faire cela très bien de sa propre initiative, tout naturellement !

Peut-être sommes-nous déjà dans la maison de fous.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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