À un an de la présidentielle, Macron brûle-t-il ses vaisseaux ?
À moins d’un an de la prochaine élection présidentielle, on pouvait s’attendre à ce qu'Emmanuel Macron, que l’on dit candidat à sa propre succession, ne fasse plus rien d’autre que ce qui peut lui permettre d’être réélu.
Par rapport à cette règle, on voit pourtant d’étonnantes étrangetés de comportement.
D’abord, la suppression, coup sur coup, de l’ENA, des grands corps, notamment l’Inspection des finances dont il vient, et du corps préfectoral. Il est classique que, depuis la nuit des temps, les rois, confrontés à des revers, coupent les têtes de leurs « mauvais conseillers » pour les donner en pâture au peuple qui veut qu’on punisse les responsables. Mais ce projet va bien plus loin. Ce n’est pas à tel ou tel ministre, c’est à la substance même de l’appareil d’un État multiséculaire que Macron s’en prend. Décision d’autant plus étonnante qu’il est lui-même, jusqu’à la caricature, le produit de ce système incarné par l’ENA et l’Inspection des finances, y compris dans ses pires travers : apriorisme, arrogance avec un certain mépris secret du peuple français, voire de la France.
Mais tout stratège électoral sait qu’on ne touche pas impunément à un groupe aussi nombreux : plus de 5.000 personnes en position décisionnaire, politisés et influents, sans compter tous ceux que l’on assimile à des énarques parce qu’ils ont les mêmes défauts et qui n’en sont pas : les médecins qui ont organisé la lutte contre le Covid-19 ou les pédagogues qui font les programmes scolaires. Il est clair que la plupart d’entre eux voudront à n’importe quel prix se débarrasser de Macron dans l’espoir que ces réformes seront reportées. Pour un effet d’annonce vite oublié, Macron se fait beaucoup d’ennemis.
Le Rwanda est une autre énigme. Kagame est à Paris lundi et Macron devrait aller au Rwanda le 27 mai prochain. Cela ne correspond à aucune nécessité et ne peut conduire qu’à déposer de nouvelles repentances au pied de cet homme qui ne cesse, depuis 35 ans, d’attaquer et d’humilier la France. Cela, par des accusations de complicité de crimes imputées à notre armée qui sont totalement fausses. Kagame a la mentalité d’un seigneur de la guerre sans pitié pour ceux qui se couchent. Macron ne récoltera de cette visite qu’un peu plus de mépris. Mais la question est pourquoi ? La plupart des Français ne savent pas où est le Rwanda et, électoralement (à la différence des Algériens), les Rwandais ne pèsent rien. Macron est au contraire sûr, par cette visite, de mécontenter un peu plus une armée déjà à cran en confortant les accusations du dictateur sans que personne, en haut lieu, ne la défende.
Le comportement du Président est incompréhensible. À moins de se dire qu’il sait déjà que, de gré ou de force, il ne fera pas un second mandat. Il tient, dès lors, à achever une « œuvre », qui est plutôt une œuvre de destruction, qui figurait au programme. Le programme de qui ? De lui ou d’autres, de ceux qui, en France ou à l’étranger, ont permis son élection de 2017 et dont l’abaissement de la France est un objectif en soi ? L’ENA et le corps préfectoral sont plus que des symboles, ils sont la figure actuelle de ce qui a fait la force de la France, son État, avec ses bons et ses mauvais côtés. Avec le Rwanda, c’est l’honneur et la fierté de notre pays qui sont en jeu. Dans les deux cas, c’est la France. Pour Macron, brûler ses vaisseaux, c’est s’en prendre à elle.
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