Amour, sexe et technologie : du labyrinthe au cul-de-sac
RFI se fait l’écho extasié de l'exposition « Futures of love », en cours à Paris, jusqu'au 20 octobre. Pensée comme un voyage sensoriel en forme de labyrinthe, celle-ci propose d'« anticiper les devenirs possibles de la vie amoureuse et sexuelle en lien avec les nouvelles technologies, les avancées scientifiques, l’évolution des pratiques, des mœurs et des idées ».
Dans ce labyrinthe, on est appelé à extirper de notre subconscient le conservatisme et le conformisme qui nous empêcheraient d’évoluer. Pour cela, une quarantaine d’artistes internationaux nous ont concocté « une vision prospective sur l’amour et la sexualité », inspirée par divers qualificatifs accolés au terme love : « computed, virtual, self-obsessed, robotic, chemical, fluid, hypernatural, infinite ».
Pour inventer le monde de demain, le visiteur-Minotaure vient ici compulser ses propres désirs et pulsions, se libérer de ses « archaïsmes » grâce à un fil d’Ariane technologique : « l’amour prédit par les algorithmes ; dématérialisation des relations amoureuses et charnelles ; quête de l’amour et culture selfie ; êtres artificiels, désir et sentiment amoureux ; amour et attirance physique domptés par la science » et autres promesses d’une évolution non sélective, véritable « Roundup » de l’amour naturel, ringardisé. On pourrait même, dans un futur proche, tomber amoureux d’un robot ! Génial, non ?
S’agit-il d’un projet grivois d’avatar de l’Homo erectus ? Assiste-t-on à une réplique de Mai 68 pour geeks immatures avides de jouissances sans entraves ? Ou serait-ce une idée marketing pour industries à la recherche de marchés et solutions en quête de problèmes ?
En réalité, ça en dit long sur l’état de désorientation et d’ennui existentiel de notre époque en quête de changement pour le changement ; transition vers quoi, à quel point transitoire ? Pour qui ne dispose pas de solides repères psychologiques, affectifs et moraux, le risque est grave de se perdre dans ce cul-de-sac. Car après cent ans de pratique et de recherche, la psychanalyse est loin d’avoir dénoué la complexité des rapports entre inconscient et sexualité.
Face à la dictature du genre, des analystes considèrent que « le véritable totalitarisme de nos sociétés modernes consiste en cette frénésie de vouloir identifier, étiqueter, labelliser » au détriment d’une approche intégrale de l’être humain (1). C’est ainsi que des courants dits alternatifs, transidentitaires et transsexuels recourent fébrilement à la science et au « progrès incontestable de la modernité » pour ébranler les normes en vigueur. On sait pourtant que la technique, pour tromper l’ennui ou débrider la sexualité, ne corrigera pas « les stéréotypes aliénants comme celui de la femme-objet » (2).
Or, ce cheval de Troie, en développant une addiction de plus dans une société atteinte de polymutation, contient des formes redoutables d’aliénation. Tandis qu’un nombre croissant de transgenres refusent toute thérapie par la réassignation identitaire pour soigner leur trouble, qu’ils nient, et résoudre leur problème de désocialisation, des psys taubiresques et schiappistes affirment dans les médias nationaux que « la cellule familiale est le milieu de tous les dangers » (sic), à l’origine des faits divers dramatiques qui jonchent le quotidien.
Ainsi, freiner l’idéologie du progrès est un combat permanent mais juste. Pour en maîtriser les dérives, prenons le temps de l’évaluer aux questions qu'elle évacue plutôt qu’aux réponses qu'elle apporte (3).
(1) Psychanalyse et xénophobie, Betty Bernard Fuks, revue « Insistance » n° 12 « Sexualité et diversité », Eres, 2017
(2) Trans, dys, switch : le sexe en abîme, Thierry Delcourt, op. cit.
(3) Selon le conseil du penseur allemand Günther Anders, notamment dans L’Obsolescence de l’homme. Lire aussi les philosophes visionnaires français Jacques Ellul et Gilbert Simondon sur l’impact de la technique dans la société.
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