22 avril 1917 : la France fête dignement les États-Unis
En ce 993e jour de guerre, la guerre continue de plus belle sur de nombreux fronts, entre Somme et Oise, avec de nombreux tirs d’artillerie ; au Chemin des Dames où les camps luttent à coups de grenade dans le secteur d’Hurtebise ; entre Reims et Champagne, les canonnades sont assez vives…
Ce dimanche de printemps 22 avril, le Tout-Paris descend dans les rues pour rendre hommage aux États-Unis, qui sont entrés en guerre aux côtés des Alliés seize jours auparavant, le 6 avril. La plupart des journaux datés du 23 avril relaient et relatent l’information en une : "Paris fête avec enthousiasme les États-Unis aux côtés de l’Entente", titre Le Journal. "Paris rend hommage aux États-Unis", annonce L’Œuvre ; "En l’honneur des États-Unis", titre Le Figaro ; "Les États-Unis fêtés à Paris", fait écho Le Petit Journal, etc.
Les autorités de l’époque ne mégotent pas pour fêter les « Sammies ». Les principaux monuments sont pavoisés aux couleurs françaises et américaines. Une forte délégation, notamment conduite par Jules Cambon (1845-1935), ancien ambassadeur de France à Berlin, et le général Augustin Dubail (1851-1934), gouverneur militaire de Paris, se rend, avenue d’Eylau, à l’hôtel particulier de William Sharp (1859-1922), ambassadeur des États-Unis en France. Ils lui remettent "une plaquette, spécialement exécutée pour la circonstance et représentant l'Aigle américain protégeant la “Liberté qui éclaire le monde”, reproduction de la statue de Bartholdi", indique Le Figaro.
Après une heure trente d’entrevue, tout ce beau monde se rend place d’Iéna, devant la statue de Washington où sont groupés de nombreux Américains de Paris, participant à l’effort de guerre (infirmières, médecins…). La musique du 230e régiment d’infanterie territoriale entonne l’hymne américain et M. Paul Strauss (1852-1942), sénateur de la Seine, dépose ensuite sur le socle de la statue une palme de bronze. Un Morane de l’escadrille Lafayette survole la foule. Puis c’est au tour de "La Marseillaise" d’être entonnée. "Les Américains, qui connaissent mieux que certains Français les strophes immortelles de Rouget de Lisle, les chantent avec une conviction profonde et presque sans accent", souligne Le Figaro. L’hymne achevé, vingt et un coups de canon retentissent sur le Champ-de-Mars et les deux drapeaux, français et américain, sont hissés au sommet de la tour Eiffel.
Puis le cortège de personnalités se rend à la statue de Lafayette, place du Carrousel, saluée par la foule en liesse aux balcons et le long des trottoirs. Le monument est encadré par les aviateurs de l’escadrille éponyme. C’est au tour de William Sharp de déposer une palme de bronze portant l’inscription « Aux héros de la liberté dans les deux mondes ». Les discours se succèdent. Enfin, le cortège se dirige vers l’hôtel de ville sous les vivats "d’une foule plus dense encore". La délégation est accueillie par Adrien Mithouard (1864-1919), président du conseil municipal. Aux hymnes nationaux joués par la Garde républicaine suivent les discours, et un lunch servi dans le salon des Arcades de l’hôtel de ville. Il n’en reste pas moins que "Le Journal est heureux d'avoir provoqué cette manifestation symbolique et grandiose…", note-t-il avec une pointe de fierté. Il y consacre toute sa une du 23 avril.
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